
Blog Michel Deleuil
LOCALES
NOS TITRES :
HISTOIRE DE GARDANNE
Petit résumé d’Histoire locale
HISTOIRE DE GARDANNE
Réédition
1. Préhistoire et Antiquité :
1.1. La Préhistoire
Les Néandertaliens n’ont pas laissé de traces sur la commune. Ils occupaient le ‘nord’ : Plateau de Sault, pays niçois, plus tard le Calavon, le Verdon et l’Ayguebrun.
L’homme de Cro-Magnon ‘descend’ vers le sud, poussé par les glaciations. Vers – 40 000 (Paléolithique récent), il occupe l’axe Martigues-Pilon du Roi, site boisé, giboyeux et riche en grottes. Au nord, les bassins de Gardanne et de l’Etang de Berre sont des tourbières, qui deviennent de grands marécages avec le réchauffement. Au sud, le littoral est souvent lointain (l’entrée de la grotte Cosquer est à – 37 m).
Il habite des grottes à Sicard (Châteauneuf-lès-Martigues), le Riaux (L’Estaque), Saint-Julien Fontainieu (Marseille nord), la Montade, Mauvelle, le Pilon du Roi, Pont de Joux (Roquevaire) et le Colombier (Le Tholonet). Il organise des expéditions de chasse et utilise des camps temporaires. La commune de Gardanne est certainement parcourue par ses pistes. Son aptitude intellectuelle lui fait envisager une vie spirituelle (galets peints, art pariétal de la grotte Cosquer en – 27 000).
Au Néolithique, à partir de -5500, il réalise d’immenses progrès techniques (pierre polie, poteries, élevage, agriculture). L’homme cultive le blé tendre et l’orge, il élève un petit bœuf, le mouton, la chèvre du Rove (Plan de Cuques, Pont de Roquefavour, Mimet grotte du Manjaïre) etc. Il crée dans les plaines des habitats de plein air. Font de Garach est occupé au Chasséen (-4500 à -3300).
Les fouilles de 2004 étaient situées sur une zone de rejet, c’est-à-dire un lieu où le ruisseau déposait les menus morceaux perdus, de céramiques, pierres, os, outils, etc. (1) On peut imaginer un hameau d’agriculteurs-éleveurs, avec bâtiments construits (maisons, bergeries) décelés par les trous de poteaux. Les défrichements se font par brûlis et le travail par la houe. On obtient la farine et les galettes, l’élevage fournissant la viande, le lait, la laine et le cuir. La chasse, la pêche et la cueillette continuent d’être pratiquées. Très peu de sites de plaine avaient été découverts avant Font de Garach : La petite Bastide (Bouc), Avon et RD 6 vers Meyreuil. Ce devait être un habitat important et dense. Mais ce premier Gardanne a été abandonné, peut-être vers -3000 ou plus tard.
← Couteaux néolithiques de la chaine du Rove, semblables à ceux trouvés à Font de Garach
Vers –2500, l’homme ensevelit ses morts en orientation est-ouest. Il produit des marmites et de grands récipients, dans de véritables ateliers, comme les Grottes Loubières (Château-Gombert). Au Pilon du Roi, cinq grottes forment comme un hameau. Quatre étaient habitées, la dernière servait de cimetière. On y a trouvé de la vaisselle et un ustensile à fond plat dont les linguistes se demandent s’il ne s’appelait pas déjà le tian.
Dumézil et Rostaing ont montré que nombre de toponymes provençaux provenaient du langage de ces hommes préhistoriques (2). Exemples : Abis, Crau, Esclapier, Fontvenelle.
L’agriculteur construit maintenant en dur de véritables villages, comme à la Couronne ou à Saint-Julien (Marseille). Pierres, mortier d’argile, torchis, poteaux soutenant un toit de branches, outils en os pour le vannier ou l’habilleur, pierres polies, mais pas de métal.
Vers –2000, le cuivre venant d’Egypte arrive par l’Espagne.
Avec l’apparition de villages plus peuplés (le Baou Rous et Entremont), le mode de vie change. Les hommes dressent des monuments mégalithiques et des hypogées funéraires, mais ne laissent pas de traces sur notre commune, qui est probablement devenue trop marécageuse.
Vers –1000, venant de la mer, apparaissent tout à la fois des Etrusques et des Phéniciens. La métallurgie du fer descend elle d’Europe centrale. Près des mines et des forges, se dressent des tumuli, tombes qui sont peut-être celles de ces métallurgistes. On en trouve à Trets, Peynier, St Savournin, Mimet, et au Montaiguet.
Les autochtones sont dits par nous Ligures. Ce mot désigne la civilisation qui s’épanouit sur l’arc Barcelone-La Spezia, et non les ethnies. Les Ligures sont de grands agriculteurs dans les plaines, des éleveurs sur les plateaux, des chasseurs dans les garrigues, des artisans dans les hameaux. Ils créent les Oppida, ces villages protégés par les remparts, souvent sur des points dominant des voies de passage, ils montent des bories de pierres (refuges de bergers). Ils ont l’huile d’olive, le vin, et probablement la bière. Ils commercent, aidés parfois par des étrangers installés chez eux. Ils s’établissent le long des voies d’eau et des chemins (nos futures nationales).
Le site de Font de Garach est à nouveau habité (-500). Mais les hauteurs sont souvent préférées, par sécurité, car des pirates convoitent les productions. Des tribus rivales font des razzias. Les oppida fortifiés prendront souvent le nom romain de castrum ou de castellas. Près de Gardanne, l’oppidum du Baou Rous, entre Simiane et la Malle, est un site ancien reconverti en village à l’âge du fer. De sa hauteur, il voit Les Pennes, Vitrolles, Cabriès, Entremont, Bouc, le Cengle, l’Olympe, le Régagnas, Mimet et le Pilon du Roi. Ses habitants font partie de la confédération des Salyens, installés dans le bassin de l’Arc. Leurs voisins du sud de l’Etoile sont les Comani, avec pour capitale Ségobrige (Allauch). Ils sont d’excellents agriculteurs et de bons maçons. Ils échangent avec des Grecs, des Doriens de Rhodes qui laisseront les noms de Rhône, Rodinac (Allauch), Rodanas (St Maximin) et la N7, dite voie héracléenne.
Les Travaux d’Héraclès peuvent s’interpréter en un code géographique décrivant les voies commerciales grecques. Le 11e travail consiste à ramener des fruits d’or du jardin des Hespérides (des oranges et des citrons du Maroc), plus 500 taureaux (les Crétois sont avides de courses taurines). Avec ses agrumes, Héraclès retourne à cheval par l’Espagne. Il arrive à Théliné (= péage, Arles) pour prendre ses taureaux. Deux géants lui barrent la route, les frères Ligys et Albion, nés de la mer et de la terre, dans lesquels il est aisé de voir les Ligures maritimes et les Albion du plateau de Sault. Pour secourir son fils, Zeus met à sa disposition des pierres (la Crau) et des roseaux (la Camargue). Héraclès triomphe, prend les taureaux camarguais, passe par Mouriès, Salon, Saint-Cannat, le pont de l’Arc, Langesse, le Tholonet (péage à nouveau), Beaurecueil et le pied du Cengle.
1.2. Massalia
En –594, les Comani autorisent des Grecs de Phocée à fonder une ville au nord de l’anse appelée Lacydon. Des sites comme Ceyreste (La Ciotat), Saint-Rémy, Trets, Vernègues ou Sainte-Blaise sont concernés. De façon générale, les Grecs ne perturbent pas les Ligures. C’est un échange d’intérêts. Par exemple, les maisons de Massalia sont en tout point des maisons ligures, mais les Grecs ajoutent des temples et l’Agora.
Vers –400, surgissent d’autres étrangers, au comportement fort différent. Ils asservissent les autochtones, comme le feront plus tard les Francs et les Goths. Ce sont les Celtes, aristocrates du fer, du cheval, de la guerre et du druidisme. Le Baou Rous disparaît, les capitales Arelate (Arles) et Entremont apparaissent, ainsi que le sanctuaire de Roquepertuse (Velaux). Les querelles avec Massalia s’aggravent et Massalia demande l’aide des Romains. Cela tombe bien. Rome a battu Carthage (-202) et a pris l’Espagne. Elle a donc besoin de la voie héracléenne. Elle intervient en –126. Le général Caïus Sextius Calvinus détruit les oppida. A la suite d’une trahison, Entremont, ville de plus de trois hectares, qui s’était développée du IVe au 1er siècle avant JC pour devenir la capitale des Salyens, est prise.
En –122, Aquœ Sextiœ (Aix) est fondé. En –118 naît la Provincia, dite Narbonnaise.
En –102, une immense bataille met aux prises les Romains du général Marius et les peuplades germaniques des Ambrons et des Teutons, entre le Pont de l’Arc et Pourrières (?).
Les Germains sont exterminés ou amenés en esclavage. Le sort de l’Occident en est jeté. La civilisation sera latine pendant 500 ans. Dans le cas contraire, l’Occident aurait été germanisé dès cette haute époque, sans civilisation romaine.
Certains auteurs pensent que Marius était posté sur le Montaiguet, qu’il attaqua l’arrière garde ambronne au Pont de l’Arc, puis l’avant garde teutonne le surlendemain entre Trets et Pourrières, ses capitaines harcelant les flancs en descendant de Meyreuil, Peynier, Puyloubier et Saint-Antonin. Marius et ses troupes auraient pu alors passer par Valabre, Payannet et la Barque… Rien n’est avéré. Massalia était sauvée, son territoire était agrandi jusqu’à Eguilles et Châteauneuf-le-Rouge, Gardanne inclus.
Les Romains décrivent un pays boisé, sauvage, mis en culture entre Puyricard et Salon.
Font de Garach est exploité : Au dernier siècle avant notre ère, un système de drainage de 80 mètres de long a été construit, parallèle au ruisseau, constitué d’un petit fossé et d’un muret. Au tout début de notre ère, des vignes sont plantées : On fait des tranchées de 40 cm de large, 25 cm de profondeur, espacées de 2 m, et on plante les vignes. En bout de rangée, une tranchée perpendiculaire permettra la multiplication des plans par marcottage. L’orientation des rangs est nord-nord-est / sud-sud-ouest.
En –51, Pompée et César s’opposent dans la course au pouvoir. Massalia s’allie à Pompée. Mauvais choix. César assiège la ville, détruit la flotte, obtient la reddition de Massalia au bout de 5 mois. Pour punir les Phocéens, Rome favorise Arles et Narbonne. Le territoire de Massilia (nom romain) est réduit à une bande côtière vers Fos. La ville perd son commerce, ses écoles, son territoire. Le pays d’Aix est tourné vers le Lubéron. Arles reçoit l’étang de Berre, Gardanne, Roquevaire et jusqu’à Toulon.
← Habitat ligure de Châteauneuf-les-Martigues.
Pendant 14 siècles, Gardanne sera isolé de Marseille et d’Aix. Organisée à la romaine, la région s’articule autour de Massilia et d’Aquœ Sextiœ et de deux chemins, via aurélia (héracléenne) de Tarascon à Fréjus et via aquensis Aix-Marseille par la villa Nono (Plan de Campagne) et Les Milles. Le chemin secondaire Marseille-Trets passe par St Jean de Garguier. Les terres sont défrichées, drainées, cadastrées, attribuées à des Vétérans qui construisent des villas au milieu de leur domaine. Ce sont des hameaux d’exploitation, avec maison du propriétaire, bâtiment des hommes libres et des esclaves, bâtiments pour animaux, outils, stockage des grains, réalisation du vin. Elles se placent dans les plaines, souvent près des rivières, car les Romains aiment l’eau. Des colons s’installent dans notre commune vers + 50. Ils sont Ligures, Celtes, Sémites, Slaves, commandés par un légionnaire-propriétaire. Ils découpent les champs selon une direction proche de Nord/Sud. Ces Gallo-romains s’installent le long de la Lodena (ruisseau Saint-Pierre), à Notre-Dame, Saint-Roch, Jean de Bouc, Saint Michel, Saint-André, Payannet et la Crémade, plus dans deux villas plus excentrées, Verdillon (La Porcelle) et Rambert. En tout, au moins 9 établissements dont il ne reste pas grand chose. Un homme de 30-40 ans a été enterré à Font de Garach, recouvert d’une tuile, vers + 300. La villa la mieux connue, celle de Notre-Dame, a révélé que vers l’an 500 ses habitants possédaient tous les corps de métier nécessaires, verriers, forgerons etc.
← Les 22 sites antiques de Gardanne :
Néolithique = 3 ; 8 ; 22
Celto-ligure = 1 ; 2 ; 5 ; 8 ; 10 ; 11 ; 12
Haut Empire = tous, sauf 9-14-21
Bas Empire = 9 ; 14 ; 21.
La colonisation romaine désigne un domaine par le suffixe anum, qui sous-entend les mots foudoum (fondation) ou villa (hameau). Pour désigner plusieurs villa, anum devient ana (2). Le futur nom de Gardana indique des villas. Plusieurs quartiers de Gardanne ont des noms latins, mais cette langue fut parlée jusqu’en l’an 1000, si bien que l’on ne peut assurer une origine antique.
Payannet = pagus = hameau, mot qui donnera paysan et païen, les ruraux ayant été christianisés longtemps après les citadins. Estrec, Estrech = strata = couche, chemin romain non dallée, revêtue de gravier. Font de Garach = vervagere = labourer. La Porcelle = porcellus = pourceau, lieu où l’on élève les pourceaux. Le Ribas = ripa = talus, penchant d’un coteau. Montaiguet = mons = montagne + aygue = eau. La Luynes actuellement le Saint-Pierre = Lodena = la boueuse. Fangasse = fanga = boue, terrain inondé. La Palun = palus = marais que l’on assèche. Langarie = angariare = mettre en colère. Font (= source), Canau (conduite, canal d’irrigation), Béal (= bief). Le nom de Collevieille qualifie une exploitation très ancienne. Des traces agricoles néolithiques remontent à -3500.
On ne peut rien affirmer, mais Payannet, Ribas et Garach semblent provenir des premiers habitants des villas gallo-romaines.
En 413, les Wisigoths assiègent Marseille. Nos villas sont détruites. Il n’est pas exclu que quelques chrétiens y aient habité dès cette époque. La Provence entre dans 6 siècles de malheurs, pour lesquels on aura très peu d’informations sur Marseille-Aix, rien sur Gardanne. Les Wisigoths prennent Arles et Marseille en 476. A Puyloubier, saint Ser souffrit le martyre par le commandement d’Euric. En 484, les Burgondes prennent les Bouches du Rhône. En 507, Clovis attaque, les Ostrogoths viennent soutenir les Wisigoths. Ils s’en vont en 536 et cèdent notre région aux terribles Francs. De 569 à 574, les redoutables Lombards ravagent la Provence. Des épidémies de dysenterie et de variole sévissent. De retour, les Wisigoths mettent à sac ce qui reste (585-587). La peste prend le relais (588-591), puis la lèpre. En 613, Marseille devient la capitale d’une Provence indépendante, terriblement dépeuplée, désorganisée, fantomatique. L’Eglise n’apparaît plus, l’administration non plus.
↑ Sarcophage chrétien. V e siècle. Marseille, abbaye de Saint-Victor. On reconnaît de gauche à droite le sacrifice d’Abraham, le Baptême dans le Jourdain, le miracle de l’Enfant aveugle.
En 736, Charles Martel vient piller la région. Les chefs militaires appellent les Sarrasins à la rescousse, mais Martel prend Marseille. L’Empire carolingien administre la Provence par des Comtes, les Comtés coïncidant avec les diocèses. En 843, la Provence est attribuée à la Lotharingie. En 855, elle entre dans un royaume éphémère qui inclut Lyon. En 923, les Sarrasins des Maures ravagent le territoire de Marseille. En 1032, la Provence est placée dans le Saint-Empire romain germanique de Conrad le salique.
Il nous faut revenir au départ de ces 600 ans de malheur, car dans cette période noire où l’espérance de vie ne dépasse pas la moyenne de 18 ans, où nombre de gens vivent dans un trou creusé dans la terre et recouvert de branches, une lueur persistante va être à l’origine de Gardanne.
En 413, arrive à Marseille un ermite égyptien, théologien et homme d’action, appelé Jean Cassien. Il fonde le baptistère Saint-Jean-Baptiste (la Major), un couvent pour hommes (Saint-Victor) et un couvent pour femmes (St-Sauveur). Les moines de Saint-Victor, dits Cassianites, sauvent les traditions culturelles, agricoles et pastorales au milieu des troubles. Ils fondent Notre-Dame du Rot (près du col Ste-Anne), St-Jean du Puy (pas de la Couette) et cultivent les terres de la haute vallée de l’Arc (Trets).
A un moment inconnu de nous, le vieux chemin grec Marseille-Trets par l’Huveaune est délaissé au profit du chemin par la Viste, Nono et Favary (zone industrielle de Rousset), peut-être à cause des Sarrasins ou de l’effacement d’Arles dans la région. Les moines de Saint-Victor mettent en valeur ce chemin, qui est à l’origine du castrum de Gardana, probablement avant l’an 900 (3). En effet, selon des critères linguistiques, Gard provient du germanique Gart = jardin. Le nom peut remonter à l’an 700 et présenter un cas mixte, mi-germain et mi-latin, Gart-ana. D’autant que d’autres noms germaniques existent sur le territoire. La Gardy = germanique warda = garder, Mazargues = occitan mas = ferme + suffixe arques = domaine, suffixe utilisé vers l’an 600 pour marquer les nouveaux défrichements. Gart, le jardin, est un lieu clos, gardé. On peut dire que Gardana est un poste créé sur la route Marseille-Trets, entre 500 et 900. Il garde le passage et une production horticole. Ce relais est admirablement situé, au dessus des fertiles potagers (Bonne Personne, rue Puget, bourgades) et des prés, à mi-distance de Marseille et de Trets, les lents chariots à bœufs mettant un jour pour aller vers l’une ou l’autre ville. Plusieurs quartiers restent cependant marécageux (boulevards, la Planque, Font du roi, la Palun, Jean de Bouc).
2. Xe-XVe siècles :
2.1. L’expansion des XIe-XIIe siècles.
Aux environs de l’an 900, les seigneurs de Marseille sont aussi les seigneurs de Trets et de Gardanne. L’acte Curtis Trézia, du 18 août 950 du roi de Bourgogne Conrad, cède des droits à Arlulfe, parent des vicomtes de Marseille, sur 24 communautés, dont Gardana (4). C’est le plus ancien document connu sur Gardana, avec Arlulfe comme premier seigneur connu.
En 923, Saint-Victor et Marseille sont détruits par les Sarrasins, que Guillaume d’Arles expulse en 972. L’abbaye se reconstruit. De 1005 à 1047, elle est dirigée par le grand abbé Isarn. L’activité agricole reprend vers Trets. Les donations sont fortement sollicitées, pour le salut de l’âme. En 1022, Gardana est passé à la puissante famille aixoise des Brussans-Palliol avec pour vassal Archimbert, seigneur de Bouc : « Archimbert et son épouse Maïamburge donnent au monastère où repose le corps de saint Victor martyr, l’église St-Pierre qui est au comté d’Aix, à peu de distance du castrum qu’on appelle Gardana, plus les terres qui vont avec. Au surplus, ils donnent dans le village un mansus cultivé par Durand Pendentia, en y ajoutant vignes, prairies, champs cultes et incultes entretenus par Gualterius » (3). En 1028, il donne aussi un mas au quartier de Grazasca (Gréasque) et des terres à Bouc.
Ces donations nous apprennent l’existence de l’église St-Pierre sous l’autorité de Saint-Victor (quartier Notre-Dame) et du castrum du Captivel. Ainsi sont en place le pouvoir civil (castrum) et le pouvoir religieux (St-Pierre). D’autres donations nous offrent des noms d’habitants. Emma cède une terre au quartier de Trélias (latin Tréhia = plantation de vignes, lieu appelé aujourd’hui Les Aires), terre qui touche le chemin public et le ruisseau de Clusa (vallon St Pierre). Etiennette donne sa vigne contre la Luynes, le chemin et le petit vallat de Mols, autrement dit espace actuel Jean Jaurès / Carnot (1025) Ainsi, les premiers propriétaires connus sont des femmes (Maïamburge, Emma, Etiennette).
Pendant trois siècles, Marseille et Aix, pouvoirs politique et religieux compris, rivalisent pour récupérer Gardana et le val de Trets. Les seigneurs de Bucco (Bouc), alliés aux comtes d’Aix « sont implantés à Bouc, Gardanne, Gréasque et Venelles » (5). La féodalité rejette la trop lointaine Arles comtale mais s’affronte sur les ressources voisines.
Les Bénédictins de Saint-Victor fondent à Saint-Pierre un monastère. Ils élèvent et desservent plusieurs églises, une dans le castrum (Sainte-Marie), une au pied du rempart (qui s’appellera Saint-Valentin), trois chapelles aux alentours, au nom des saints Etienne (Estève), Michel et Baudile. Tout ceci est en place en l’an 1100 (3).
Gardana participe à l’extraordinaire renouveau d’après l’an 1000. L’introduction du collier et du ferrage pour les chevaux y contribue, les vicomtes de Marseille aussi. Car ces Arlulfe, Reforciat, Pons de Peynier, Burgondion, sont forts riches (ils possèdent une partie de Marseille, le val de Trets, Toulon, les Maures) et sont très liés aux abbés de Saint-Victor, auxquels ils font des cadeaux. L’abbaye devient l’une des plus riches d’Occident.
On parle une langue occitane, on écrit encore en latin.
Grâce à de remarquables abbés et à sa richesse, Saint-Victor acquiert un lustre européen. En 1195, Roncelin est vicomte de Marseille et seigneur de Gardana. Notre prieuré Saint-Pierre est donc dans le diocèse aixois mais sous administration victorienne. Preuve de son importance, il paie la moitié de ce que paie le prieuré de Trets, le plus riche de la région.
Vers 1200, on peut imaginer Gardana comme une enceinte (porte Bel-Air), qui protège une tour seigneuriale, une église et quelques maisons. Passe à ses pieds le chemin de Marseille à Trets, (Jean Jaurès, Font dei Pèsé, rue Puget, place Ferrer, rue Parmentier). Entre le rempart et le chemin, quelques maisons et une église (St-Valentin). Devant, des étangs et des prés inondables. Les labours et les vignes sont plus loin, à l’Abis, Payannet, La Gardy, Ribas, La Crau, Chemin Estrec, Notre-Dame. La chapelle Saint-Michel (usine) abrite un cimetière. Les collines sont sauvages. En tout, peut-être, 300 habitants.
2.2. Les crises des XIIIe-XVe siècles.
Les comtes de Provence, issus de Guillaume le Libérateur, sont implantés à Arles. Comme ils convoitent Marseille et Forcalquier, ils viennent s’installer à Aix. Leur lutte contre le vicomte de Marseille pour s’approprier les richesses du port a des conséquences pour nous. D’abord, Saint-Victor intervient, trahit le vicomte et les Marseillais, et perd son prestige. Ensuite, Aix/Arles est victorieux et Marseille est amoindri. Saint-Victor s’en sort avec l’appui du pape, mais il suffit de lire le commentaire de l’abbé Chaillan, pourtant inconditionnel de l’abbaye, pour mesurer le mal : « Saint-Victor est rongé de l’intérieur. L’hérésie manichéenne (cathare) désole durant plus d’un siècle la vallée de l’Arc en infestant Gardana. Les curés, les prieurs, abandonnent leurs églises, louent des prêtres mercenaires, peu instruits, mal formés, mal rétribués, enfin adjugent leurs paroisses, dîmes, locaux, propriétés au laïque le plus offrant » (3).
En 1205, Guillaume de Forcalquier envahit et ravage le pays d’Aix pour faire annuler la paix défavorable qu’il a signée avec son gendre, le comte de Provence Alphonse II.
Au printemps, au cours d’une bataille à la plane de Gardana (chaufferie de l’usine) Guillaume fait prisonnier Alphonse puis assiège le castrum de Bucco (Bouc). Les propriétés du vicomte de Marseille, y compris Gardana, passent à Hugues de Baux (1212).
← Croix des Templiers associée à l’étoile des Baux, vers 1205. Favary. Relevé par Jean Ganne, 1998.
Cette stèle confirme les possessions baussenques d’Arles jusqu’à Roquevaire. Saint-Victor a vendu Favary aux Templiers de Bayle, d’où leur croix.
L’orgueilleuse famille de Baux aux 300 donjons exploite sans vergogne ses serfs et ses petits vassaux. En 1254, les chevaliers qui habitent Gardana se révoltent contre leur suzerain. Les arbitres exigent de revenir à l’état antérieur à 1212 : Les chevaliers et damoiseaux n’ont pas le droit de nommer des consuls (de faire commune) ni de lever des tailles. Ils doivent administrer la justice, recevoir les cavalcades, percevoir les droits seigneuriaux (en clair servir le comte).
Charles d’Anjou, frère de Louis IX, est devenu comte de Provence par mariage (1246). Hugues de Baux lui fait la guerre puis se soumet (1269). Nouvelles contestations des chevaliers, nouveaux arbitrages. Le suzerain pourra faire dresser des fourches patibulaires sur le territoire (avis aux amateurs). En 1286, Bertrand II de Baux hérite de Berre, Gardana, Gémenos, Roquevaire. On se croirait revenu au temps d’Arles.
Les chevaliers de Gardana Guillaume Mayol et Hugues Cocullat prêtent serment. Un acte de 1292 cite les chemins vers Mimet, le Rot (col Sainte Anne), Collongue, Marseille, Cabriès, Aix, Meyreuil. En 1302, Hugues de Baux III teste en faveur de Charles II d’Anjou, qui prend possession de Gardana, où 256 familles signent le procès verbal (environ 1000 habitants), dont 15 nobles, dont les noms sont germaniques : Emengau, Raymond, Aycard, Bertrand et Raimond de Roquefort, Douceline et Asalasie de Roquefort, Aycard de Signe, Ranolfe, Raynaud, Huguet de Gardana, ses fils Raynaud et Bérenger, François, Rodolphe.
Signe de l’insécurité des temps, les Baux fortifient la ville. En 1357, Gardana est muris circumdatum. Cette deuxième enceinte est plus développée que celle du castrum.
En 1348, la reine Jeanne, héritière d’Anjou, comtesse de Provence, débarque à Marseille. Sans le savoir, son bateau apporte des rats pestiférés. C’est la grande peste noire. L’Europe perd près de la moitié de sa population, la ville de Martigues tous ses habitants. On ne sait rien des dégâts causés à Gardana.
← Bergers. Bas relief XIIe s. Chartres. Le premier écoute l’ange, le second joue de la flûte. Les bergers provençaux ont gardé cette pèlerine. La musique des anges est présente dans les légendes de la Sainte-Baume et de notre Dame des Anges.
L’abbé de Saint-Victor devient le pape Urbain V à un moment où les ambitions préparent aux guerres politiques, au grand schisme et aux disettes (1362). Le vieil homme, tourné vers le savoir, fonde à Trets un studium de 100 élèves, alors que le schisme va créer deux papes et deux partis.
Gardana sera pris dans la guerre. L’Union d’Aix défend le neveu de Jeanne (Duras) et les papes de Rome. Marseille est du parti du roi de France et des papes d’Avignon. Elle appelle le routier Arnaud de Cervole. Sitôt arrivé, celui-ci bloque Bouc, Collongue et Gardana (1383). Le rempart sauve le village, mais pas la campagne.
L’Union d’Aix finit par accepter Louis II d’Anjou comme comte (1388). Raymond de Turenne, neveu d’un pape d’Avignon, prend alors les pillages à son compte. Depuis ses repaires de Roquemartine, Pertuis, Meyrargues et les Pennes, il répand la terreur. Dans les environs sont rasés Meyreuil, Châteauneuf-le-Rouge, Rousset, St-Antonin, le Tholonet, St-Marc, St-Canadet, St Jean de la Sale, Venelles, Puyricard, le couvent des Clarisses d’Aix. Gardana est à nouveau sauvé par le rempart, le plat pays est à nouveau dévasté. Le monastère de Saint-Pierre, la chapelle Saint-Michel, le cimetière et Payannet, sont en ruines.
En 40 ans, Aix est passé de 9000 à 3930 habitants, Gardana de 800 à 80. La plupart des Provençaux sont réfugiés dans les villes fortes. Les campagnes sont en friche.
Le redressement sera lent, car les pestes sont récurrentes et les caprices climatiques néfastes. Par exemple, les 10 premières années du XVe siècle sont très humides.
La reconquête des terres abandonnées se fait parfois par la construction d’une bastide au cœur du domaine ou par une maison « secondaire » dans le village. Pierre Chaussegros achète Mimet, l’archiviste aixois Pons de Rousset achète Gardana.
Gardana a beaucoup souffert de la rapacité des Baux, des razzias de Cervole et de Turenne, ainsi que des fléaux naturels. Mais un siècle de tranquillité l’attend.
3. Le roi René : (Voir Gardanne et le roi René)
La présence du roi René à Gardana ne revêt pas plus d’importance que d’autres faits. Mais pour une fois, la documentation est abondante, précise et parfois gaie. On pourrait écrire plus sur ces 25 années que sur 10 siècles d’histoire de ce village.
La surface cultivable atteint 1000 hectares, mais moulins et aires font défauts. Les frères Fabri, laboureurs (propriétaires), aident à la construction de l’hôpital Saint-Michel, près de la chapelle ruinée (usine). Pons de Rousset relance l’opposition d’Aix contre Louis III d’Anjou. Pons est arrêté et décapité (1427). Ses biens sont confisqués, « maison avec vignes, oliviers, jardins, terres cultes et incultes, plaines et collines, étangs, prés, herbages, bois. » En tout, 270 hectares. En 1434, Louis III meurt et son jeune frère René hérite.
En 1457, René vient en Provence. Il choisit Gardana pour installer sa ferme et son élevage. Il demande que l’on francise le nom en Gardane. Avec son valet écrivain Jean le Prieur, il produit une pastorale de 3000 vers, Regnault et Jehanneton, fortement inspiré de la vie champêtre gardannaise.
Un moulin à eau est construit aux Frères (quartier Mistral). Des aires sont aménagées (35-41 rue Borély), de même que les étangs du petit et du grand Pesquiers. On fonce un puits communal. René donne à son valet Pierre du Billant et à deux juifs aixois le droit d’exploiter le charbon sur la propriété des Oratoriens, que l’on va pour cela appeler Capéou (le chapeau jaune des juifs) et Camp Jusiou. Une nouvelle chapelle est construite : Saint-Sébastien, pour abriter les reliques de ce saint protecteur. René introduit à Gardane la fête du valentin de l’année (1473) et accorde le droit de foire ce jour-là. Il dessine le blason de la ville.
René meurt le 10 juillet 1480. Le 11 décembre 1481, la Provence est associée à la France. Il a préféré, par testament, l’axe franc vers Paris à l’axe occitan Espagne-Provence-Italie.
Gardanne aura tiré profit de cette période : Paix, aménagements, agrandissement des prés, jardinage (safran), apprentissage de la gestion communale.
4. XVe-XVIIIe siècles :
A la fin du XVe siècle, Gardane est une ville fortifiée de 500 habitants, entourée de prés, labours, pâtures, vignes, vergers et jardins, jas et une grande draille qui traverse le territoire. Mais trois maux continuent à faire d’elle une commune pauvre. D’abord le découpage extrême des propriétés, ensuite le manque récurrent de main d’œuvre (appel à des saisonniers qui remportent leur gain), enfin, la rapacité des seigneurs (Forbin) et la guerre.
Des progrès sont cependant visibles : Moulin, aires, puits communal, hospicium (rue Bel-Air), Pesquier, irrigation, exploitation minière, privilèges (foire), droit de pâture et de bois dans un rayon de 5 lieues. La Communauté est bien en place.
La plupart des nobles vivent à Aix, parlent le provençal et exigent qu’il soit celui des actes officiels, afin de montrer l’association entre la Provence et la France. Ce faisant, ils tuent la vieille langue romane populaire, composée de cent patois locaux.
Gardane est un cas particulier : Son seigneur est marseillais, frère du Président Palamède de Forbin, très mal vu de la noblesse. Jacques de Forbin (1435-1495) a acheté Gardane et ses descendants tiendront ce fief pendant 200 ans, sans préserver les habitants des malheurs des temps (guerres, impôts, illettrisme). Jacques s’installe dans le logis du roi, se félicite de la modernité des cultures (safran, raves, carottes, fruits) et de l’élevage. Dix ans plus tard, tout est ruiné, on ne sait pourquoi. Le moulin à eau ne sera remplacé par les trois moulins à vent du Captivel qu’en 1567, les soldats occuperont souvent le site, Gardane ayant la malchance de pouvoir nourrir la cavalerie grâce à l’étendue de ses prés.
En 1512, Michel de Forbin, fils de Jacques, traite un échange avec Saint-Victor. Il donne Saint-Estève et obtient Saint-Pierre. Il est le type des seigneurs provençaux de ces temps. Il laboure des terres abandonnées pendant neuf ans, parfois il se loue et mène une vie rustique à la romaine. Son fils Esprit, atteint de la peste, se retire à Paillanet (orthographe marquant la francisation, après le rattachement à la France). Il sera enterré dans Saint-Valentin, auprès de son épouse.
En 1524, Honoré de Puget vient remettre les clefs de la ville d’Aix au connétable de Bourbon, chef des armées de Charles Quint, qui a installé son Quartier Général à Gardane.
En 1536, ce sont les troupes de François 1er qui pillent tout.
Jean Baptiste de Forbin, neveu d’Esprit, consul à Marseille et chef de l’infanterie de la Ligue, fait rehausser les remparts et fortifier les portes. Il prévoit bien : Son engagement papiste attire la vengeance des Protestants, qui saccagent les terres en 1574. Ce Jean-Baptiste inaugure l’habitude des Forbin de faire carrière à Marseille, d’avoir Gardane comme source de revenus et de repli en cas de danger (peste par exemple). En 1590, à Peynier une bataille oppose Ligueurs et Royaux. En 1592, Casaulx ayant pris le pouvoir à Marseille, le comte de Carcès et notre Jean-Baptiste de Forbin prennent position à Gardane avec 1400 arquebusiers et 400 cavaliers, mais ils échouent à la porte d’Aix et Carcès repart.
Antoine, fils de Jean-Baptiste, embrasse la carrière navale. Son frère Pierre écrit à propos de la contagion de la peste : « est mort à Gardane mestre Jean Decaste, sa femme, 4 de ses filles, un sien valet. Est morte une fille de Michel Caire, puis lui, sa servante et son beau-frère Louis Icard » (1629).
Pour faire la guerre aux Protestants, Forbin vend une partie de son domaine (Valabre) aux Thomas-Milhaud, à la condition de n’y point bâtir de village (1573). Ces derniers construisent un fortin à quatre tours (1575). Embelli en 1610, il sera dit improprement pavillon du roi René à partir de 1823. Puis ils élèvent un bâtiment (le château) destiné probablement à l’astronomie (1630). Ils le vendent à l’astronome Joseph de Gautier (1632). (Voir Valabre).
Avec leurs parents de Solliès, La Barben, St-Estève Janson et Oppède, les Forbin-Gardane constituent la plus puissante famille de Provence, la plus solidaire du roi. Gaspard de Forbin est lieutenant des galères, son frère Louis capitaine. Leur cadet Claude (1656-1733) est un grand aventurier, chef d’escadre, l’un des premiers à avoir franchi le cercle polaire, amiral du Siam, grand corsaire, ami de Jean Bart et de Dugay-Trouin. Il naît à Gardane et meurt dans son logis de St-Marcel. Dans ses mémoires (6) il raconte un événement survenu Grand Rue (Puget), lorsqu’il avait 10 ans : Un chien enragé qui effrayait tout le voisinage, vint sur moi la gueule écumante. Je l’attendis de pied ferme et, lui présentant d’abord mon chapeau, je le saisis par une jambe de derrière et je l’éventrai d’un coup de couteau en présence d’une foule de gens qui étaient venus pour me secourir.
Une autre famille attachée au roi a des parents à Gardane, les Bontemps (maison rue de la Charité). Jean-Baptiste Bontemps est chirurgien du duc de Vendôme puis de Louis XIII. Dans ses mémoires, Saint-Simon dit qu’après la mort de Vendôme il l’a « passé » au roi. Son fils Alexandre (1626-1701) est premier valet de chambre de Louis XIV, chargé du réveil, du coucher et de la chaise trouée. Il est Monsieur de la Flanelle, quatrième valet, intelligent, réfléchi, parfois seul avec le roi. On a avancé à tort qu’il était le confident du roi. Le roi ne m’a jamais dit du mal de personne, et il n’y eut jamais un jour qu’il ne me dit du bien de quelqu’un. Son fils Louis sera valet de Louis XIV, du Régent, puis de Louis XV.
Depuis Richelieu et Mazarin, les luttes religieuses se sont transformées en Provence en luttes communales. Gardane, tardivement, n’y échappe pas. En 1666, les habitants envoient à Versailles leurs représentants porter la lettre suivante au roi : Il y a deux ou trois mois, par violence et voies de fait des seigneurs contre les habitants, leur démolissant leurs viviers, écluses, fosses, les privant des eaux pour l’arrosage de leurs terres, de laquelle ils avaient joui de tout temps, les réduisant à quitter leurs maisons… Le roi leur fait verser 30 000 livres avant de rendre justice. Il rattache la commune de Gardane à la couronne. De Forbin et de Gautier perdent leurs droits, mais doivent être dédommagés de 134.492 livres par les Gardanais (1669). Louis XIV a tout intérêt à cette affaire, car de 1628 à 1660, la Provence a été en rébellion contre lui. Posséder un domaine entre Marseille et Aix est une aubaine. Cela n’empêche pas le roi de demander des cadeaux à Gardane, et pendant longtemps. Les lettres du blason sont remplacées par trois lys. La commune ne pouvant rembourser sa dette, Claude de Forbin ravage la campagne et entrave l’administration. Son ami le roi laisse faire.
Un instituteur communal apparaît (il y en aura désormais toujours un). Le ci-devant seigneur de Gardanne (nouvelle orthographe) Jacques d’Arbaud épouse Marguerite Maurel du Chaffaut, propriétaire de Jouques (1674). C’est le départ des d’Arbaud-Jouques, grande famille provençale avec hôtel sur le cours Mirabeau.
Le 11 décembre 1696, en la chapelle Saint-Baudile, Isabeau de Révilhasc, héritière de la seigneurie de Mimet, 15 ans, épouse Honoré de Piolenc, 22 ans. Témoins ses oncles Jean d’Estienne-Chaussegros et Jean-Baptiste Ricard. Ces gens habitent Château-bas. A côté, au vallon de Camp Jusiou, on creuse des descenderies.
Des trois ordres de la société du Moyen Age (à Gardana : St-Victor, les chevaliers, les paysans), il en reste deux : Riches et pauvres. En 1683, Pierre Gueidan, riche éleveur de Raillane, achète le domaine de Valabre à de Gautier, avec bastide et château. En 1700, Joseph de François fonde l’hôpital de la Charité (maison Bontemps). Signe des temps, les terres perdent le nom d’un saint pour prendre celui d’un propriétaire (Rambert, Roman, Milhaud, Galimbert, Verdillon, Veline, Mistral, Malespine, Moutet). La société des notables terriens aura son apogée vers 1750. Plus « déchristianisés » que les nobles et les paysans, ces notables adhèrent à des confréries (il en existe 4 à Gardanne, dont celle des Pénitents Blancs).
5. XVIIIe-XXe siècles
5.1. La stabilité (1700-1850) : (lire Gardanne et la Révolution)
Avec 230 maisons et environ 1200 habitants, Gardane est un village provençal : Habitat groupé, perché, où propriétaires et manouvriers vivent côte à côte. Economie du blé /mouton /olivier /vigne /transformations en cuir, soie, terres cuites, toiles, tissus. S’ajoutent des terres à l’arrosage, aux Prés, aux Molx, à la Canau et sur les futurs boulevards (foins, carottes, raves). Les rues sont étroites, les maisons sans remise, le fumier (âne, cochon, habitants) tassé devant la porte, les eaux usées jetées par les fenêtres. On retrouve même le fumier d’Aix et de Marseille, car les mulets qui portent le foin et les légumes reviennent avec cet engrais.
En 1720, la grande peste épargne Gardane, prodige que l’on attribue à saint Roch. On lui élève une chapelle chemin de Trets (angle rue Sainte-Victoire / avenue de Nice).
La Commune ne parvient pas à payer sa dette seigneuriale et doit céder des terres.
Le Gardanais est libre, mais pauvre et arriéré (âne, bêche). Agriculteur, il exerce souvent une activité d’appoint, chez un notable ou sur un filon de lignite… Il mange ce qu’il produit et parle un provençal stabilisé. Les notables commencent à s’intéresser à la vie municipale, aux traditions, au folklore, aux contes, au passé. Les moines ont disparu.
En la chapelle San Sébastian, Maître Joseph Bonneau de Mérindol, avocat à la cour, fils de François et Claire de Fauris, épouse Gabrielle d’Albertas, fille de Léon d’Albertas. Les témoins sont Jacques Solheillet notaire royal et François de Malespine. Nous sommes en 1701. Esprit de Malespine et Jean Baptiste Bernard sont consuls, Jacques Rossignol notaire royal, Guillaume Bourgal notaire, maître Joseph Car lieutenant. Jean Laurent Moutonier est docteur en médecine, Pierre de François est avocat à la cour, Jean Car secrétaire du roi, Louis Marin viguier. La chapelle Saint-Valentin est affectée aux Pénitents Blancs. Pierre Viou, Joseph Rouvier, Barthélemy Vaussan, Louis Clastrier, Christophe Savine, Denis Barthélemy, Pierre Rouvier, Mathieu Capus, Louis Gras, Louis Bernard, Paul Nicolas, Jacques Car, François Deleuil, Joseph Bourrelly, Pierre Montanard, Antoine Pélissier, Joseph Courdurier, Henry Bourrelly, Jacques Avon, Christophe Gabriel, le notaire Henri Bonneau, et Jean Joseph Baret sont aux Pénitents Blancs (1765). Ce sont des notables. Louis Car, Joseph Car, Joseph Clastrier sont à la Confrérie du Rosaire (ce sont des gens aisés, mais moins riches).
Le pape critique ces confréries, qu’il ne contrôle pas. Les idées des Lumières progressent.
Les élites bourgeoises vont trouver désuètes les confréries de pénitents et se feront franc-maçonnes ou opposantes. Gabriel Remusat, Joseph Marin, Paul Pélissier, Martin Bourrelly, Pierre Viou, Laurent et Joseph Amalbert, Louis Deleuil, Valentin Liency, Pancrace Augier,Honoré Gras, Antoine Ethin, Jean-François Lion, Laurent Depousier, Antoine Courdurier, François Amic, Paul Laurin et Antoine Vaussan applaudiront leur député Mirabeau.Est mort un pauvre mendiant du lieu de Flayosc. Son camarade était mort avant lui (1733) Mort et enterré un pauvre mendiant inconnu (1736). Un pauvre passant d’environ 40 ans a été trouvé mort (1746). Une pauvre femme mendiante inconnue est trouvée morte (1755) Ensevelie une pauvre mendiante (1756). Enterré un enfant inconnu, d’environ 12 ans, trouvé mort sur le chemin de Notre Dame des Anges (1761).En 1764, Joseph de Gueidan, fils de Gaspard des comtes de Forcalquier, chevalier, marquis, conseiller du roi et de dame Angélique de Simiane, épouse Marie Hélène de Clapiers, fille d’Esprit de Clapiers, chevalier, et de feue Jeanne des Gatières, du lieu de la Martinique. Le témoin est François Moutonier, notaire royal.Gaspard était homme de loi, et seulement noble de robe. Pour l’être d’épée, il inventa un fief noble imaginaire (Gueidan), des ancêtres (comtes de Forcalquier), un titre (marquis), et écrivit des faux. Il devint la risée d’Aix, mais, en recevant une belle somme d’argent, Louis XV décida de lui envoyer ses lettres de noblesse.La Révolution : voir Gardanne 1789. Elle se déroule ici pacifiquement.En septembre 1792, les actes datés An I de la République sont signés Paul Laurin.La Révolution bouscule quelques noms de rues et offre un rôle aux notables modernes, fraîchement issus des notables traditionalistes, qui étaient plus terriens et plus cléricaux.Paul Laurin (1763-1820) 2, rue Kruger, est aubergiste au 4-6, place Gambetta, où convergent les chemins d’Aix, de Marseille et de Trets. Un bassin permet de faire boire les mulets des caravanes. Paul Baret (1773-1837) 2, rue Font du roi, est gros propriétaire. Son fils Auguste sera maire en 1840-47, son petit-fils Félix sera maire de Marseille. Joseph Marin (1778-1854) 16, rue Borély, possède 11 maisons. Antoine Vaussan (1749-1833) a une bastide dans les prés (1, rue Jules Ferry), une autre aux Molx, une autre à la Palun. Il aurait déclaré en 1792 dans l’église Sainte-Marie « Demain, il faudra être citoyen ». Les frères Amalbert possèdent 10 maisons, dont les 31 à 45, rue Jean Jaurès. Paul est tailleur, Pierre et Joseph rentiers. Gabriel tient le débit de tabac au 30, faubourg de Gueidan.L’ex-président du Parlement d’Aix, d’Arbaud-Jouques, ci-devant seigneur de Gardanne, fuit à Lyon avec son beau-frère Palamède de Forbin parce qu’il se sent haï par les révolutionnaires aixois. Ils tombent sur le terroriste Fouché, qui les fait guillotiner. Arrive l’Empire. Fouché prend de l’importance. Auguste, fils de ce Palamède, grand bonapartiste, reçoit à Aix Pauline Borghese, le duc d’Otrante, tout le gotha de l’époque, dont Fouché. Il flatte celui qui a guillotiné son père : C’est un homme riche, honnête et valeureux, déclare-t-il. ← Plan dit de 1789. A = L’Enclose, B = Chapelle Saint Sébastien, désaffectée C = Portalet ; D = Font du roi E = Font dei pésé ; F = Quartier du lièvre ; G = Clocher H = Maison de la dîme.En 1809, la population est de 1615 personnes. Cette année-là, Marie Françoise Adélaïde de Forbin-Gardanne, 30, boulevard Forbin, fille de Palamède et d’Adélaïde de Félix de Gresset la Ferratière, veuve de Joseph François de Marsilly, épouse à 46 ans Jean Baptiste Millière, 23 ans, militaire. Elle sera la dernière des Forbin-Gardane.L’Empire trouve en Joseph Bourgal, maire de 1805 à 1814, un fidèle serviteur.La culture du melon devient intense, et non plus marginale.Les guerres napoléoniennes ont leur cortège de morts : Antoine Courdurier fusilier, mort à l’hôpital de Rennung à Vienne) (1809), Jean-Joseph Blanc, fusillier, mort à la bataille d’Essling (1809), Joseph-Pascal Feltin, Jean-Joseph Samat, grenadier, mort à la bataille de Wagram le 6 juillet 1809, Joseph Pelenc, fusilier, décédé à l’hôpital de Spitelberg à vienne, le 20 août 1809, suite à une gangrène à la cuisse par suite d’un coup de feu, Jean-Joseph Marin en 1809, Jean Louis Raynaud, voltigeur, mort à l’hôpital de Léopoldstaat en 1809, Vincent Troin, fusilier, mort de fièvres à l’hôpital de Toulon le 27 juillet 1811, Pierre Bonnicard, caporal, 1786-1811, mort de fièvres rhumatismales (tétanos) à l’hôpital de Groningue, Jean-Baptiste Deleuil 1790-1811, caporal, mort à l’hôpital de Perpignan, Joseph Marin 1788-1811, dragon, mort à l’hôpital de Breda, suite à un combat singulier, François Signoret, fusilier, mort à l’hôpital de Florence (1812), Antoine Courdurier, fils d’André, qui meurt d’un coup de feu à la bataille de Victoria (21/06/1813), Honoré Rémusat, 18 ans, mort à l’hôpital de Verdun (1813), Lazare Bourrelly, 20 ans, mort à La Havane (1813), Jean-Louis Reynaud, Joseph Liency, Martin Finaud (1814) etc. En 1814, Pierre Joseph Deleuil, surnommé Paton, est rappelé. En 1815, il est absent à la naissance de son fils. Dix ans plus tard, lors du mariage de sa fille, il est toujours absent. Il ne reparaîtra jamais. Au Recensement de 1834, Gardanne compte 2823 habitants, dont 2112 en ville, 586 dans les fermes isolées et 125 en hameaux (Valabre, St Estève, Notre-Dame, Jean de Bouc, Saint-André). Les principaux propriétaires ne sont pas Gardannais. Voyons-les dans l’ordre.Le marquis Louis Alphonse de Gueidan (1783-1853), petit-fils du mythomane Gaspard. Il épouse en 1823 la roturière Françoise Joséphine Sibilot. Il possède Valabre, Milhaud, Rambert et Gabrielly, des terres à Roman et à la Crémade.Joseph Toussaint Borély (1788-1875), grand juriste, mais républicain et franc-maçon sous la Restauration, possède maison, terrasse et pigeonnier où se trouve l’actuelle mairie, plus le domaine entre rue Borély, rue Reynaud et ruisseau Saint-Pierre, avec bassin d’irrigation. Il a aussi les maisons n° 21, rue Borély, n° 9, Cours, plus le domaine au quartier de la Poucelle, où il érigera une porcherie et une grande exploitation qu’il baptisera New Powrcelles (1853).Gérard Rémy (1776-1850), de Cotignac, chevalier de l’éperon d’or, percepteur, possède un moulin sur le Captivel (celui qui a été restauré), le moulin à eau et les terres du quartier Mistral, des labours à Cauvet.Félix Hermitte, (1757-1840) de Montelar (Alpes de Hte Provence) a le vallat de Rambert. Sa fille Félicie épouse Joseph Barrême (1822-1893.) Antoine Mallet, de Marseille, possède Camp Jusiou, Verdillon. François de Bausset, de Marseille, royaliste convaincu, fils de l’ambassadeur de France en Russie, a vendu à Borély et à Mallet. Les notables ont traversé les intempéries. La Révolution les a mis en avant. A ceux déjà cités, on peut ajouter Joseph Avon à la Crémade-Les Moulières, Joseph Courdurier, dit Rabot, Joseph Maurel dit Paysan, Joseph Gabriel, charron (28, cours Forbin), Nicolas Deleuil, maçon qui va construire l’hôpital rue de François et de nombreuses maisons du boulevard, Jean Baptiste Girard, futur maire, officier de santé, fils du maréchal-ferrant Basile Girard, Paul Escoffier, dit Mouré, Jean-Baptiste Caillol, dit Jouilaud, Joseph Gras, dit Grasset, à la Planque (24 rue Jules Ferry), Antoine Viou, impasse Roux, David Bédarride à Font Venelle, qui part à Aix et dont le fils et le petit-fils seront maires d’Aix (d’où le S au nom de la rue).La vieille ville est inadaptée. L’étroitesse des rues interdit la charrette, les maisons sont sans remise. On porte à dos d’âne, on stocke en cave. L’hospice est une simple maison, le cimetière, situé entre la rue Pasteur et le Castrum, possède peu de caveaux personnels. La fosse commune reçoit presque tous les Gardannais.La sécurité s’étant quelque peu améliorée, certains vivent dans des bastides, comme Jean-Joseph Bouteillon (1, rue Franklin), Pierre Césilly (10, avenue de Toulon) ou Jean-Joseph Vespier (rue Jules Ferry, les Ombrages). Les fermes isolées sont récentes. François Poussel est au petit chemin d’Aix, Antoine Chabert à Mazargues, Placide Deleuil au chemin Estrec, Honoré Nouveau à Souspire, Antoine Deleuil aux Clapiers, Pierre Marin à la ferme Pater aux Prés, Joseph Pélissier à Saint-Michel, Pierre Deleuil dit Méiou à Verdillon (Biver), Paul Liency à l’Oratoire de Bouc, François Troin à la Collevieille, Etienne Avon à la Crémade.← Imagerie populaire des métiers masculins (XIXe siècle) Bastié (bourrelier), tonnelier, charron, relieur, cordelier, fournier, savetier, vannier. Les hameaux sont dominés par une famille, telle Baudoin à Payannet, Derrissard à Saint-André, Michel à Chabanu, Reynaud et Gautier à la Rabassière, Julien à Jean de Bouc.Les cabanons sont innombrables. Les aires privées se multiplient, car le foulage ne se fait plus au rodo (piétinement par les mules), mais à la pierre à caouque (à fouler) taillée par les frères Marin dans leur carrière de Bouc. Les moulins à vent sont encore en état. Ils sont un recours en cas de pénurie d’eau pour les moulins à eau. Les canaux d’irrigation sont bien entretenus, car Gardanne tire sa richesse de l’eau, par les foins, les betteraves, les carottes, bientôt les pommes de terre. Depuis le Moyen Age, la cavalerie est souvent venue mettre ses chevaux dans les prés et ses soldats sous un toit, car on réquisitionne maisons et remises. En ce moment, le général Bourmont rassemble son armée pour aller conquérir l’Algérie. Cinq Gardannais au moins y mourront, en combat ou de maladie : Honoré Montanard (1814-1839), Pierre Pinatel (en 1840), Augustin Poussel (1816-1840), Marius Deleuil (1839-1861), Louis Marin, cavalier aux chasseurs d’Afrique (1871-1895). L’activité industrielle est présente mais peu influente. Des chemins des mines mènent dans le vallat de Camp Jusiou. Pour avoir du combustible, l’époque surexploite les forêts et développe l’extraction du lignite. En 1845, le bassin Fuveau / Gréasque / Gardanne emploie 1000 ouvriers, dont beaucoup sont des paysans exerçant un métier d’appoint. La tuilerie de Jean Baptiste Troin, aux Moulières, commence à s’étendre vers Milhaud.La commune est sur une grande carraire, celle de la Crau-Martigues-les Pennes-Simiane- les Angles, la Planque, rue Borély, Notre-Dame, Fuveau-Peynier-Trets-Pourrières-Vinon.← Depuis 1776, Gardanne a un clocher, à la grande satisfaction des habitants. En 1850, les techniques agricoles n’ont pas évolué. Le village est serré, son système administratif basé sur le local et le paternalisme. On parle sur la place, devant le puits, près du four, à la veillée, on s’enthousiasme pour les fêtes patronales. La structure sociale est archaïque. Un propriétaire a plusieurs maisons, une bastide, un domaine, et peut vivre sans travailler. Il est au Conseil de commune. La noblesse résiste bien (Gueidan, de Bausset). Les notaires, les hommes de lois et les négociants sont au haut du pavé. Un ménager est un propriétaire moyen : Une maison et deux hectares répartis en plusieurs morceaux, la sagesse ancestrale voulant qu’il ait un labour, une vigne, un pré, un bois, une maison dans le village, un âne, un cochon, une chèvre, quelques poules et deux lapins, quelques outils et des paniers. Il peut nourrir sa famille par ses terres. Un travailleur, dit aussi paysan, ne possède presque rien. Il est manouvrier, il bêche toute la journée et s’extasie aux fêtes. L’affaire du moment est l’ouverture du chemin de grande communication, le futur Cours. Cela condamne de bonnes terres, mais offre à la population un lieu de promenade et de défilés pour les jours de fêtes et les processions, tout en améliorant les axes Marseille-Trets et Roquevaire-Aix. Jean Baptiste Girard (1804-1885) officier de santé, maire de 1830 à 1839, Auguste Baret (1804-1886) maire de Gardanne de 1840 à 1847, et Toussaint Borély, juriste versé dans les idées nouvelles sur l’état sanitaire, l’agriculture et l’élevage, y jouent un rôle important (Boulevards et Cours sont la base structurelle du Gardanne d’aujourd’hui).5.2. L’évolution (1850-1914) : ← Paul Cézanne, Gardanne vu de la Planque, 1886, Fondation Barnes, Merion. Les boulevards se devinent aux platanes, Gardanne est encore un bourg agricole. Au milieu du XIXe siècle, le mode de vie est toujours celui du siècle précédent : Veillées, fêtes, bravades, jeux publics, autorité du père (patriarcat à la romaine). Les facteurs d’un lent changement se mettent en place : Extraordinaire essor du port de Marseille (modification de l’espace économique et culturel de Gardanne), enseignement plus développé, politisation des notables (création des cercles), creusement du perça (1869), arrivée du chemin de fer (1877), chute du court des terres, multiplication des petits propriétaires, développement des cultures (fourrages, pomme de terre, tabac, mûrier), chaulage, apparition de la charrue Dombasle, de la herse, utilisation du cheval, moissonneuse-lieuse, utilisation des tourteaux de Marseille comme engrais, création de l’Ecole d’agriculture de Valabre (1884). Les bancaou (terrasses) commencent à être délaissées.Les sociétés agricoles répandent le savoir, introduisent les techniques, encouragent les expériences. Toussaint Borély, ancien procureur général, joue un rôle majeur. Il lance le contournement, crée une porcherie exemplaire, introduit et diffuse une race de cochons plus favorables (York), installe des vergers, encourage la participation aux comices agricoles. En 1841, il vend sa maison, qui devient hôtel de ville, école, logement, réception du télégraphe.La mode est maintenant à la chasse, aux conscrits, à la mise en place de fontaines et de lavoirs, aux sociétés musicales, à la promenade dominicale le long du ruisseau des Molx. S’ouvrent des boulangeries, des épiceries, les premières boucheries. On consomme en effet de la viande, du café, du chocolat, des pâtes. La pratique religieuse s’épuise très nettement chez les hommes, moins chez les femmes.Cette évolution générale est effrayante aux yeux de certains. « Dans le domaine culturel, les conservateurs développèrent avec le Félibrige, à partir de 1854, une réaction traditionaliste contre la modernisation trop rapide de la Provence » (8). Gardanne reste en marge de ce mouvement, qui a sa force dans la Provence blanche (royaliste) arlésienne, et à un degré moindre, aixoise. La raison en est que Gardanne est le théâtre d’une évolution d’une autre nature, plus brutale, plus irréversible : L’industrialisation.En 1800, on extrait du territoire de Gardanne 12 000 t/an de lignite avec 100 ouvriers. En 1900, on extrait 625 000 t/an avec 2826 ouvriers. La Félicie 1 date de 1867, Biver 1 de 1892, Biver 2 de 1909, Boyer et Coureau (Meyreuil) 1921, Gérard 1841, Yvon Morandat 1989. Les Charbonnages offrent une paie (changement radical de mentalité par rapport au travail vivrier), amènent un afflux d’étrangers (Italiens surtout, apparus au moment de la Félicie), obtiennent le chemin de fer (la ligne Marseille-Aix ne serait pas passé par Gardanne sans le charbon), favorisent l’implantation de l’usine d’alumine (1893). Usine et Charbonnages répondent au besoin de logements (cités Mistral, Bon Pertuis, Biver). Péchiney promulgue des avancées (colonies de vacances, piscine), sans que leurs cadres ne s’engagent dans la vie publique. Le procédé aujourd’hui mondialement exploité pour produire l’alumine a été mis au point à Gardanne, d’après l’invention du chimiste autrichien Karl Bayer, entre 1893 et 1899.← Gardanne a une école communale depuis 1673. Les locaux de la mairie étant exigus, la grande maison au 18, rue Borély est aussi une école. Par exemple, le futur huissier Achille Convert y fait ses classes. Après 1841, l’achat de la maison Borély résout le problème des locaux « école + poste ». Evocation du XIXe siècle : Les épidémies. Jean Baptiste Deleuil (1810-1897) instituteur communal, secrétaire de mairie, plus tard proposé au télégraphe électrique. Il se marie à Anastasie Fouque, dont il a 4 filles. Le choléra fait au moins 40 morts en 1831, d’autres ensuite. Jean-Baptiste perd trois filles, puis son épouse (1848). Il se remarie à Thérèse Deleuil, perd alors sa quatrième fille (13 ans) puis un fils de 7 ans qu’il a eu de Thérèse (1868). Il finit sa vie seul.Les distractions. Jean Baptiste Vaussan, fils du tisseur à toiles Jean Baptiste Vaussan et neveu du maire Jean Baptiste Girard, naît en 1837. Il est professeur de musique, fondateur de l’Harmonie, chef d’orchestre le dimanche, au kiosque, en haut du cours de la République.
![]() Décrivez votre image |
---|
Gardanne 1789
Suivi de :
Un lieu chargé d’histoire,
La place Ferrer
Gardanne 1789
Son lot de violences et de disputes, Gardanne l’a vécu pendant un siècle (1680-1780, années rondes). La commune est tombée sous administration royale. La négligence et l’hostilité des forains (propriétaires ne résidant pas, les de Gueidan, d’Arbaud-Jouques, de Forbin, Bailly, Jaubert, Coulet, Gautier, Clermont, Aubert) ont entravé le Conseil communal, ont favorisé la mésentente et l’impuissance des élites gardannaises (1). Bien que les choses se soient apaisées après 1778, on était en droit de douter de la capacité de Gardanne à mettre en œuvre les réformes pratiques et morales de la Révolution. Elle y réussit mieux qu’ailleurs.
-
Etat des lieux : Gardanne en 1788.
-
La structure sociale :* = notice sur le personnage en fin de texte
N.. = n° de cadastre dans le plan napoléonien
Gardanne est un bourg agricole et industriel d’environ 1750 habitants. Le village compte 1400 âmes, la campagne 350, dont 200 en hameaux (recensements de 1765 et 1791). Ceci représente environ 350 familles, logées dans les 200 maisons du village, les 30 maisons de hameaux et les 20 « bastides ».
Trois industries occupent une douzaine de familles :
-
La tuilerie Paul Jaubert aux Moulières, où travaillent une vingtaine de personnes,
-
Le tissage des toiles (sacs, bourras, draps, indiennes et voiles) de la rue droite (N 532, 17, rue Puget, une famille Vaussan) et des bourgades (N 295, 45, faubourg de Gueidan, une famille Michel et N 361 et 351, 31, rue Kruger, la famille Pisset),
-
L’exploitation du charbon dans les descenderies du quartier de Camp Jusiou, organisée par le vicaire Vitalis. Les sont une centaine, mais restent des paysans qui vont à temps partiel au charbon.
Le village possède 4 fours. Le communal, au dos de l’hôtel de ville (place Ferrer) est attribué aux enchères et tenu par une famille Vaussan. Le four de la Pousterle (N 161, 16, rue Pasteur) est celui de Joseph Baret*. Rue de l’église (N 131) exerce la famille Giraud. Au faubourg de Trets, contre N 36 (2, rue Ledru-Rollin), un four mené par une famille Blanc.
L’artisanat nourrit une centaine de familles. Tous les corps de métiers nécessaires sont présents : Maréchal ferrant, charron, serrurier, meunier, fournier, menuisier, aubergiste, cordonnier, savetier, bastié (bourrelier), auffié (fabricant de cordes), fouganié (marmiton), fourgonié (cocher), tonnelier, bousquetié (scieur de long), tailleur d’habits, tailleur de pierres, perruquié (coiffeur), charretier (transporteur à dos de mulets), maçon, notaire, instituteur communal, sœurs de l’hôpital, sages-femmes (Brigitte Raynaud et Catherine Etienne).
Le gros de la population vit directement de l’agriculture (200 familles), mais selon une grande disparité de richesse.
En se fondant sur la propriété foncière en 1791, on peut distinguer six niveaux sociaux.
1. Le niveau des riches, taxés > 1000 livres se limite à 3 personnes : La marquise de Gueidan (Henriette de Félix d’Ollières, veuve), Jacques Bourrelly*, et Adélaïde de Forbin. Ces personnes ont le droit de vote double, l’éligibilité, et sont au Conseil de Commune.
2. Le niveau des propriétaires, taxé 500 à 1000 livres, 7 personnes, dont les Oratoriens (Verdillon, Camp Jusiou) et l’hôpital de la Charité. Elles ont droit de vote et sont au Conseil de Commune. On y rencontre les rentiers de la terre et ceux qui bénéficient d’un travail rémunérateur : Les gros négociants (des courtiers-expéditeurs), dont Antoine Vaussan*.
3. Le niveau bourgeois, taxé 200 à 500 livres, soit 62 personnes, qui ont droit de vote. On y trouve des rentiers, des notables (profession valorisante), des négociants, et 4 des ménagers les plus riches (ménager = cultivateur travaillant ses propres terres et habitant sa maison). La plupart ont adhéré à la confrérie des Pénitents blancs et ont soutenu le parti du notaire public François Moutonier* 1711-1795, souvent au pouvoir avant 1778.
4. Le niveau ménager, taxé 100 à 200 livres, 140 personnes allant du propriétaire moyen à des artisans et à de petits possédants, qui ont lutté avec Louis Car* 1730-1806 pour changer les règles d’appartenant au Conseil et qui ont eu gain de cause il y a 10 ans. La plupart était dans des confréries (il en existait quatre), en particulier au Rosaire, avec Louis Car. Ceux qui sont maraîchers s’enrichissent et trouvent leurs moyens mal représentés par rapport au niveau bourgeois, qui est conservateur en agriculture (blé, vigne, mouton).
5. Le niveau modeste, taxé < 100 livres, dont plus de la moitié < 50 livres, 336 personnes pauvres, qui n’ont aucune représentation. Ce sont les petits ménagers, les petits artisans, les métayers et surtout les travailleurs (personnes ne vivant qu’en louant leurs bras, bêchant, moissonnant, vendangeant, coupant le bois, etc.).
6. Les pauvres, sans aucun foncier. Ce sont des mendiants et des travailleurs malchanceux, environ 50 personnes. Un pauvre de l’époque est très pauvre.
Sur ~ 1250 adultes, les femmes (52 %) n’ont pas le droit de vote, 290 hommes (22 %) sont trop pauvres pour être électeurs, 134 hommes (11 %) peuvent voter et 27 (2 %) peuvent être membres du Conseil. On trouve donc toujours les mêmes aux commandes.
Depuis une dizaine d’années, c’est le parti ménager de Louis Car qui s’est emparé des bonnes places (consul, greffier, viguier, trésorier, capitaine), avec Louis Car, François Pontier*, Sauveur Deleuil* et Roch Deleuil. Le parti bourgeois de François Moutonier est présent et même coopératif, les luttes du passé ayant prouvé à tous leur nocivité. Leur pouvoir est cependant limité. Gardanne, ville royale, est contrôlée par l’intendant royal, dont le seul but est de faire rentrer l’impôt. La ville vit de subsistances, sans développement.
Outre les lignes de fracture de l’impôt foncier et du clivage entre bourgeois et ménager, les « vrais Gardannais » dénoncent les Forains, qui résident à Marseille ou à Aix, et qui ne s’occupent que de leurs revenus. Ils tiennent en une vingtaine de personnes, mais parmi les plus puissantes. La population ne les aime pas. Ils se montreront discrets, après avoir été agressifs dans les années 1768-1777.
Les bourgeois aspirent à plus de pouvoir à Aix, au détriment des nobles. Les ménagers, négociants et artisans, revendiquent plus de pouvoir à Gardanne, au détriment des bourgeois.
Ceux qui ont peu à manger (les niveaux 4 et 5) ne demandent qu’à ne pas mourir de faim.
L’instruction joue un rôle. Plus de 50 % des Gardannais savent signer, mais combien ont accès aux idées des Encyclopédistes ? Une poignée ! D’où l’importance du greffier, du chirurgien (rédacteur des comptes rendus des incidents), des officiers publics, des négociants, qui lisent, qui se déplacent, qui entendent les discussions à Marseille ou Aix. Pour l’immense majorité, l’incompréhension de ce qui se passera à Paris, Aix et Marseille, sera naturelle.
La vieille civilisation communautaire organise la charité, l’assistance, la sociabilité, par des comportements de voisinage, nous dirons par l’esprit de clocher. Elle est incapable de s’ouvrir à une autre mentalité, aux idées généralistes, à l’adhésion nationale, à la générosité abstraite, à l’esprit citoyen. Bon courage aux quelques uns qui crieront « Vive la Patrie ! »
Ces clivages passent à travers les niveaux, les familles, les clans.
Rien n’est prévisible devant les évènements à venir. La Révolution locale se fera par l’entrain de quelques personnes, par l’improvisation plutôt que par la construction, par le franchissement d’un clivage (souvent pour un aller-retour).
Des facteurs d’homogénéité soudent le village.
En premier lieu, son catholicisme, son grand respect pour le curé Antoine Andravy*, homme droit, défenseur des pauvres. Les niveaux 5 et 6 sont particulièrement attachés aux actes sacerdotaux et aux cérémonies, alors que les niveaux 3 et 4 voient plutôt l’Eglise comme le préleveur de la dîme. Le niveau 2 pointe du doigt la complicité Noblesse / Clergé et suivra plus volontiers les idées de 92. Il achètera sans hésitation les biens des émigrés et de l’Eglise.
En second lieu, la lassitude envers les conflits. Gardanne s’administre théoriquement depuis plus de 100 ans, mais l’obstruction des Nobles (de Forbin, de Gautier, de Gueidan, d’Arbaud-Jouques) a fait perdre 40 ans. Ensuite, les luttes entre bourgeois et ménagers ont tout paralysé jusqu’en 1778. Ses forces vives gaspillées, le village est demeuré dans un état lamentable. L’égoïsme de classe et le clientélisme ont enrichi les plus indélicats. Il y a 10 ans, le chef du parti bourgeois, le notaire François Moutonier, a cédé la place à son gendre, Jacques Bourrelly. Le chef du parti ménager, Louis Car, est devenu notaire et s’est apaisé. Tous ont compris que la coexistence prévalait sur la désignation autoritaire du premier Consul par l’intendant royal, comme cela arrivait au temps des affrontements.
Les villages voisins, Trets, Fuveau, Bouc, etc., s’administrent, et plutôt bien, depuis longtemps. Les règlements de comptes y seront internes. Gardanne, trois lys à son écu et intendant royal à Aix, nourrit le sentiment d’avoir des ennuis externes (forains et intendant).
1.2 Présentation physique du village :
C’est la vieille ville d’aujourd’hui. A l’époque, les rues sont les mêmes, mais encombrées de fumiers et d’immondices. Ce sont des calades (empierrées pour éviter le ravinement). Les noms n’ont rien d’officiel. Le préposé aux actes Pierre Car* note le lieu où habitent les témoins de mariage, mais de façon imprécise pour nous (« quartier Saint-Roch »). Manquent les registres des années 1788-89-90-91, c’est-à-dire LA source. Mais par recoupements et en s’appuyant sur le plan cadastral napoléonien (réalisé entre 1806 et 1834), on peut avancer des correspondances, même si les découpages diffèrent quelquefois :
NOM en 1789 Nom en 1799 NOM en 2012
Rue droite (!) Rue Ventôse Rue Puget
Quartier de la Pousterle Rue Pasteur
Grande bourgade Faubourg Antoine Faubourg de Gueidan
Petite bourgade + quartier du Lièvre Rue Kruger + place Gambetta
Rue de la Chapelle de la ci-devant chapelle en 94 Rue Courbet + rue de l’Accord sud
Rue de l’église de la ci-devant église en 94 Rue de la paroisse
Rue du Fort Rue du Fort Rue du Fort
Rue montant à l’église Rue Suffren
Rue de Non Passe Rue Fraternité Rue Viala
Quartier du Portalet Passage Bara
Rue de Cavillon Rue Brutus, rue Bonaparte, rue de l’hôpital Rue de l’Accord nord
Rue des Fabres Rue des Fabres Place de la mairie
Rue de l’Ancien hôpital Rue Bel air
Faubourg Saint-Roch La Bonne Personne Rues Ledru-Rollin et Parmentier
Rue neuve Rue d’Aix
Rue Contendalle Rue Mirabeau
Rue Cassarat Rue Egalité Rue Cadenel
Faubourg Saint-Sébastien Place de la République Bas de la rue Borély
Place de l’Hôtel de ville Place de la Liberté Place Ferrer
Quartier Saint Michel + le Pontet Rue des Phocéens Rue Jean Jaurès
La campagne offre des noms millénaires : Cativau, Ribas, Crau, Planque, Veline, Saint Baudile, Abis, Valabre, Crémade, Cousta, Fonvenelle, Payannet (qui comprend Chabanu), Rambert, Roman, Marion, Pesquier, les Angles, Colle vieille, les Molx, Bon pertuis, la Plaine Saint-Michel, Rabassière, Malespine, quartier Saint-Pierre (Notre Dame), Galimbert (chemin du Claou), Chemin Estrec, Font de Garach, la Palun (y compris Jean de Bouc), la Gardy, Verdillon, Camp Jusiou, les Prés, le Pradet (Saint-André).
Biver n’a que 2 fermes, indiquées par Quartier des Mooù (Molx).
Cativau est la francisation du provençal Cativéou, et donnera Cativel et Cativeaux.
← Plan vers 1800. D’après (1).
Les maisons ont la même disposition qu’aujourd’hui. Elles ont une génoise et un toit en tuile canal. Elles ne sont pas crépies.
L’entrée est surélevée de 2 marches, pour se démarquer de la souillure de la chaussée. La déclivité du terrain exige d’ancrer les maisons sur le roc, avec un étage rue haute et deux étages rue basse. Mille secousses de la mine d’effondreront aucune maison.
La copropriété est fréquente. L’un possède telle chambre, l’autre tel étage, le troisième la moitié de la cave. Simplifions en observant les maisons modernes des bourgades, construites en terrain plat et pour l’activité agricole dynamique (ménagers et négociants).
Leur largeur est médiocre, car la région ne possède pas de bonnes poutres. On récupère par la hauteur et la profondeur. Trois ou quatre niveaux. Génoise et tuile canal.
Le rez-de-chaussée est la « remise », lieu d’habitation de l’âne, de la chèvre, du cochon, des poules et des lapins, lieu de la tine à faire le vin, d’un puits éventuel, des outils, tonneaux, paniers et bourras, sol en terre battue.
Le premier étage est atteint par un escalier arrivant mi-profondeur, sol en tomettes d’Aubagne. Ouvrant sur le chemin (on dit devant), la cuisine, qui est aussi la salle à manger, le lieu de réunion et de vie, car la cheminée est là, avec sa chaleur. La tournure prise par la Révolution à Gardanne doit beaucoup aux discussions qui se tenaient devant le feu, les moins pauvres recevant les amis moins fortunés et brulant du charbon. C’est la pièce de la pile, évier accompagné de la cruche, soulagé par la bonde qui évacue directement sur la rue.
Derrière, la chambre, où dorment petits et grands, sans chauffage autre que la chaleur humaine, une armoire ou des étagères, parfois un coffre, souvent des pots de chambre. Au milieu, réduite à cause de l’escalier, la pièce sourne (obscure). Elle peut servir de débarras avec tinette, de toilettage à l’aide d’une bassine (plus souvent dans la cuisine, qui est à la lumière) ou de chambre à coucher. L’éclairage se fait à la lampe à huile chez les pauvres (huile d’olive et graisse de porc), au chandelier chez les riches.
Au second, un étage identique. Au-dessus, parfois accessible par une simple échelle, la paillère, qui garde le foin, les légumes secs (pois chiches, pois cassés, fèves, lentilles, ail, etc.), un pot d’huile, une jarre de semences (blé, orge pommelle) et souvent des claies habitées de vers à soie. La carrelle permet de monter directement les choses depuis la rue.
Tout est fait pour lutter contre les rats (chats et chiens), pour lutter contre le chaud, le froid et l’humidité, la paillère et les maisons voisines accolées servant d’isolant, les ouvertures étant réduites et garnies de volets, les murs étant épais et plâtrés intérieurement.
Si le second existe, il accueille une autre famille ou une autre génération, ou bien les adolescents d’une grande famille (8-10 enfants ne sont pas rares).
Quelques maisons ont une importance particulière.
L’hôtel de ville occupe l’actuelle place Ferrer. C’est une vieille maison de trois étages. Ses 160 m2 servent de bureaux, de prétoire, de salle de ventes, d’école, de prison et de logement (le garde champêtre Joseph Clastrier*). On y pratique l’attribution aux enchères des concessions (moulin, four, boucherie, charcuterie, trésorerie), on y tient les Conseils, la plupart des réunions, sauf les assemblées générales, pour lesquelles la place manque.
La chapelle Saint-Valentin, totalement refaite il y a 100 ans, utilisée longtemps par les Pénitents blancs, aujourd’hui interdits par le pape, et qui est la plus vaste salle de la ville. Elle accueillera les grandes réunions. Les plus convaincus des idées jacobines l’appelleront ci-devant chapelle en 1794, pour se démarquer de l’Eglise et des feus Pénitents de Moutonier.
L’Enclose, maison de campagne des d’Arbaud-Jouques, une grande famille provençale avec hôtel sur le cours des carrosses (19, cours Mirabeau). André d’Arbaud-Jouques est le Président du Parlement d’Aix. Ses ascendants avaient racheté une part des droits des Forbin. Ils avaient élevé cette bastide (emplacement de l’actuelle mairie). Les choses s’étaient très mal passées entre la ville et eux. Ils avaient alors enclos totalement leur propriété (voir le plan 1800), y compris rue des Fabres, devenue un cul de sac, y compris le puits communal, (devant le 11, sur le cours). D’Arbaud-Jouques émigrera. Cette maison vide et muette deviendra un bien national, acheté par Marc Antoine Borély. De rempart aristocratique, elle deviendra plus tard symbole républicain, la bastide devenant mairie et les murs l’entourant étant abattus.
L’auberge du Lièvre, petite bourgade, (4 & 6, place Gambetta, N 353 & 354) tenue par une famille Laurin, lieu de passage des muletiers, de brassage des informations, lieu de rassemblement et de fête, sa cour étant la seule place de Gardanne. En quelque sorte lieu opposé à l’Enclose, géographiquement et socialement. On y dansera la Carmagnole.
L’église Sainte-Marie, petite, encombrée, vétuste, flanquée du presbytère, de la maison de la dîme et du clocher tout neuf. Le prêtre Andravy et les vicaires Vitalis et Bayle, ne seront pas réfractaires, mais l’église sera fermée et utilisée un moment comme salle de réunion, les prêtres exerçant alors dans la chapelle Saint-Sébastien.
Les maisons des gros négociants. Elles sont vastes, emplies de denrées, actives (entrée-sortie des muletiers) et exposées à la convoitise de ceux qui n’auront plus rien à manger après le terrible hiver 88-89. Citons la demeure d’Antoine Vaussan, faubourg Saint-Baudile (1, rue Jules Ferry, N 628), celle de François Baret* rue droite (35, rue Puget, N 537) et celle de Joseph Marin*, grande bourgade (16, faubourg de Gueidan, N 335). Les négociants et l’instituteur Paul Cézilly* habitent des maisons modernes, alors que les bourgeois restent dans des demeures anciennes (François Moutonier, Jacques Bourrelly, Pierre Car).
En 1788, la mentalité issue de la vieille tradition provençale se contente d’une vie austère, d’une situation foncière peu lucrative, de la transmission aux futures générations.
-
Les hommes :
Le 14 février 1789, dans l’hôtel de ville, Gardanne choisit son équipe municipale pour l’année. Il en est ainsi depuis des siècles. Mais c’est pour la dernière fois, sans le savoir.
Premier consul : Antoine Vaussan. 45 ans. L’un des plus riches négociants, comme son père et ses frères. Marié en 1772 à Marie Anne Bernard, et par là beau-frère de François Amalbert*, il habite faubourg Saint-Baudile une maison conçue pour son métier d’expéditeur. Il est du clan des ménagers, opposé à celui des bourgeois. A Gardanne, seule une vingtaine de personne peut occuper les postes clé. Alors bourgeois et ménagers panachent, et tournent aux divers postes. Cette année est celle d’Antoine. Il a bien sûr des appuis, mais pas de clientèle suiveuse, contrairement aux anciens, Louis Car et François Moutonier.
Deuxième et troisième consuls : Antoine Baret et François Courdurier. Postes de complaisance, sans importance. Antoine Baret, 37 ans, est fils du procureur du roi Antoine Baret, 72 ans, qui occupa de nombreux postes municipaux. François Courdurier, 52 ans est meunier. Il habite rue droite (Puget n° 44, N 488), la même maison que son frère Antoine Courdurier*, 53 ans, riche ménager. Ils seront vite écartés.
Les consuls s’appuient sur une douzaine de conseillers, un juge de paix et son viguier, un trésorier et ses auditeurs, un greffier, un capitaine, avec lieutenant et sergents (la police municipale), un valet (l’annonceur public) et un abbé de la jeunesse, organisateur des fêtes.
Le greffier secrétaire est François Pontier. Il a 50 ans. Homme important, ménager instruit, qui a soutenu Louis Car. Depuis 1766, il occupe à tour de rôle tous les postes clé. Il habite faubourg Saint-Sébastien (4, avenue de Toulon, N 560) et possède le pré anciennement Forbin qui va de sa maison à la Planque. Sa petite fille, dite la veuve Pontier, le vendra pour que l’on ouvre le boulevard Forbin. Son fils François, 23 ans, sera maire de Gardanne sous la Restauration. Le capitaine de la ville, Louis Bernard*, âgé de 32 ans, propriétaire, bourgeois, habite rue de la chapelle (2-4, rue Courbet, N 389-390). Le viguier Joseph Marin*, 51 ans négociant, du parti des ménagers, consul en 1775 et en 1788, occupe de nombreux postes de 1766 à 1770. Il habite grande bourgade. Il meurt en 1793.
D’autres personnages sont très en vue.
Jacques Bourrelly, qui était avoué à Aix, a épousé Rose Moutonier 1739-1819 en 1761, fille du très riche notaire François Moutonier, chef des Pénitents blancs et du parti bourgeois. Jacques a remplacé son beau-père, trop âgé. Il est notaire, juge de paix, chef de file des bourgeois. Sa sœur Marie a épousé Paul Viou* 1712-1781, autre bourgeois. Premier consul en 1774, il habite rue droite (60, rue Puget, N 477). Son fils Augustin 1766-1833 sera maire de Gardanne à la Restauration.
Pierre Car 1760-1844. Propriétaire, neveu d’Anne Car (épouse de François Moutonier), marié à Catherine Baret, proche de Jacques Bourrelly. Officier public appliqué, il est dans la place, par sa fonction et par ses alliances. Il habite rue droite (12, rue Puget, maison détruite N 519). Non parent avec Louis Car ni avec le futur maire Joseph Car.
François Baret 1731-1813, gros négociant, a élevé une maison adaptée à son métier, rue droite (35, rue Puget, N 537). Du parti bourgeois, il a marié sa fille Catherine 1760-1837 à Pierre Car (ci-dessus) et son fils Paul 1773-1837 à Rose Bourrelly, fille de Jacques (ci-dessus). Le trio Bourrelly-Car-Baret est solide.
Louis Car 1730-1806. De parents illettrés, ménager, membre du Rosaire, il a été le chef du parti ménager face au parti bourgeois. Il a réussi à devenir notaire en 1777, à faire modifier le règlement de désignation des officiers municipaux (1778). Capitaine en 1785, premier consul en 1786, viguier en 1787, il compose avec Jacques Bourrelly et pense à se retirer, non sans placer ses poulains (Sauveur Deleuil, François Pontier, Roch Deleuil, Joseph Finaud, Joseph Marin). Il vit dans sa bastide faubourg Saint-Baudile (80, route blanche, N 1981).
Antoine Andravy 1737-1795, prêtre. Né à Barème, il exerce depuis 1764 et connaît les problèmes. Il ne peut, par sa fonction, exercer de pouvoir politique, mais il est très influent car très aimé. Vicaires : Joseph Vitalis 1728- né à Fuveau et Marcellin Bayle 1738- né à Seyne.
Sauveur Deleuil 1724-1796 est âgé, mais à la tête d’une tribu. Son père était maçon et soutenait Louis Car. Sauveur et ses quatre frères font de même. En 1789, ils ont 13 fils adultes, fonctionnant dans la plus grosse entreprise de maçonnerie de Gardanne. On leur doit la plupart des maisons neuves des faubourgs. Marque de fabrique : Encadrement des portes par des moulures. Sauveur habite rue droite (26, rue Puget, N 502).
Les forains font partie des électeurs et sont influents. Le domaine de Valabre est aux mains d’un enfant de 6 ans, Alphonse de Gueidan. Sa mère, Henriette de Félix Ollières, veuve, aura assez de soucis à Aix pour négliger Gardanne. André d’Arbaud-Jouques, Président du Parlement, fort royaliste, émigrera et sera guillotiné par Fouché. Paul Jaubert (propriétaire de la tuilerie), Laurent Gautier (maître chirurgien aixois) et le bourgeois de Marseille Joseph Coulet sont prêts à soutenir Jacques Bourrelly.
Etant placé dans l’arrondissement d’Aix, Gardanne est sous surveillance aixoise.
L’archevêque Jean de Boigelin 1732-1804 s’est comporté de façon très humaine lors de la disette de 1772. Son hôtel (place des 4 dauphins) et son château (Saint-Martin de Pallière) laissent soupçonner en lui une immense ambition. Il fera pression sur Andravy et sera l’un des députés du Clergé les plus réactionnaires.
Les avocats Pierre Bouche 1758-1850 et Jean Espariat 1747-1827 sont dans la mouvance bourgeoise non royaliste, comme Emeric-David 1755-1839. Ils suivent le prêtre Jean Joseph Rive, qui lutte pour l’abolition des privilèges. Leur adversaire est Pascalis 1732-1790, défenseur du régime. Le noble Gabriel Honoré de Riquetti, comte de Mirabeau 1749-1791, a fait des déclarations pertinentes sur les réformes à faire, mais il est insaisissable, tantôt chez les nobles tantôt chez les bourgeois, à Marseille ou à Aix, libre ou en prison.
Marseille, par son élan jacobin, aura une forte influence sur Gardanne.
2. 1789-1790. La révolution victorieuse.
En 1788, le royaume est accablé de problèmes. Le gouvernement de Versailles agit de façon impuissante, sinon néfaste. Cela dure depuis longtemps, trop longtemps.
La Noblesse provençale, qui fut combattue par Richelieu, qui fut dupée par Mazarin, abaissée par Louis XIV, oubliée par Louis XV, est maintenant ponctionnée par Louis XVI. Elle revendique le retour à l’autonomie, à l’administration du comté par le Parlement d’Aix.
Le Clergé provençal, moins provocant mais plus pervers (2), voit son élite déborder la droite des nobles, mais aussi son bas clergé se solidariser avec la gauche du Tiers.
Le Parlement d’Aix n’est plus qu’un rassemblement de prédateurs. Mistral, Parlement et Durance sont les 3 fléaux de la Provence.
Le très rigoureux hiver 88-89 anéantit les récoltes. La disette est générale. Le 31 janvier, on lit au Parlement d’Aix un avis de Mirabeau. « Malheur aux privilèges ! Les privilèges finiront, mais le peuple est éternel ! ». Scandale, suspension du Parlement. Mirabeau devient un héros. On ne parle plus que de lui, chez Laurin ou chez Laiton (un lupanar, impasse Roux), chez Bourrelly ou Car. Le peuple de Mirabeau, c’est le Tiers, ceux qui ont droit de vote, ce n’est pas la foule des pauvres, qui sont non représentés.
Le Tiers s’oppose au retour aux pleins pouvoirs du Parlement aixois, quand Versailles annonce la tenue d’Etats généraux pour le printemps 89.
Le 16 mars, Gardanne reçoit la convocation et le protocole pour désigner les députés aux Etats généraux. La préparation se fera par une réunion au lycée Bourbon d’Aix (lycée Mignet). Gardanne doit envoyer 4 représentants.
Le 22 mars, 406 personnes sont assemblées autour de l’hôtel de ville (record qui restera). Jacques Bourrelly, François Amic, François Pontier et le forain Aubert contestent. Le juge Joseph Marin rompt la séance. On se retrouve le 29, avec seulement 162 personnes, à l’abri, dans la chapelle. On a écarté la populace, ceux qui n’ont que la violence pour parler.
Antoine Vaussan, Joseph Marin, François Pontier et maître André Bailly (avocat, forain de Marseille) sont nommés pour apporter à Aix les Cahiers de doléances. Donc 3 négociants et 1 avocat. Ces cahiers sont perdus, mais on peut en situer le fond, car ils sont inspirés par les discours de Mirabeau. Le tribun déclarait vouloir tourner deux pages :
Celle des privilèges. L’agriculture et l’industrie subissent d’énormes ponctions, alors que la noblesse et le clergé ne contribuent pas aux charges publiques (future nuit du 4 août).
Celle de l’arbitraire. On ne veut plus d’une justice qui s’achète, d’une politique qui emprisonne, d’un sectarisme qui refuse tout (ce sera la prise de la Bastille).
Les thèmes de Mirabeau sont adoptés tout autour d’Aix : Plus de privilèges, plus de mépris. Jacques Bourrelly et Louis Car, naguère opposés comme dans un combat de coq, adhèrent avec la même ferveur. Andravy n’émet pas de réserve, l’espoir est commun, mais il n’est pas unanime …
Du 23 mars au 1er avril, des émeutes parcourent la Provence. Monique Cubells en dénombre au moins 52, dont Allauch, Peynier, Puyloubier, Rians, les Pennes (3). On pille, on brûle, on détruit, et parfois même, on tue. Les plus violentes sont celles du Luc, Brignoles, Hyères. A Manosque, Louis de Suffren, évêque de Sisteron, est conspué. Il rentre grièvement blessé dans son château de Lurs. Cette misère et ce désespoir sont présents à Gardanne. Le 25 mars, pour apaiser ceux qui ont pris les fourches, plusieurs responsables piochent dans le blé de la dîme et le distribuent aux pauvres. Deux certitudes : Antoine Vaussan y contribue, Andravy en est complice. Résultat : Aucun trouble.
En Avril, la Provence choisit ses 24 députés pour Versailles. A Aix, le Tiers a droit à 4 députés. Gardanne vote Mirabeau. Mirabeau, Massillon, Bouche et Pochet sont élus. Elu aussi à Marseille, Mirabeau opte pour Aix, afin de mieux s’opposer au Parlement local.
Les prix des denrées flambent, l’incertitude est grande. Il faudra bien que cela casse quelque part. La nouvelle de la prise de la Bastille est accueillie avec soulagement et enthousiasme : Nos malheurs vont peut-être cesser ! Allons danser au Lièvre ! Il n’y a plus de bourgeois et de ménagers, de conservateurs et de progressistes, mais l’élite du village, unie, se donnant la main, espérant beaucoup dans son Assemblée Nationale et dans son Roi.
A Marseille, 10 000 personnes vont ouvrir les prisons puis se déplacent à Aix où elles en font autant. Chants, bonnets en l’air, foule applaudissant.
Moments heureux et brefs. Des rumeurs se répandent. Parce que quelques nobles ont fui à l’étranger, on croit au complot. Le pays va être envahi, toutes les denrées seront retirées, les gens arrêtés. On imagine le pire. C’est la Grande peur d’août 89.
Marseille, ville en avance sur Paris, s’invente une garde civile anti peur, anti émeute. On l’appelle la garde bourgeoise. Des volontaires disponibles se portent sur le lieu d’un début de rassemblement et calment des choses. La Grande peur sévit aussi à Gardanne. Le consul Antoine Vaussan prend une initiative : Créons nous aussi une garde bourgeoise.
Pour la réunion générale du 9 août, 200 Gardannais se serrent dans la chaleur de la chapelle. On vote un soutien à l’Assemblée nationale. On prélève un impôt de 14 livres par feu, pour aider les députés de la Constituante bloqués à Paris. Le consul propose de vendre le blé de la dîme, au prix du cours. Puis Vaussan donne mission à 6 commissaires pour créer une milice. Leur choix nous éclaire sur les acteurs locaux et leur but.
Ces commissaires sont le prêtre Andravy, le consul Vaussan, le forain André Bailly, le fils (François) de Jacques Bourrelly, l’huissier Joseph Astier et l’incontournable secrétaire François Pontier, autrement dit les personnes les plus instruites et les plus riches, avec 3 négociants, 2 avocats, un ecclésiastique, ce qui assure une assise morale, une assise juridique, et une assise d’élite. Le Tiers Etat gardannais ne lutte plus « pour » ses doléances, mais « contre » les violences et les remises en cause que pourraient perpétrer les indigents.
Le 30 août (on a pris le temps de la réflexion et des arbitrages), on publie la composition des 8 gardes de 8 personnes chacune, pour les 8 quartiers. Ce nombre de 64 est énorme. En permanence, de jour comme de nuit, 8 personnes patrouillent, chacune dans son secteur. Il est à la mesure de la peur et de la coupure ancestrale entre notables et gueux. Pour subvenir à ce bénévolat courageux et coûteux, Vaussan a fait le tour de ceux qui sont riches et fiables. Jacques Bourrelly et son fils Augustin, Pierre Car, Joseph Marin, Louis Bernard, Jacques Lion* etc. Quelques gros artisans (Joseph Deleuil et François Viou maçons, Jean Cordelier menuisier, Antoine Depousier* et Jean Joseph Raynaud forgerons, Paul Laurin* aubergiste etc.), de nombreux ménagers (François Pontier, Pierre Poussel, Etienne Avon, Joseph Car, Joseph Courdurier, François Amalbert etc.). Aucun pauvre, aucun paysan.
La Constituante abolit les privilèges féodaux (nuit du 4 août), supprime les dîmes (11 août), publie la Déclaration des Droits de l’homme (26 août) et prépare la Constitution (séparation de l’Eglise et de l’Etat, etc.). Mirabeau a beaucoup pesé sur ces décisions. En particulier, pour restreindre le pouvoir du roi à l’exécutif, pour donner le pouvoir législatif et judiciaire à l’Assemblée. Il propose que Louis XVI soit roi des Français.
En décembre, sont créés les départements, les cantons, les communes, les paroisses. Les aixois Espariat et Bouche y ont fortement contribué. Gardanne n’est plus ville royale, mais chef lieu de canton. Il n’y aura plus de consuls, mais un maire élu. L’état civil enregistrera les actes au chef lieu de canton. Par exemple, les gens de Cabriès viendront se marier à Gardanne.
Fin 89, les Gardannais sont optimistes : Les privilèges ont été abolis, il n’y a pas eu de violences. Le 20 août, la garde marseillaise avait tiré sur la foule phocéenne, mais on est au bout de nos peines … Et Mirabeau, aux Jacobins, fait merveille.
Il faut procéder à l’élection du maire et du conseil. Gardanne choisit le 14 février 1790, jour de sa fête. Les hommes adultes peuvent voter. Pour les humbles, c’est la première fois. Mais ils sont maladroits, s’abstiennent ou votent comme le propriétaire. Les 3 plus âgés président (François Moutonier, Joseph Astier et Gaspard Marin). Le secrétaire est comme d’habitude François Pontier. Comptent le scrutin : Louis Car, notaire, Gabriel Rémusat*, boulanger, Joseph Gras, ménager. On retrouve les mêmes élus qu’avant 89.
Elu maire (le premier de Gardanne) : Jacques Bourrelly.
Elus officiers : Paul Laurin, aubergiste, Gabriel Rémusat boulanger, Joseph Marin, négociant, Paul Pélissier*, Mathieu Bourrelly (cousin germain de Jacques).
Elus officiers publics : Honoré Finaud*, Pierre Car, Joseph Deleuil.
Procureur : Louis Car, notaire. Secrétaire : François Pontier.
Notables (au sens de conseillers) : Laurent Amalbert, Joseph Amalbert, Pierre Viou, Louis Deleuil*, Valentin Liency, Pancrace Augier*, Honoré Gras*, Antoine Ethin*, François Amic*, J. François Lion, Laurent Depousier* et Antoine Courdurier. (1)
Le négociant Antoine Vaussan, ex premier consul, brille par son absence. Il a été attrapé à Aix transportant du blé vers Gardanne, et il est soupçonné d’être un accapareur. Il s’en défend. A Gardanne, tout le monde est neutre, ou plutôt d’accord pour l’écarter.
Tous se félicitent de la suppression des douanes et des octrois internes. Les ventes vers Marseille et Aix vont être facilitées. Les entrepreneurs vont de l’avant et ne tolèrent plus la passivité de la noblesse. A Gardanne, ce sont eux qui captent le pouvoir et les bonnes affaires. ← Maison de Jacques Bourrely, maire et gardannais le plus riche. Rue droite (60, rue Puget, N 477). Le crépi est postérieur.
Marseille a élu maire le négociant Etienne Martin. A Aix c’est l’avocat Jean Espariat.
L’an 1790 se déroule dans un climat plus favorable. L’hiver a été normal. La gestion de la ville bénéficie de la collaboration et la bonne volonté de tous. Aucun trouble à signaler.
A Marseille, le 21 mars, le régiment royal-la marine, qui avait été envoyé pour surveiller la ville, se rallie à la population et « se soumet aux décrets de l’Assemblée ». Signé par l’adjudant Bernadotte, futur roi de Suède.
Pour la fête du 14 juillet, dite de la Fédération, l’annonceur public Joseph Clastrier a alerté la population : Cérémonies avec tous les élus, jeux avec poteau, course de sac, sartan mascarade, bal (fifres et tambourins) dans la cour du Lièvre.
A 11 heures, dans Sainte-Marie, on chante le Te Deum. A midi, serment est prêté par la garde, place Saint-Sébastien. Les gardes sont en civil, mais se reconnaissent au Pouf, grand plumet dans le chapeau. Les poufs arborent les 3 couleurs de la Nation : Bleu, blanc, rouge. Le maire fait un discours sur la loi et sur le roi. Comme l’a préconisé Mirabeau, on ne crie plus Vive le roi, mais La Nation, la loi, le roi. On danse la carmagnole. La farandole gagne les rues. Toutes les couches de la population se donnent la main.
Au lendemain de cet enthousiasme général, on apprend que des émeutes ont eu lieu à Allauch. A Gémenos, le marquis d’Albertas, seigneur de Bouc, gagné par les idées nouvelles, a offert un banquet. Un illuminé d’Auriol l’a tué d’un coup de poignard.
A Aix, le 25 septembre, le Parlement décrète sa propre fin. Pascalis fait un discours nostalgique, borné et de mauvaise foi (2, p 317). Le 12 décembre, il est sur le pas de la porte du Club des Amis du Clergé et du Roi avec son ami La Roquette, quand une troupe les arrête. Le lendemain, des forcenés les sortent de prison et les pendent sur le Cours, face à leur maison. Puis le vieux Guiramand (80 ans), fondateur de ce club, subit le même sort. Tous trois communiquaient avec les émigrés, apparemment pour monter un complot, c’est-à-dire pour envahir la Provence. Mais le jugement a été très sommaire. Comprenons par là, qu’en des temps troublés, la culpabilité, la haine, l’urgence, s’accumulent.
3. 1791-1792. C’est la faute du roi.
La municipalité de Gardanne travaille sans moyens, mais sans incident, contrairement à l’ensemble de la Provence, qui est en de nombreux endroits en état de guerre. Ce particularisme gardannais peut s’expliquer.
Aix, Marseille, Toulon, Arles, Carpentras, abritent de nombreux nobles. Beaucoup émigrent (à Nice, non française, notamment). Ceux qui restent sabordent le pays (les Castellane, Bruni, Vintimille, Mirabeau frère). Ils n’acceptent pas le projet de l’Assemblée de supprimer le mot Majesté et de donner à Louis XVI le titre de roi des Français (projet avorté). A Marseille, le jeune Barbaroux s’exclame : « Les peuples n’appartiennent pas aux rois. Ce sont les rois qui appartiennent aux peuples ».
Aix, avec l’archevêché, la cour des comptes, le bureau des finances, la sénéchaussée, les tribunaux, l’intendance, le gouverneur militaire et les facultés, est la capitale politique, le relais de la monarchie, la courroie de transmission de la culture et des mœurs parisiennes. Dans les hôtels aixois, le tout Paris descend et répand l’ambiance française. Dans la bonne société aixoise, on parle français.
La société marseillaise des négociants est riche mais roturière. Elle a lu Voltaire (4). Elle sait commercer, et rêve d’être une petite république, indépendante d’Aix. Elle entraine une population très patriotique, ce qui effraie les nobles. Elle parle provençal. La population saisit plus facilement les slogans que le fond des travaux de l’Assemblée.
A Gardanne, ni nobles ni haut clergé. Andravy s’applique au milieu de ses ouailles, loin de l’ultra de Boigelin. Les familles de Gueidan, d’Arbaud-Jouques et de Forbin ont certes des biens, mais ils ont perdu leurs privilèges et intriguent ailleurs qu’à Gardanne. Ici, un accord général tourne autour du constat : La Révolution nous a donné satisfaction. Il faut maintenant travailler à la prospérité, dans la paix. Bourgeois, ménagers et travailleurs sentent cet intérêt commun. Aquéou Mirabéou, qué mounstré ! Ce Mirabeau, quel petit génie !
Le 11 janvier 1791, Louis Car est nommé juge de paix du canton.
Le 6 février, Andravy, Vitalis et Bayle, signent la Constitution civile du clergé. Les églises sont propriété de l’Etat et les prêtres sont des salariés.
Le 2 avril 1791, Mirabeau meurt. De ses excès ou du poison ? La France entière est choquée, la Provence et Gardanne sont consternés, comme devenus orphelins. Il est inhumé au Panthéon. Andravy fait une messe de Requiem dans Sainte-Marie.
Dans la nuit du 19 au 20 juin, l’irréparable arrive : Le roi et sa famille fuient à l’étranger, mais ils sont arrêtés à Varennes. Les hommes les plus avancés (Danton, Pétion, Brissot, Robespierre) veulent juger le roi pour haute trahison et proclamer la République. La noblesse et le clergé s’y opposent. Beaucoup de députés du Tiers tergiversent (Lameth, Barnave, Lafayette). On ne décide rien. La famille royale retourne vivre aux Tuileries. A chaud, la fin de la royauté aurait peut-être pu passer, sans catastrophes. Il faudra des années de déchirures, de guerres civiles et de guerres internationales, pour arriver finalement à une dictature.
Gardanne cultive ses jardins sans se douter qu’une deuxième révolution commence, celle-ci les armes à la main, dans une épreuve de force. Le 5 août, on vote pour les députés qui doivent former l’Assemblée législative. Les Bouches du Rhône envoient des hommes progressistes, dont le maire de Marseille Etienne Martin et le maire d’Aix Jean Espariat, pour qui Gardanne a voté.
L’année 1791 se passe sans trouble à Gardanne, mais plusieurs parties de la Provence sont à feu et à sang. Dans les églises d’Aix, on entend souvent « Vive le roi, vive le clergé », alors que la Constitution exige une indépendance de la religion vis-à-vis de la politique. Le district d’Aix fait fermer les églises non paroissiales. « On peut être citoyen sans être chrétien, mais on ne peut être chrétien sans être citoyen ». A Gardanne, Andravy ferme Saint-Sébastien et la chapelle.
L’angoisse grandit. On dit que les émigrés préparent la guerre. On dit que les troupes étrangères (à Aix, le régiment suisse Ernest) vont tirer sur nous. On dit qu’à Marseille les gens s’opposent. L’astronome Mouraille (72 ans) a remplacé Etienne Martin, parti à Paris, mais cet homme savant, scrupuleux et caché, n’est pas aimé. Les sections s’agitent contre la mairie et contre le club des Jacobins de la rue Thubaneau, dont Mouraille est le chef. A Paris, le dieu qui a remplacé Mirabeau à l’Assemblée comme aux Jacobins, c’est Robespierre.
Paul Laurin à sa tête, le club de Gardanne est toujours affilié à celui de la rue Thubaneau.
On dit qu’il se passe des choses horribles dans le Comtat. Ces terres du pape (Pie V) voient se former des patriotes voulant le rattachement à la France (surtout à Avignon), et des papistes furieusement contre l’idée de tout département chez eux (Cavaillon, Carpentras). Des patriotes arrêtent 77 papistes, des papistes massacrent le chevalier de Chaussande.
Le 14 septembre, l’Assemblée crée le département de Vaucluse, mais Carpentras, Valréas, Sarrians etc. refusent. Les BdR envoient des médiateurs, dont Paul Jaubert, patron de la tuilerie de Valabre. Les patriotes se querellent. Devant le chaos, les médiateurs s’en vont. De juin à décembre 91, sièges, massacres, assassinats se succèdent. En tout, 200 morts (2).
On dit que l’on s’est battu à Toulon (23 août, 8 morts).
Fin 91, la situation s’est radicalisée. Le roi refuse tout (il est Monsieur véto). A Marseille, le maire Mouraille s’oppose aux élus départementaux (dont Jaubert), plus conservateurs. A Gardanne, la belle unité se fissure. Le club local soutient Mouraille et les patriotes, alors que les notables prennent de la distance. D’un côté, ceux qui mettent en avant la Nation : Paul Laurin, 27 ans, Paul Baret, 18 ans, Barthélemy Grognard 21 ans, Gabriel Rémusat 39 ans, soutenus par Antoine Vaussan, 47 ans, de l’autre Jacques Bourrelly, 60 ans, Pierre Car, 31 ans, Louis Car 61 ans, Antoine Baret 74 ans, Joseph Marin, 53 ans, François Pontier 52 ans, qui pensent à leur pécule, au village, aux impôts, sans se positionner dans un parti.
En 1792, Marseille, formidable moteur, joue un rôle national, entrainant les Gardannais les plus enthousiastes. En Provence, le roi n’a jamais été tabou. Il est le plus grand des préleveurs d’impôts. La démarche visant à s’en passer est plus avancée qu’ailleurs. Les fêtes patriotiques se multiplient, Ҫa ira et farandoles en tête. Comme à Marseille ou à Aix, les patriotes gardannais ont les cheveux coupés à la Titus (assez court, partout pareil), de grandes moustaches et de très longs favoris. Pas de chapeau, mais un bonnet, rouge pour les cérémonies. Pas de culotte, mais des pantalons, souvent rayés. Ce sont les sans-culottes, veste bleue à col rouge, boutons jaunes, deux pistolets et un sabre à la ceinture. Les femmes sont moins démonstratives. Elles mettent un petit bonnet avec une cocarde à 3 couleurs (5). Et l’on danse le dimanche à l’auberge du Lièvre.
La tradition de planter l’arbre de la liberté arrive en mai 1792. Malgré l’exiguïté des lieux, on plante un orme devant la mairie, contre le mur de l’Enclose.
Des troupes étrangères se massent aux frontières. Des villes comme Arles, Apt, Toulon, affichent leur royalisme. Alors Marseille invente l’action : La garde, mais aussi une foule de volontaires, pour aller disperser les ennemis de l’intérieur ! Contre l’avis du département, contre celui du ministre Roland, une armée de patriotes marseillais prend Arles à la fin mars.
En avril, la guerre contre l’Autriche est déclarée. Depuis Paris, Barbaroux demande à Marseille « 500 hommes prêts à mourir ». Le 2 juillet, 500 volontaires chantent le réveil du peuple en partant pour la capitale. Ils comptent quelques personnes d’Allauch, mais pas de Gardannais. Le 11 juillet 1792, la Législative déclare la patrie en danger. On demande à la France entière de venir aider Paris. Les Marseillais arrivent le 31 juillet. Le 10 août, ils sont au premier rang dans l’attaque des Tuileries, où réside le roi. Un peintre parisien se distingue, Jean-François Carteaux. Le roi fuit à la chambre des députés. Ces derniers le protègent mais votent sa déchéance. La famille Capet est emprisonnée, 13 mois après Varennes.
Le 20 septembre, on adopte l’état civil, la laïcité de l’Etat, la nécessité d’une autre constitution. Le 22, la République est proclamée. Le 27, Gardanne fête l’abolition de la royauté. Paul Laurin signe le premier acte gardannais de l’Etat républicain. Les Marseillais ont été décisifs. Leur chant est appelé à Paris la Marseillaise.
Les papiers secrets du roi tombés aux mains des députés prouvent que Mirabeau trahissait la cause du Tiers, pour de l’argent. Ses restes sont sortis du Panthéon et finissent à l’égout.
Nouvelle déception. Notre si cher Mirabeau ! Faut-il suivre son accusateur (Robespierre), ou bien ne plus trop s’occuper de ce qui se passe à Paris ?
Sur le front externe, l’armée prend Nice, Monaco, Menton (septembre). Les victoires de Valmy (20 septembre) et Jemmapes (6 novembre) offrent la Belgique. Sur le front interne, les Marseillais continuent de dicter leur loi partout où la contre-révolution menace : Var, pays d’Aigues, Aix. On ne sait pas si des Gardannais participent. Gardanne n’est jamais visé.
Autre difficulté extrême : La réforme du calendrier et des poids et mesures. L’adoption du système métrique marque pour nous un gigantesque progrès, dont le monde entier nous est reconnaissant. Mais les paysans se fient à leurs habitudes et renâclent. La complexité des choses et le trop grand nombre de changements simultanés les en détournent. La vraie Révolution est dans la suppression des privilèges, mais aussi dans l’Egalité devant les lois, les mesures, le langage. Les élites intellectuelles apprécient, mais pour les provinces profondes, c’est l’horreur (pensons au pourtant facile passage du franc à l’euro …).
4. 1793-1795. Fédérés, Montagnards, royalistes.
Sommet de la lutte entre individualisme, altruisme, conservatisme.
Le 21 janvier 1793, le ci-devant roi est guillotiné. A Gardanne, ceux qui avaient prêté serment au nouveau roi, en 1774, organisent une cérémonie pour la République : Jacques Bourrelly, Pierre Car. Les jeunes chantent des hymnes républicains. Antoine Raibaud, juge royal, n’est plus là, ni la dîme, ni les privilèges. Cette fois, on compte bien en avoir fini.
On chante, mais Gardanne souffre de la dégradation de ses finances, de la médiocrité de ses récoltes, de l’anarchie qui règne dans le commerce. Le département des BdR a vu partir 5000 émigrés. Parmi eux des nobles, qui n’avaient aucune fonction, mais aussi des actifs, des entrepreneurs. Marseille a perdu 26 % de ses négociants, 38 % de ses fabricants, 36 % de ses courtiers. Aix n’a plus ses aristocrates consommateurs. La jeune génération noble pille plus qu’elle n’achète. Gardanne ne reçoit plus de commandes.
Les Marseillais de Mouraille et du club des Jacobins continuent « à mettre de l’ordre », à Digne en janvier 93, à Salon en mars, sans se préoccuper de l’économie de la ville. Monte alors un parti « des modérés », non pas modérés vis-à-vis de la République, mais attachés aux affaires et à l’indépendance régionale. Ces fédéralistes se retrouvent ailleurs (Bordeaux, Caen) et s’expriment à la Convention par les Girondins (dont le Marseillais Barbaroux).
Adélaïde de Forbin, veuve, quitte son château de Saint-Marcel pour son logis de Gardanne, où elle se sent plus en sécurité. En descendant de sa voiture, elle lève les yeux et voit le blason martelé, sur la porte. Gardanne s’est vengé de ses ancêtres, mais n’a aucun grief contre la citoyenne propriétaire.
Signe d’un enthousiasme toujours intact, le propriétaire Louis Geneston, époux de Catherine Viou (Jean de Bouc), baptise son fils Jean François la Victoire.
Le 25 avril, les nouveaux administrateurs du département sont élus. Parmi eux, Paul Jaubert, de Gardane (1 n, comme autrefois). Ces administrateurs suivent les consignes du girondin Barbaroux et veulent livrer Marseille aux Anglais, le bailli de Suffren à leur tête.
C’en est trop de la dictature des clubs et de Mouraille. Fin avril, les sections s’emparent de la ville. Qui triomphe, les fédérés ou les contre-révolutionnaires ? La suite le dira. En tout cas, les Jacobins perdent, et Gardanne se tait.
Le 19 juin, Marseille déclare ne plus reconnaître les décrets de la Convention, qui a mis les députés girondins en accusation, pour cause de soulèvement à Caen et à Marseille.
Les fédérés provençaux veulent attaquer Paris. Leur armée (Marseille, Nîmes, Toulon, Apt, Rians, Barjols) parvient à Arles, mais se débande devant l’armée officielle du général Carteaux, aidé par les Avignonnais. Episode du pont de Bonpas, mort d’Agricol Viala.
Ce Carteaux n’est autre que le peintre qui avait fait preuve de bravoure le 10 août. La République en a fait un général. Oh ! Soldats de l’an II …
Dans leur fuite, les Fédérés comptent se replier à la Gavotte, Septèmes, Allauch, Roquevaire. Quand Carteaux arrive à La Malle, tout ce monde fuit à Toulon (24 août). Alors, le contre-amiral Trogoff et Suffren livrent la ville aux Anglais. La flotte de sa Majesté avait refusé Marseille, mais elle accepte Toulon. Suffren a terni sa gloire ramenée des Etats-Unis.
Attaquée de toute part, la France a décidé la levée en masse (23 août 1793). Les Provençaux de 18-25 ans non mariés doivent aller renforcer l’armée de Carteaux. Le remplacement n’est plus autorisé. Sur la vingtaine de Gardannais concernés, nous avons repéré Bernard Car, Paul Prioulet, Laurent Deleuil, Jean Baptiste Savournin, Joseph Capus, François Barron, Joseph Gras. Les actes de décès de cette époque ne signalent rien. Jean Baptiste Savournin meurt, mais dans son lit. En réalité, peu de jeunes se sont présentés à la levée. Alors que l’engagement dans la garde locale est toujours aussi enthousiaste, celui pour la patrie, au loin, est délaissé. On sait agir en Gardannais, on ne sait pas agir en Français. Cela ne s’apprend pas spontanément.
Carteaux voit qu’il ne peut prendre Toulon sans une forte artillerie. Il demande des canons et un spécialiste. Il est écarté, remplacé par Dugommier, quand les canons arrivent et avec eux un débutant de 24 ans, Bonaparte, qui défend mieux son auréole que Carteaux.
La prise de la ville a un énorme retentissement. Le moral des Jacobins gardannais, un temps mis à l’épreuve, repart et milite pour la priorité nationale. Mais tout le monde n’a pas lu Montesquieu. L’adoption du calendrier révolutionnaire (5 octobre 1793) est une nouvelle source de désarroi. Fêtes tous les 10 jours, 12 mois de trente jours plus les compléments. Où sont passées les fêtes religieuses ? Nous avons nos habitudes, laissez-nous vivre en paix, avec nos traditions. Tu vois ce que donnent les idées : La violence et la guerre !
La Révolution n’a pas bouleversé la mentalité des Provinces, surtout pas de la Provence, encore moins de Gardanne. Les fêtes révolutionnaires gardent les protocoles de l’ancien régime. Marseille a même changé les paroles du Ҫa ira, sans y gagner en élégance :
Pissa, pissa, senso façoun
Entre lou nas et lou mentoun
De touti lei aristocrato … (5)
La loi du 3 juin 1793 a permis de mettre en vente les biens des émigrés. Sont concernés ceux de d’Arbaud-Jouques. L’avocat marseillais Marc-Antoine Borély achète la maison dite l’Enclose avec pigeonnier et terrasse (emplacement de l’actuelle mairie). Conformément à la loi, on fait aussi de petits lots, pour les paysans pauvres, avec un délai de 10 ans pour payer. A Gardanne, une parcelle sur cinq va à ces paysans, ce qui est remarquable. Désormais, les riches (10 % de la population) n’ont plus que 60 % du terroir. Les paysans en possèdent 40 % (ce qui est la moyenne provençale, elle-même la plus élevée de France). Ce parcellement et la présence de l’eau encouragent la production maraîchère. Pour l’instant, aucun paysan ne peut vivre de son seul lopin. Pour ses autres apports, il est métayer, charbonnier, travailleur. Peu importe, la terre et la chasse sont libres, l’élevage des pigeons aussi.
La Convention envoie 3 commissaires en Provence afin de régler le problème des fédérés. Ce sont Barras, Fréron et Maignet. A Marseille, Fréron fait guillotiner 124 personnes. A Toulon, Barras punit la trahison par 1000 morts. A part ces horreurs, Fréron essaie de relancer la ville, il appelle les négociants, organise fête sur fête, ouvre des théâtres.
La municipalité de Gardanne affiche son goût pour la République à la romaine, et son anticléricalisme (ou plutôt sa docilité à Fréron) en changeant quelques noms de rues. Le chemin du presbytère devient rue du Champ de mars, Non Passe devient Fraternité, Cassarat Egalité, et contre la mairie : Place de la Liberté et place de la République. Rue droite devient rue Ventôse. La rue de la Chapelle devient des ci-devant Pénitents blancs et la rue de l’église de la ci-devant église, elle-même fermée et baptisée temple de la Raison. Andravy s’est réfugié et officie dans Saint-Sébastien. La rue de Cavillon est appelée rue Brutus et le début du chemin de Marseille devient le faubourg Antoine. Son prolongement est astucieusement appelé rue des Phocéens parce que Barras a ordonné que le nom de Marseille disparaisse. Antoine et Brutus ont fait tomber la Marseille grecque. Comme Barras et Fréron la Marseille girondine ? En tout cas, le plus actif à décléricaliser Gardanne est Antoine Vaussan, notre négociant en blé. Dans les actes d’état civil, Pierre Car écrit systématiquement Marianne, et non plus Marie Anne.
Tout ceci suppose, à Gardanne, un consensus entre les élites (Jacques Bourrelly, maire) et les montagnards (le groupe Laurin-Baret-Rémusat). Ici, point de parti noble, point de parti clérical, point de parti fédéré, mais une bonne intelligence des choses, ce qui est à souligner, quand partout autour on se déchire.
← Estampe de 1800. L’étude d’un système rationnel de mesures est lancée en 1793. L’adoption est votée le 18 germinal, an III (7 avril 1895). Le poids est appelé grave, pour gravité, plus tard gramme.
En mars 1794, la patrie étant en danger, artisans, ouvriers, paysans, sont réquisitionnés pour aider la nation. Gardanne se plie à ce travail rémunéré. Pour fournir du bois et des cendres (potasse) aux arsenaux de Marseille, un immense défrichement s’organise. Des feux énormes fournissent la cendre. De longues files de charrettes descendent bois, charbon et cendres. Lazare Carnot a refusé la nationalisation du charbon. Les collines une fois dénudées, on monte des bancaou pour planter l’olivier. Lu dans les actes de naissances 1793 :
François Chabert, charretier, grande bourgade, est à l’équipage des armées du midi.
Joseph Car, muletier, rue de Cassarat, est aux frontières pour mener des mulets.
Jean Joseph Barthélemy, faubourg Saint-Sébastien, est au secours de la patrie.
Jean Joseph Ambruit, tailleur de pierres, rue de la chapelle, est au service de la patrie.
Jean Joseph Ambruit, tailleur de pierres, rue de la chapelle, est au service de la patrie.
Joseph Liency, muletier, grande bourgade, est à l’armée d’Italie.
Les directives ne sont pas toutes suivies : Les cloches ne sont pas fondues. Il faut dire que la marraine en est la propre épouse du maire.
En juin 1794, par volonté de Robespierre pour conserver une religion, on fête partout l’Etre suprême. Dans le temple de raison, quelques mères apportent leurs enfants, quelques jeunes filles viennent couronnées de fleurs, quelques hommes parlent de l’immortalité de l’âme. Les paysans n’aiment pas que l’on désacralise le baptême et l’extrême onction.
Le 27 juillet (9 thermidor), Robespierre ayant accusé les commissaires de répandre la terreur, les Barras, Fréron, Tallien, Fouché, Carrier, etc., le font tomber et mettent la terreur sur son dos. On voit alors à qui profite ce coup d’Etat : A la réaction royaliste. Partout en Provence, les partisans de l’ancien régime s’arment, traquent les républicains. De jeunes gens élégants, dits muscadins, portant une ganse blanche à leur chapeau, chassent les suspects.
Printemps 95, une troupe royaliste marseillaise va « corriger » une foule de marins, paysans, ouvriers, au lieu dit le Brûlat (Var). La foule est massacrée. A Aix, le 10 mai 1795, les muscadins tuent 30 personnes. Le 24 mai, ils envoient par les fenêtres 24 prisonniers du château de Tarascon. Ils reviendront le 21 juin en égorger 23, après avoir fait 107 morts à Marseille, le 5 juin, dans les cachots du fort Saint-Jean.
Les rues de Gardanne ont vite repris leur ancien nom. Au printemps, le culte catholique redevient légal. Andravy sourit. Le 22 juin, ce bon curé s’éteint, dans un appartement de la rue de Non passe (Viala). Nicolas Capus, né en 1767, s’est occupé de lui. Son fils Nicolas ouvrira une guinguette dans sa maison, faubourg Saint-Sébastien (10, rue Borély, N 567).
Pour l’instant, on se protège de la terreur blanche. Dans la région, sévit la Compagnie du soleil, troupe mi réactionnaire mi brigande. La garde gardannaise est particulièrement vigilante. Cette bande terrorise Aix, la vallée de l’Arc, Trets, mais ne touche pas Gardanne. On fusille 30 personnes à la Plaine-Saint-Michel de Marseille, on massacre à Salon, Pelissanne, Lambesc, Eyguières, Aubagne, Roquevaire. Gardanne est épargné.
Le 31 octobre, les compagnies de Jésus et du Soleil sont dissoutes.
Le réveil du peuple devient officiellement la Marseillaise. Mais en même temps, on présente la Révolution comme une série de crimes, et les républicains comme des brigands.
Les royalistes restent impunis et préparent le retour d’un roi. Le commandant militaire de la Provence, le général Willot, favorise le retour des émigrés. Le pays d’Aix reste agité par la terreur blanche jusqu’à l’arrivée de Lannes et de ses troupes, à l’automne 1797.
En 1799, interdiction aux gardes d’être armés. Plusieurs Gardannais n’obtempèrent pas. Sept sont pris et condamnés à mort à Aix. Transférés à Marseille, ils sont relâchés.
5. Conclusion.
Pour Gardanne, l’essentiel a été acquis en août 89 : Suppression de la dîme, abolition des privilèges. Le droit de vote a été étendu, même si le peuple n’en a pas usé.
En 1793, de la terre est allée aux petits paysans.
Ni violences ni dégradations. La vieille morgue des nobles a fini ici chez un enfant (Alphonse de Gueidan), une veuve ruinée (Adélaïde de Forbin, 32 ans en 1795) et un mort sur l’échafaud (André d’Arbaud-Jouques, Lyon, 1793). La vénalité cléricale n’a pas été ressentie, le curé Andravy démontrant au contraire toutes les qualités d’un bon sacerdoce, le vicaire Vitalis aidant les paysans-mineurs dans leur travail.
La garde, bourgeoise puis nationale, a été un grand facteur de progrès. Les liens communautaires ancestraux s’y sont ravivés, les idées nouvelles y ont été introduites et commentées, l’amour de la terre libre s’y est développé. L’école des instituteurs a formé des enfants, l’école de la garde a formé des adultes. Après 1792, les paysans y ont été admis.
Actifs, rentiers, ménagers et artisans, se sont rapprochés. Ils ont élu une municipalité à leur image, appliquée à la gestion et à l’entente. Les jeunes meneurs et les vieux fonctionnaires ont trouvé une vitesse moyenne. Très peu de villages peuvent en dire autant.
Bien des côtés négatifs sont à déplorer. Les gens ont vécu dans la peur, surtout dans les années 95-97 (terreur blanche). Le commerce a été réduit, la ville a manqué de moyens. Le mode de vie n’a pas été amélioré. Bien des tentatives ont échoué (le calendrier républicain, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, la participation des masses). Les mauvaises habitudes ont perduré (illettrisme, insalubrité, abstention, système de mesures dépassé). La suite a été bien pire. Napoléon a envoyé les hommes à l’armée, souvent à la mort. Le blocus de Marseille a anéanti le commerce. Le maire a de nouveau été nommé (Antoine Bourgal*) et n’a plus eu de moyens. L’agriculture a stagné. La Restauration a désigné des maires faibles et éphémères.
Ces deux hommes n’ont que 150 ans de différence. A gauche, Claude de Forbin 1656-1733, à droite Jules Lemercier de Maisoncelle de Richemont 1802-1882. Forbin porte perruque, dentelles, cuirasse, croix de Saint-Louis, les signes de l’aristocratie. Richemont est dehors, veste en velours, chapeau, équipement du chasseur, signes du citoyen. La plus grande différence est dans leur état d’esprit. Forbin refuse la gestion communale, Richemont lègue à la commune. La Révolution les sépare.
En 1830, Gardanne est aussi sale, malcommode, pauvre et retardé, qu’en 1789. C’est une commune délaissée. Un progrès se devine pourtant : Les bourgeois envoient leurs fils faire des études de droit (Bourrelly, Baret), ils portent attention à l’urbanisme (Auguste Baret, Toussaint Borély) et luttent pour l’hygiène (Jean Baptiste Girard). Le petit paysan se met à aimer la terre. Il en fait sa patrie, sa morale, à la romaine. Il soigne ses cultures maraîchères, ses betteraves, ses melons, il introduit la pomme de terre, le tabac, la pierre à caouque. Il s’engage dans la garde. C’est en pensant à lui que la marquise de Gueidan lèguera ses biens.
Cette ouverture au bien être et à la culture, à l’indépendance et à la liberté, plonge ses racines dans la Révolution. Les dirigeants gardannais de 1830 seront les partisans de la Constitution de 1793. La modernisation des années 1830-1850 doit beaucoup à 89 (la garde, Marc-Antoine Borély, Manuel, puis les fils des Laurin-Baret-Vaussan-Borély).
Le mouvement commence dès avant 1800. Cela se voit aujourd’hui encore. Sur les ruines du logis Forbin (11, place Ferrer), le sieur Joseph Gaspard Anne Viou, juge de paix du canton, construit avant 1798 une maison bourgeoise, avec salon, cheminées, balcon, ornements, rez-de-chaussée servant d’écurie, de remise ou d’échoppe, cave voutée, puits, lavoir remontant au roi René. Elle présente un escalier spacieux, de larges et hautes pièces. Bientôt Jean Baptiste Caillol et Joseph Mihière l’imiteront (9 et 7 place Ferrer). L’ampleur est encore plus manifeste chemin de Mimet, 18, rue Borély, N 577, maison construite par Bernard Car. Quelle différence avec la toute proche rue Cassarat !
On dira pendant longtemps « c’est la faute à la révolution ». Les violences, de quelque côté qu’elles soient venues, ont repoussé jusqu’en 1870 l’établissement de la République. On dira que « la révolution c’est l’échec ». Mais en 1848, Gardanne devient une petite République agricole malgré l’Empire et la Restauration, grâce à la Révolution. On ne change pas les mentalités en 5 ans.
Gardanne a évité toute terreur, contrairement aux Bouches du Rhône, toute violence entre républicains et réactionnaires, entre fédérés et jacobins. Les enjeux locaux étaient certes faibles. Mais la disparition de son statut royal avait plongé la ville dans le vide. Les hommes ont su trouver la bonne démarche, au milieu des gigantesques turbulences de l’époque, défendre les acquis, assurer le calme. Permettre aussi quelques bonnes affaires, comme surent le faire Augier, Baret, Borély, Laurin, Lion, Marin, Rémusat, Viou, etc.
Faute de documents, le profil de ceux qui ont pesé nous échappe. Nous avanceront cependant les noms de Paul Laurin, Jacques Bourrelly et Antoine Andravy.
Annexe : Quelques habitants importants en 1789-93
x = marié à © = cultivateur N … = n° du lot dans le plan napoléonien
Amalbert Paul. Branche dite Valentin, du nom de Catherine Valentin, épouse de Paul. Paul réussit de bonnes alliances pour ses 6 enfants. Mariage croisé avec les Laurin aubergistes : Un même jour de 1758, Marie Anne Amalbert épouse Mathieu Laurin et son frère Jean Joseph épouse Marie Anne Laurin. Habite petite bourgade, 7, rue Kruger, N 330.
Amic François 1740-1806, chirurgien de la ville, conseiller en 1790, fidèle de Jacques Bourrelly. Habite rue des Fabres (place de la mairie).
Andravy Antoine 1737-1795, prêtre. Né à Barrême, il exerce à partir de 1764. Avec ses vicaires Joseph Vitalis 1728- né à Fuveau et Marcellin Bayle 1738- né à Seyne, il signe la Constitution civile du clergé (6 février 1791). En 1794, son église et sa cure étant occupées, il se retire dans la chapelle Saint-Sébastien remise à neuf, et meurt sans voir les ventes des biens ecclésiastiques de 1796.
Augier Pancrace (1734-1804). Tailleur d’habits arrivé de Puyloubier. Vite propriétaire, il s’agrandit avec l’achat des biens de l’Eglise en 1796, quand il obtient le presbytère puis la maison de la dîme (N 146), où il exerce son métier. Il s’est marié en 1762 à Marie Lion (Voir Sauveur Lion). Ses fils, tailleurs eux aussi, habitent rue droite, Joseph au 53, N 459, François au n° 55, N 458. Ils doivent se déplacer à cheval, car ils possèdent 3 écuries.
Baret Antoine 1718-1797, procureur du roi, nombreux postes municipaux et 1761 à 1778. Rue droite, (rue Puget maison détruite, N 518). Son fils Antoine, né en 1751, est consul en 1789. Son beau-fils Louis Bernard est capitaine de ville. Pas de parenté avec d’autres Baret.
Baret François 1731-1813. Epoux de Marianne Lion (nièce de Sauveur Lion). Négociant, il occupe une maison adaptée à son métier, rue droite (35, rue Puget, N 537). Du parti bourgeois, très riche, il marie sa fille Catherine 1760-1837 à Pierre Car, officier public, et son fils Joseph Paul 1773-1837 à Rose Bourrelly, fille de Jacques. Le jeune Paul, dit Biscot (celui qui bisque), adhère vite aux idées jacobines et fait équipe avec Paul Laurin. Après la chute de Robespierre, il retourne à son négoce. Son fils Auguste sera maire de Gardanne et son petit fils Félix sera maire de Marseille.
Baret Joseph 1745-1820, boulanger propriétaire au petit faubourg (15, rue Pasteur, N 164) où il possède 5 maisons. Il sait lire et écrire, car il signe de nombreux actes.
Bernard Louis 1757-1732, fait partie des notables. Il est 3ième consul en 1789, à la tête de la garde n°1 de 1789, capitaine de la ville en 1790. Habite rue de la chapelle (2-4 rue Courbet, N 389-390. Un autre Louis Bernard, non parent, 1765-1735 est dans la garde n°5 de 1789.
Bourgal Joseph Antoine 1747-1815, fils du notaire royal Guillaume Bourgal, dont il a la même signature, lui-même notaire, officier public, futur maire désigné par le préfet en 1806 jusqu’à la chute de Napoléon (1814-1815). Très bonapartiste, il prénomme son fils Napoléon (ils sont plus de 10 à Gardanne). Il meurt le 22 juin 1815, 4 jours après Waterloo, et le jour même de l’abdication de l’Aigle, ayant bu les revers jusqu’à la lie (suicide ?). Habite rue montant à l’église, 16, rue Suffren, N 409.
Bourrelly Jacques 1735-1810. Avoué à Aix, riche bourgeois (c’est lui qui paie l’impôt le plus élevé après le marquis de Gueidan). Il épouse en 1761 Claire Moutonier 1738-1818, fille de François, alors qu’il a eu d’elle un enfant, né 5 ans avant, conçu « en des pratiques illicites ». Sa sœur Marie Bourrelly épouse Paul Viou, bourgeois (1712-1781). Ainsi apparenté, il prend la succession de son beau-père à la tête du parti bourgeois. Premier consul en 1774, chef de la Garde n° 5 de 1789, premier maire élu de Gardanne (1790-1799). Il a 4 enfants. Rose épouse Paul Baret, Marie épouse Joseph Imbert de Lambesc, François (1758-1793) est notaire et receveur des domaines nationaux. Augustin (1766-1833) sera maire de Gardanne à la Restauration. Jacques habite rue droite (n° 60, rue Puget, N 477).
Car Louis 1730-1806. De parents illettrés, il est ménager, membre du Rosaire, et parvient à être le chef du parti s’opposant au parti bourgeois du notaire François Moutonier. Il réussit à devenir notaire en 1777. Capitaine de ville en 1785, premier consul en 1786, viguier en 1787, procureur en 1790 sous le consul bourgeois Jacques Bourrelly, il semble ensuite s’effacer, atteint par l’âge. Il vit dans sa bastide faubourg Saint-Baudile (n° 80, route blanche, N 1981).
Car Pierre 1760-1844. Neveu d’Anne Car l’épouse de François Moutonier. Il se marie à Catherine Baret, fille du notable François Baret (voir ce nom). Huissier, officier public, chef de la garde n° 8 de 1789, il est « dans la place », allié au maire Jacques Bourrelly. Il habite rue droite (maison détruite N 519).
Cézilly Pierre 1760-1817, instituteur né à Signe (BA), marié en 1794 à Marie Viou qui a 15 ans. Logé dans l’hôtel de ville, il fait construire et habite une grande maison chemin de Saint-Baudile (10, av. de Toulon, N 566). Il achète la chapelle des Pénitents en 1796.
Clastier Joseph 1726-1804, époux de Thérèse Depousier. Membre du Rosaire, fidèle de Louis Car. Il est valet de ville en 1774 et de 1780 à 1790 (il annonce au son de la trompette), capitaine en 1777, dans la garde n°6 de 1789. Ne possède rien. Logé à l’hôtel de ville.
Courdurier Antoine 1736-1832. Riche ménager. Consultant en 1789. Habite rue droite (n° 44, N 488). Son frère Courdurier François 1837-1818 est meunier et propriétaire. 3ième consul en 1789, avant les évènements. Habite avec son frère puis rue de la chapelle.
Deleuil Louis 1752-1812. Bastié (= bourrelier) installé grande bourgade (9, faubourg de Gueidan, N 317), 11 enfants. Il fait partie des 12 notables de 89, probablement pour représenter les artisans. Son fils Pierre 1785-1815 disparaît dans les guerres napoléoniennes.
Depousier Laurent 1728-1808. Maréchal à forge au faubourg du Lièvre (n° 2, place Gambetta, N 352). Dans la garde n° 3 en 1789. Son fils Jean, maréchal aussi, construit une maison place Saint-Sébastien (n° 2, cours de la République, N 82).
Ethin Antoine, né en 1757, ménager, consultant en 1790. Habite grande bourgade.
Finaud Honoré 1758-1818, ménager, rue de la chapelle. Son frère Antoine, né en 1769, menuisier à la grande bourgade, est dans la garde n° 3 en 1789. Il parvient à devenir notaire public sous le Directoire.
Fouque Jean Baptiste. Chef de la garde n° 4 de 1789. Rôle effacé ensuite.
Gras Honoré 1752-1830, instituteur communal, propriétaire, consultant et garde en 1789. Il habite place Saint-Sébastien, maison partiellement détruite à l’ouverture du cours (n°1, boulevard de Forbin, N 554). Son père, Honoré Gras, né en 1734, est garde en 1789.
Gras Joseph dit Gelé, 1726-1806, ménager quartier Saint-Pierre (Notre Dame, N 167).
Laurin Paul dit Galant, 1764-1820. Aubergiste de l’enseigne La Lèbré, instruit, admirateur de Mirabeau, il crée le club des amis de la Constitution avec Gabriel Rémusat, s’affilie à celui de Marseille, devient jacobin et suit Mouraille. Il signe les premiers actes de la République. Il organise souvent des fêtes dans sa cour. Après la chute de Robespierre, il n’a plus que quelques fonctions municipales. Habite 37, rue Kruger, N 355 & 356. Son père Mathieu Laurin 1737-1785 a créé l’auberge vers 1770, à la petite bourgade (4 & 6, place Gambetta, N 353 & 354), avec, au nord, une écurie, un abreuvoir, des labours et des prés qui lui appartenant. Passent des caravanes de muletiers, allant à Marseille et Aix, informant de ce qui se passe dans les villes, dans le Var, des Alpes. Paul entre dans la garde de 89. Il est élu notable en 1790. Après l’abolition des privilèges, lui et ses amis ne revendiquent plus que son application et la paix. Son frère Denis 1767-1847 s’occupe plus des terres. Mathieu, fils de Denis, est sur la liste des condamnés à mort de 1799.
Lion François. Qualifié de propriétaire, car il possède un domaine à la Colle vieille. Ses fils Jean François et François soutiennent Moutonier et sont plusieurs fois au Conseil. Jean François fait partie des 12 notables de 1790.
Lion Sauveur. Lion se prononçait lien. Sauveur, époux d’Elisabeth Chaud, habite rue de Non Passe (8, passage Bara, plan 416). Il est maître menuisier, notable, soutien de François Moutonier, plusieurs fois membre du Conseil (par exemple en 1761 et 1770) quand les bourgeois détiennent le pouvoir. Sa fille Marie épouse Pancrace Augier (voir ce nom).
Lion Jacques 1742-, fils de Sauveur, chef de la garde bourgeoise n° 7 en 1789. Son petit-fils Jacques sera chef de la lyre après Jean Baptiste Vaussan. Son frère est Joseph 1756-. Tous deux habitent rue de Non passe (8, passage Bara, N 416). Tous deux sont dits Pipa (fumeur de pipe). La rue deviendra traverse de Pipa en souvenir de ces personnages hauts en couleur.
Marin Joseph 1755 x (1777) Thérèse Courdurier. Riche négociant dans la garde de 1789 avec Jacques Bourrelly. Ses fils seront les riches Joseph, Laurent et François Marin, Joseph étant sur la liste des condamnés de 1799.
Marin Joseph 1753- x (1772) Marie Baret. Fils de Gaspard et Marie Grognard, négociant à la grande bourgade (16, faubourg de Gueidan, N 335), pilier du parti des ménagers. Il apparaît 5 fois sur 5 lorsque ce parti est au pouvoir, de 1766 à 1770. Consul en 1775 et 1788. Il signe la protestation contre le changement de règlement, qui, en 1770, donne avantage au camp bourgeois. A la naissance de son fils Augustin, en 1787, il choisit comme parrain Jacques Bourgal, notaire, et comme marraine Rose Moutonier, du parti bourgeois. C’est l’époque où les 2 partis se réconcilient. Juge en 1788, délégué pour les Etats généraux. Non parent avec d’autres Marin et d’autres Baret.
Moustier Ambroise 1774-1844, cultivateur métayer. Condamné à mort en 1799. Habite quartier de la Pousterle.
Moutonier François 1711-1794, notaire, époux d’Anne Car (marraine de la cloche à la bénédiction du nouveau clocher en 1774). Recteur des Pénitents blancs, animateur du parti bourgeois pendant 30 ans, il occupe tour à tour toutes les fonctions municipales importantes, puis il place son gendre Jacques Bourrelly. Il habite rue droite (49-51, rue Puget, N 462-461).
Pélissier Paul 1734-1817, célibataire, instruit, garde en 1789, officier public en 1790. Habite chez son ami, l’instituteur Cézilly, quartier Saint-Sébastien (10, avenue de Toulon, N 566). Son frère Joseph 1730-1805 est ménager, grande bourgade (35, fg de Gueidan, N 305).
Pisset Laurent 1772-1851, artisan, tisseur à toiles. Condamné à mort en 1799. Ses métiers sont à la petite bourgade (n° 18 & 31, rue Kruger, N 366 & 361).
Pontier François. Né en 1739, marié en 1760 à Marie Gras. Ménager instruit, soutien de Louis Car, il est présent sur la scène publique de 1766 à 1790, 5 fois greffier, 2 fois second consul, premier consul en 1787, 2 fois viguier, garde en 89, secrétaire en 90. Il habite 4, avenue de Toulon, N 560. Son fils François sera maire de Gardanne. Sa petite fille sera « la veuve Pontier » qui vendra ses prés pour faire le boulevard de Forbin.
Raynaud Brigitte 1747-1802, accoucheuse. Mariée au ménager Jean Baptiste Bonnicard 1839-1818, grande bourgade (3, faubourg de Gueidan, N 320). Leur fils Martin est bourrelier.
Rémusat Gabriel 1750-1818, né à Pourrières, marié à Gardanne en 1774 à Marie Portalier, garçon boulanger. Fervent partisan des idées nouvelles, il fait équipe avec Paul Laurin. Parent par les mères de Jacques Bourrelly, il en est l’adjoint à l’élection de 1790. Habite rue droite (n° 65, rue Puget, N 449). Son père, Théophile Rémusat, est condamné à mort en 1799 et gracié. Son frère Jean Baptiste, cordonnier, est dans la garde n° 1 de 1789. Honoré 1795-1813, fils de Jean Baptiste mourra dans les guerres napoléoniennes. Habite rue de Non passe (n° 27 rue Viala, N 482).
Vaussan Antoine 1744-1833. Riche négociant, comme son père et ses frères, marié en 1772 à Marie Anne Bernard et habitant faubourg Saint-Baudile (1, rue Jules Ferry, N 628). Premier Consul en 1789, citoyen le plus actif pour préparer les cahiers de doléances, les élections, la garde bourgeoise. Soupçonné à Aix d’accaparer du blé, il ne trouve aucun soutien à Gardanne et rentre dans le rang dès 1790. Il donne l’impression d’être à la pointe des idées de 89, mais d’être en marge du clientélisme gardannais, cherchant une troisième voie entre bourgeois et ménagers. Son frère Joseph 1756-1824, négociant marié à Thérèse Bernard, habite place Saint-Sébastien, N 549, maison détruite à l’ouverture du Cours. Son autre frère, François, habite la belle maison place de l’hôtel de ville (11, Cours de la République, N 83). Son fils Louis Antoine 1779-1848 est fabricant d’eau de vie, la Planque, N 657.
Viou Paul 1712-1781. Famille des maçons habitant la pousterle (1, impasse Roux, N 195) constructeurs de maisons chemin d’Aix (rue de François), participant à l’agrandissement de l’église. Paul est marié à la nièce de Moutonier, membre des Pénitents blancs, premier consul en 1761, viguier en 1762, un pilier du parti bourgeois. Son cousin François, maçon et du même parti, a une continuité dans ses enfants : Pierre 1738-1811 est greffier, secrétaire du juge de paix, notable en 1789. Il habite quartier Saint-Sébastien, maison détruite à l’ouverture du cours, N 550. Jean François 1754-1810 est maçon et garde municipal en 1789.
Références
1 Institutions communales et élites municipales, Gardanne 1758-1790, Eric Lebreux,
Mémoire de maîtrise d’histoire, faculté d’Aix, 1992. (M)
2 Histoire de la Révolution. C. Lourde. Laffitte. Marseille. 1974. (M)
3 Les horizons de la liberté, Monique Cubells, Edisud, Aix 1987 (M)
4 Histoire de Marseille, Raoul Busquet, Robert Laffont, Paris 1945.
5 Histoire de la Provence, François-Xavier Emmanuelli, Hachette, 1980.
800 adultes qui vécurent la Révolution
Amalbert François © 1743-1805, époux Anne Bernard, chemin de Marseille
Amalbert J Jques © 1753-1818, époux Marie Lion, che. de Marseille, 9, rue Jean Jaurès, N 289
Amalbert Laurent © 1728-1799, époux Rose Costabel, 9, rue Jean Jaurès, N 289
Amalbert Valentin © 1727-1818, époux Anne Astier, petite bourgade, 7, rue Kruger, N 330
André Jeanne 1758-1836, épouse Pierre Sias, rue Cassarat
Amic François 1740-1806, chirurgien, rue des Fabres
Amphoux Jean © 1748-1814, époux Catherine Jullien, quartier du Pontet
Armand Félix 1760-1836, époux Rose Roux, domaine de Valabre, Rambert
Astier Laurent © 1746-1826, Valabre, (hameau des Astier, N 22)
Astier Joseph 1753-1830, tuilier, Valabre (hameau des Astier, N 22)
Astier Marie 1741-1719, épouse Joseph Convert, Valabre
Astier Marie 1723-1798, épouse Jean Bte Vespier, rue Contendalle (18, rue Mirabeau, N 30)
Augier Elisabeth 1744-1825, épouse Etienne Avon, rue de l’ancien hôpital
Augier Euphrosine 1761-1837, épouse Louis Montanard, rue droite
Avon Etienne dit Cancale © 1756-1829, près de l’église (7, N 133)
Avon Françoise 1744-1820, épouse Pierre Raynaud, la Rabassière, N 546.
Leur fils Jean Louis meurt soldat en 1809.
Meurt soldat en 1809 Jean Pascal Feltin, né à Gardanne.
Avon Marie, 1746-1821, épouse Joseph Moustier, rue de la Chapelle (10, N386)
Baret Antoine 1717-1797 x Anne Liency, rue droite (rue Puget maison détruite, N 518).
Son fils Joseph 1747-1832 x (1784) Catherine Bourrelly,
Son fils Antoine 1753- x (1792) Thérèse Pélissier, ménager,
Sa fille Thérèse x (1784) Louis Bernard, bourgeois, rue de la chapelle
Baret François x (1714) Louise Reynier, petite bourgade
Son fils Antoine 1725-1801 x (1751) Claire Grognard. Antoine devenu veuf épouse en
1793 Marguerite Baret, de Louis et Thérèse Signoret. Elle a 44 ans de moins que lui !
Jean, frère de François, négociant x (1726) Anne Gras, veuf + (1738) Elisabeth Vadon,
fait construire sa maison rue droite (35, rue Puget, N 537).
François, fils de Jean 1731-1813 x (1758) Marianne Lion. Du parti bourgeois
Sa fille Catherine 1760-1837 x (1789) Pierre Car, officier public,
Son fils Paul dit Biscot 1773-1837 x Rose Bourrelly, fille de Jacques Bourrelly, maire. Baret Baret Joseph 1745-1820 fournier x Marie Bouteillon la Pousterle (15, rue Pasteur, N 164).
Son fils Joseph 1770-1856 x (1807) Marie Baudoin (15, rue Pasteur, N 164).
Son fils Louis 1774-1862 dit Couine x Rose Amalbert au 16.
François 1746-1811, frère de Joseph, reste célibataire et habite chez Joseph.
Antoine 1755-1813, frère de Joseph, travailleur x (1784) Elisabeth Reynier, porte de Trets.
Baret Joseph 1773-1857 dit l’Amandier, travailleur x (1795) Anne Rossignol, St-Sébast N 562
Baret Joseph © 1765-1804, époux Geneviève Fabre
Baret Martin travailleur x (1762) Marianne Sauze, Portalet, (passage Bara (0, N 504).
Son fils Louis 1769-1810 x (1801) Claire Bonnicard (un ascendant loue à Cézanne)
Sa fille Madeleine 1771-1821 x Jean Louis Car
Son fils Jean Joseph 1775-1842 x (1806) Thérèse Constans
Son fils Sébastien 1783- x veuf (1815) Madeleine Décome.
Barrière Jph 1742-1808, meunier, époux Marie Sias, chez J Baudoin, rue droite (46, N 484)
Barthélemy Jean © 1720-1800, époux Thérèse Deloute
Barthélemy Justine 1764-1798, épouse Jean Robin, faubourg Saint Sébastien
Baudoin Antoine © 1722- 1820, époux Catherine Rossignol, Payannet (N 628)
Baudoin Elisabeth 1740-1809, épouse Joseph Vaussan tisserand, rue droite (17, N 532)
Baudoin Joseph © 1732-1812, époux Elisabeth Cadenel, grande bourgade
Baudoin Louis © 1730-1805, chemin de Marseille
Bayle Paul 1737-1799, moine, né à Seyne, presbytère, rue du champ de mars
Bernard Louis, 1757-1832, notable x (1784) Thérèse Baret, rue de la chapelle, 2-4, N 389-90.
Bernard Jean Baptiste, gros ménager x (1734) Jeanne Deloute en 1734.
Sa fille Marie Anne x (1765) François Amalbert, gros ménager
Sa fille Anne x (1772) Antoine Vaussan, premier consul en 1789, gros ménager.
Sa fille Thérèse x (1777) Joseph Vaussan frère d’Antoine, gros ménager.
Bernard Joseph © 1760-1835, époux Thérèse Figuière, rue de la Chapelle (11, N 419)
Bernard Madeleine 1735-1795, épouse Jean Joseph Chabert, le Cativau
Bernard Pierre 1764-1810 x (1783) Madeleine Blanc, rue de l’hôpital, (10, Accord, N 396)
Blanc Antoine, époux en 1771 de Marie Michel
Leur fils Jean Joseph meurt soldat à la bataille d’Essling en 1809.
Blanc François © 1734-1813, époux Marie Lure, place de l’H de V, 1, rue Suffren, N 548
Blanc Jean Bte © 1760-1835, époux Marie Marin, chemin de Mimet, ED, rue Borély, N 1173
Blanc Joseph 1751-1811, époux Marguerite Honorat, rue droite (0, 517)
Blanc Marg, de l’hôpital de Marseille, épouse Jean Deleuil, Non Passe, 14, rue Viala, N 427
Blanc Marianne 1756-1829, Fontaine du roi
Blanc Marie 1746-1826, épouse Bonfillon, Non passe
Blanc Pierre © 1719-1804, époux Marie Chave, chemin de Trets
Bonnicard Catherine 1763-1828, épouse Guien, faubourg de Trets
Bonnicard jean Baptiste, époux Brigitte Raynaud sage femme, grande bourgade, (3, N 330)
Leur fils Pierre Bonnicard, 1786-1811, mort du tétanos à l’hôpital de Groningue
Bonsignour Jean Bte 1769-1835, époux Marie Anne Baudoin, grande bourgade, (28, N 345)
Bonsignour Marguerite 1756-1824, épouse Honoré Chabert 8, rue des Fabres (N 56)
Bonsignour Toussaint 1744-1816, époux Marie Car
Borély Marc Antoine 1759-1821, avocat et juge de paix du canton, l’Enclose (N 60)
Bourdon Marie 1740-1717, épouse Gaspard Jean, ferme Marion, Valabre
Bourrellon Charles © 1761-1823, quartier de Mazargues (N 757)
Bourrellon Jacques © 1772-1836, époux Elisabeth Derrissard, Mazargues (N 757)
Bourrelly Marie 1750-1825, épouse Joseph Avon, la Crémade N 484-86
Bourgal Elisabeth 1741-1813, épouse Jean François Bourrelly, rue de l’église
Bourgal Madeleine 1755-1837, célibataire, rue montant à l’église, 16, rue Suffren, N 409
Bourgal Marie 1752-1826, célibataire, rue montant à l’église, 16, rue Suffren, N 409
Bourgal Marie Rose 1763-1836, épouse Paul Signoret notaire, chemin de Fort
Bourdel Paul © 1748-1823, époux Marg. Ricard, rue montant à l’église (1, Cadenel, N 405)
Bourtin Jph 1727-1818, tonnelier, époux Elisabeth Lion, fg St Sébastien, 4, rue Borély, N 562
Bourtin Marie 1745-1829, épouse Joseph Marin, notaire, chemin d’Aix
Bourtin Marianne 1757-1829, épouse Pierre Achard 1753-
Bourrelly Jean-Joseph © 1690-1770 x Claire Baret, St Roch (avenue de Nice, N 1115)
Son fils Jean-Joseph © 1768-1826 x Catherine Car (N 1115, ferme plus tard dite Chave)
Son fils Jean-François © 1770-1854 + Marianne Marin (N 1115)
Bourrelly Joseph dit Verdillon © x Madeleine Pontier
Son fils Jean © x (1742) Marie Anne Poussel,
Son fils Jean-Joseph © x (1733) Marie Deleuil
Joseph © 1745- fils de Jean-Joseph + (1769) Anne Gras
Bourrelly Jacques x Jeanne Vaussan
Son fils Toussaint x (1729) Claire Roux, rue droite (51, rue Puget, N 144).
Marie, fille de Toussaint x Paul Viou 1712-1781 du parti bourgeois
Jacques 1735-1810, fils de Toussaint, avoué, x (1757) Rose Claire Moutonier
Jacques, fils de Jacques 1758-1793, notaire, x Madeleine Car, petite bourgade.
Augustin, fils de Jacques, 1766-1833 x Marianne Bourrelly, rue droite (51, rue Puget, N 144).
Rose, fille de Jacques x Paul Baret dit Biscot.
Bourrelly Jean Joseph, marchand x (1733) Marie Deleuil, grande bourgade, (43, N 296)
Son fils Joseph 1745- x (1769) Anne Gras,
Marie Anne fille de Joseph 1771-1816 x Augustin Bourrelly, fils de Jacques.
Bourrelly Madeleine 1758-1805, épouse Antoine Ethin, chemin de Marseille
Lazare Bourrelly, né à Gardanne, meurt soldat en 1813.
Bouteillon Jean Baptiste © 1755-1826, au cul de sac de la rue des Fabres (au 4, N 54)
Bouteillon Jph © 1758-1818, époux Claire Fabre, rue de la Pourterle, 1, rue Franklin, N 178
Boyer Antoine © 1747-1807, époux Thérèse Car, grande bourgade
Brémondy Jacques © 1761-1825, époux Rose Magère, Rambert
Brun Marie 1731-1811, épouse Jean Prioulet, faubourg de la porte d’Aix
Burle Françoise 1719-1804, épouse Mitre Amalbert
Cadenel Joseph © 1739-1802, fils de François et Marguerite Maurel, Cassarat
Caillol François © 1757-1835, pl de l’hôtel de ville (3, pl Ferrer, N 83), qu’il a faite construire
Caillol Jacques © 1770-1800, époux Rose Finaud
Caillol Jean Baptiste © 1747-1795, époux Marie Paul, quartier Saint Roch
Caillol Joseph © 1746-1827, rue montant à l’église
Capus André © 1739-1816, époux Anne Lion, rue de l’hôpital,
Capus Jean Honoré © 1753-1825, époux Marguerite Pontier, les Aires
Capus Jean Joseph © 1731-1795, époux Françoise Escoffier, chemin de Mimet N 1380
Capus Marie 1715-1797, épouse Joseph Avon, grande bourgade
Capus Mathieu © 1740-1813, époux Anne Gras, faubourg de Trets, la Bonne Personne
Capus Mathieu 1766-1837, époux Rose Viou, grande bourgade
Capus Pierre © 1757-1825, époux Marie Anne Poussel, quartier Saint Sébastien
Capus Thérèse 1750-1837, épouse Pierre Escoffier, quartier du vieil hôpital
Car Antoine + (1762) Madeleine Lion
Son fils Laurent © 1766- + (1795) Marie Madeleine Astier, rue droite.
Car Jean1710-1794 © x Madeleine Samat quartier de la Gardy
Son fils Jean Joseph © x (1761) Jeanne Montanard, ferme N 1256.
Car Esprit x Anne Guigou
Son fils Jean © x (1785) Marguerite Convert, rue droite (48, rue Puget, N 484). Le petit fils de Jean sera Lazare Car 1830-1906, bourrelier, cours de la République, avant les Arnaud.
Son fils Jean Baptiste © x (1749) Marie Deleuil, rue de la chapelle (1, N 411)
Son fils Pierre © x (1781) Marguerite Bourrelly, même adresse
Car Jean Baptiste © x (1763) Marie Fabre, rue Cavillon (1, rue Ledru-Rollin, N 58).
Son fils Jacques © 1763- x (1792) Elisabeth Bonsignour, ascendant de Félix Car ©.
Son fils Jacques © 1733-1803 x (1767) Anne Reynier,
Joseph fils de Jacques © x (1793) Marie Courdurier, quartier Saint-Baudile (N 1451).
Car Joseph 1749- x (1774) Marie Viou, rue droite (rue Puget maison détruite N 517)
Son fils Laurent © 1766- dit Moutonnet, x (1795) Marie Mad. Astier, même adresse
Car Joseph 1714 © x (1744) Marguerite Roubaud
Son fils Joseph 1749- x (1774) Marie Viou.
Leur fils Jean Baptiste 1778-1807 meurt soldat à Berlin
Son fils Pierre officier civil x (1789) Catherine Baret, rue droite (0, N 519).
Joseph dit Coute, fils de Pierre Car maire, x Rose Guien (18, rue Borély, N 577)
Car Pierre © x (1728) Catherine Pélissier
Son fils Louis © 1730-1806 x (1751) Marie Anne Gras, (80, route blanche, N 1981)
Son fils Joseph © x (1778) Marie Montanard,
Son fils Paul © x (1754) Marie Anne Lion.
Louis 1745-1814, cousin germain de Louis, x (1784) Madeleine Caillol, lice Saint-Pierre (61, rue Puget, N 454) donne Etienne Car est dit la Boute, qui donne Louis tailleur de pierres
Car Madeleine 1764-1800, épouse Paul Nicolas
Car Marie 1742-1823, épouse Toussaint Bonsignour, Font venelle
Cariès Simon © 1737-1719, époux Rose Amphoux, le Ribas
Chabaud Claire 1746-1794, épouse François Baret
Chabert Catherine 1727-1793, épouse Samat, à Souspire
Chabert Jean © 1744-1830, époux Marguerite Ganache, Colle vieille
Chabert Jean Joseph © 1736-1805, époux Marguerite Derbe, Paillanet
Chape Marie 1751-1810, épouse Etienne Deleuil, Cauvet, résidence la Savine, N 587
Chaud Elisabeth, 1712-1796, célibataire, rue de Non passe
Chaudoin Catherine 1738-1800, épouse Joseph Girard
Chaudoin Marie 1742-1814, épouse André Astier tuilier, rue de l’église
Chave Anne 1731-1807, épouse Nicolas Troin forgeron, portail de Trets
Chave Jean © 1742-1799, chemin de Marseille
Chave Joseph © 1770-1837, époux Madeleine Cavalier, au pont neuf
Chave Madeleine 1740-1815, épouse Paul Derrissard, les Pradous, Saint André
Chave Madeleine 1764-1824, épouse Etienne Courdurier, petite bourgade
Chave Marguerite 1761-1836, épouse Louis Bernard notaire, 11, rue de la chapelle, N 419
Cheylan Claire 1719-1815, épouse André Deleuil, bastide quartier Rambert (N 189 ?)
Cheylan Laurent © 1756-1811, époux Marie Vachier, le Cativel N 896
Clastrier Benoît 1749-1795 fougonier, époux Marie Bourtin, rue du Fort
Clastrier Louis © 1736-1812, époux Thérèse Pélenc, faubourg de la porte d’Aix
Convert Claire 1723-1793, épouse Thomas Deleuil, rue de Non passe
Convert Guillaume © 1726-1800, époux Madeleine Pontier
Convert Joseph © 1747-1820, époux Marie Anne Michel, Payannet
Constans Jeanne 1762-1804, épouse Antoine Audibert, les Molx
Constans Marie 1751-1821, épouse Joseph Marin, la Bonde
Constans Maximin © 1752-1815, épouse Marianne Audibert, rue de la chapelle (0, N 435)
Courdurier André 1760-1810 charretier, époux Thérèse Brunache, place de l’hôtel de ville
Courdurier Jacques © 1753-1835, époux Marg. Deleuil, pl de la fontaine, 9, rue Suffren, N 523
Courdurier Jean © 1762-1841, époux Marie Barthélemy, 4, rue de l’Accord, N 393
Courdurier Jean Bte © 1723-1799, époux Thé. Deleuil, rue de Trets, 4, rue de l’Accord, N 393
Courdurier Jean Joseph © 1715-1795, époux Marie Amalbert, rue droite (0, 491)
Courdurier Marie 1770-1835, épouse Jph Car receveur, pl hôtel de ville, 12, pl Ferrer, N 102
Courdurier Marie Anne 1759-1837, épouse Joseph Lombard, rue droite, 1-3 rue Puget, N 528
Deleuil Catherine 1735-1805, épouse Joseph Reynier, la Palun
Deleuil Louis 1756-1837, époux Madeleine Mouret, rue de Cassarat
Deleuil Jacques Deleuil © 1743-<1801 x (1766) Marguerite Marin - <1802
Son fils Jean Bte © 1769-1831 x (1799) Adélaïde Bourtin, rue Non passe (8, N 420)
Son fils Louis © 1779-1858 x (1802) Thérèse Etienne, rue étroite (2, place Ferrer, N 93).
Germain Deleuil, frère de Jacques, 1738-1794 © x Rose Bourrellon
Son fils Jacques © 1774-1838, quartier du Claou
Son fils Jean Baptiste © 1769- x Marie Jourdan, camp Jusiou (N 115)
Son fils François 1752- ©, rue du petit faubourg (29, rue Kruger, N 362)
Deleuil Joseph dit Jouques © 1726-1806 x Madeleine Julien 1728-1793 les Molx
Son fils Jean Pierre © 1744-1814 (lotissement Colle vieille N 184)
Son fils Jean-Joseph 1758-1776, trouvé noyé dans l’écluse du moulin Barièle
Son fils Louis 1766-1837 dit Jouques x (1894) Madeleine Baudoin 1769-.
Son fils André 1756-1809 © x (1793) Anne Sardou, rue droite
Deleuil Jean-Joseph © 1716-1793 + (1745) Thérèse Derrissard 1717-1777
Son fils Thomas © 1741-1807 + (1776) Mad. Julien, Non Passe (8, rue Viala N 420)
Son fils Louis 1752-1812, bastié x (1780) Madeleine Bonnicard, 11 enfants, (grande bourgade, 9, fg de Gueidan, N 317)
Son fils Pierre dit Paton, 1785-1815 disparu soldat x Thérèse Frégier, rue droite, 22, N 505
Son fils Jean 1759- © x (1796) Marie Anne Fouque, rue droite (56, rue Puget, N 479).
Jean-Joseph 1742- x Madeleine Galon grande bourgade.
Son fils Laurent 1769-1838 x (1806) Marie Mad Avon 1790- la Crémade, N 484 à 486.
Son fils Joseph 1773- x (1799) Marianne Bourrelly 1775-
Son fils Louis 1777- x (1810) Elisabeth Olive de Marseille .
Antoine, frère de J. J., 1744- 1794 x Marie Michel, rue Contendalle (10-13, Mirabeau, N 33) Jean, cousin germain, 1721-1796 x Marguerite Blanc, rue de Non Passe, 14, rue Viala, N 427)
Son fils Jean-Louis 1758-1811 x Rose Sibille.
François, cousin germain, 1754- dit Ciré x (1784) Marianne Depousier, petite bourgade
François 1769- ménager dit Manoï x (1786) Marie Bourrelly, rue de la chapelle (9, N 418)
Deleuil Paul 1721-1794 maçon, du parti des ménagers x (1757) Catherine Lambert
Son frère Sauveur 1724-1796 maçon, du parti des ménagers x (1748) Marie Julien
Son frère Jean Jacques 1714 maçon, du parti des ménagers x (1743) Madeleine Lombard
Son frère Jean Pierre + Marie Anne Pélissier, rue droite.
Joseph Pascal fils de Paul 1769-1836 + (1796) Rose Car 1757-
Jean Joseph fils de Paul 1758- + (1796) Marie Fouque
André fils de Sauveur 1756-1809, maçon + Anne Sardou
Joseph fils de Sauveur 1753-1823, maçon + (1777) Catherine Gras
Jacques, fils de Sauveur, maçon + (1777) Thérèse Catherine Capus, St-Séb, 0, N 559.
Leur fils Jean Bte 1790-1811 meurt soldat à la guerre.
Nicolas fils de Jacques, dit Nas 1780-1850 maître maçon + (1812) Julienne Long. Nicolas construit l’hospice en 1830. Il habite St-Sébastien (15-17, rue Borély, N 76 et 75).
Jean-Joseph, fils de Sauveur, 1758-1793 x Madeleine Monnier
Henri fils de Sauveur, 1755-1832, maçon x Marie Suzanne Maurin, sage-femme
Jean-Jacques, fils de Sauveur, 1714- maçon x Madeleine Lombard
Jean-Joseph, fils de Jean Jacques 1758-1793 maçon, quartier saint Roch
Jean Pierre, fils de Jean Jacques 1753-1831 x (1782) Marie Anne Pélissier, rue droite
Jacques Philippe, fils de Jean Jacques 1756 x Thérèse Deleuil
Deleuil Jean Joseph © 1738-1803 dit Méiou x Françoise Bernard -1826
Louis Deleuil, son frère © 1743-1803 dit Méiou x (1775) Elisabeth Bourrelly, bastide de Payannet, dite Deleuil N 576
Louis, cousin, 1756-1837 © dit Méiou x Mad. Mouret, rue Cassarat (4, pl de la mairie, N 53)
Deleuil Joseph 1741 © x (1773) Anne Deleuil 1745-1774. Font de Garach N 1285
Son fils Jean-Baptiste 1743-1803 dit bèu l’aigo © + (1763) Anne Deleuil 1739-1821
Jean-Joseph, frère de Joseph 1710- © x Thérèse Ricard
Son fils Thomas 1741- + Madeleine Sibille
Son fils Louis 1753- + Antoinette Bourrelly
Deleuil Joseph 1723-1794 x Jeanne Dufrène,
Son fils Barthmy 1754-1800 dit Chevalier + Eth Deleuil 1758-1795, 18, Non passe, N 421
Deleuil Roch 1720 x Anne Gras, soutien de Louis Car et d’Antoine Vaussan
Son fils Bernard 1752- < 1803 x (1772) Marie Anne Vitalis
Son fils Pierre Joseph 1747- x Anne Paul
Son cousin, Joseph 1746-1807 x (1769) Elisabeth Bourtin 1749, la Plaine, N 974
Antoine Deleuil, cousin germain, © 1738- x Marguerite Lancelot
Son fils Jean-Louis 1766-1836 © x Marguerite Reboul.
Deleuil Mathieu dit Verdillon © + Rose Sauze Verdillon II, N 729
Son fils Etienne 1746-1810 dit Verdillon © x Marie Chape 1748-1810, N 729
Mathieu fils d’Etienne 1775-1861 dit Verdillon © + Catherine Ricard, ferme Cauvet N 987.
Demolinier Anne 1758-1804, épouse Pierre Julien
Derbe Antoine © 1744-1818, époux Anne Marin, rue du Fort
Derbe Thomas © 1738-1808, époux Marianne Sias, petite bourgade
Derrissard Mitre © 1739-1811, époux Claire Convert, le Pradet (St André)
Escoffier Antoine © 1735-1815, époux Catherine Bourtin, rue du Fort
Escoffier Pierre © 1736-1829, rue de l’hôpital
Fabre Anne 1763-1837, épouse Joseph Vespier, rue de l’ancien hôpital
Fabre Madeleine, 1772-1824, épouse Jean Baptiste Samat, chemin de Marseille
Fabre Marie 1748-1793, épouse Jean Joseph Escoffier, le Cativau
Ferenc Pierre 1749-1821, maçon, rue de l’hôpital
Figuière Marguerite 1761-1836, épouse Joseph Besson , rue de la Chapelle
Finaud Antoine 1769-1837 notaire, époux Rose Car, rue de l’église
Finaud Joseph © 1756-1826, huissier, garde en 89 x Anne Bourdel, rue montant à l’église. Leur fils Martin, né en 1779, meurt soldat à la guerre en 1814.
Finaud Louis © 1763-1811, époux Marie Gras, rue allant à l’église
Fournier Jean © 1716-1795, célibataire, rue allant à l’hôpital, 0, N 50
Fournier Louis © 1730-1809, époux Marie Burle, rue Cassarat
Gal Roch © 1750-1825, époux Marianne Barlatier, le Montaiguet
Galon Madeleine 1745-1800, épouse Joseph Deleuil
Gaillard Madeleine 1725-1795, épouse Jean Louis Ricard, tuilier, Valabre
Geneston Jean Louis © 1740-1815, époux Marie Viou, la Palun (Jean de Bouc N 1329)
Girard Joseph © 1737-1805, époux Catherine Chaudoin, grande bourgade
Giraud Jean Pierre 1734-1796, fournier, époux Marie Bourrelly, rue de Cavillon
Gras Barthélemy d’Antoine © 1764-1807, chemin de Marseille
Gras Honoré © 1752-1830, garde en 89, quartier St Sébastien, 1, bd de Forbin, N 554
Gras Jacques 1752-1810 tuilier, épouse Louise Leydet, faubourg allant à Aix
Gras Joseph © dit Gelé 1750-1799, quartier Saint-Pierre (Notre Dame, N 163)
Gras Joseph 1767-1837, époux Madeleine Bonneau, rue de la Chapelle
Gras Joseph © 1751-1827 au cul de sac de la rue des Fabres, au 4, N 54
Gras Joseph © 1730-1816, époux Jeanne Imbert, la grande aire, 31, rue Borély, N 57-58
Gras Louis 1731-1820, épouse Catherine Aureille, rue droite
Gras Marie 1767-1837, épouse Louis Finaud, chemin d’Aix
Gras Marie 1725-1795, épouse Jean Jacques Guien, quartier Saint Roch
Gras Marie 1756-1825, épouse Jean Joseph Barthélemy, rue droite
Gras Mathieu © 1760-1811, époux Anne Ollivier, Rambert
Gras Thérèse 1735-1805, épouse Claude Viou, rue de Cavillon
Grognard Jean André 1753-1825, époux Thérèse Poussel, faubourg d’Aix
Grognard Joseph 1746-1812, époux Rose Marin, rue droite (46, 485)
Gouirand Jean © 1726-1796, célibataire, petite bourgade
Goujon Elisabeth 1720-1800, épouse François Vaussan
Guien Pierre © 1754-1824, époux Catherine Bonnicard, faubourg de Trets
Honoré Marie 1727-1803, épouse François Sauze, rue des Fabres
Hugues Dominique © 1746-1806, époux Marie Gras, St-Sébastien, 2, rue Borély, N 563
Hugues Joseph © 1752-1794, époux Elisabeth Caillol, quartier Saint Sébastien
Hugues Pierre © 1739-1807, époux Elisabeth Ricard, rue de la Chapelle (6, N 388)
Icard Jean Baptiste 1749-1829, menuisier, Saint Sébastien, 4, rue Borély, N 564
Icard Pierre © 1710-1800, époux Thérèse Blanc
Imbert Joseph 1760-1830, meunier, époux Cathine Michel, Cassarat (10, place Ferrer, N 101)
Isoard Honoré © 1762-1812, époux Thérèse Blanc, petite bourgade
Jauffret Guillaume 1749-1813, tuilier, époux Marie Louise Richaud, Valabre
Jauffret Jean-Baptiste 1738-1808, boulanger, époux Rose Astier, rue droite (16, N 510)
Julien François © 1716-1799, quartier de la Pousterle (Brutus) (17, rue Pasteur, N 163)
Julien Honoré © 1751-1821, époux Jeanne Biou, la Palun (Jean de Bouc N 1328)
Lagière Jean 1736-1826, tailleur de pierres, mort à l’hospice
Laugier Joseph 1764-1820 de la Bastide de Jourdan, berger de Henri Bourrelly
Laugier Raymond © 1743-1809 époux Catherine Jullien, faubourg Saint-Roch
Laurin Mathieu 1737-1785, ménager x (1758) Madeleine Amalbert, fonde l’auberge de la
Lèbré (du Lièvre, 2-4, place Gambetta, N 352-353)
Son fils Paul Laurin 1763-1820 dit Galant, aubergiste x (1788) Madeleine Bourrelly
Son fils Denis 1767-1847 © aubergiste x (1794) Marie Anne Amalbert
Son cousin Vincent Laurin © x (1726) Elisabeth Rouvier (1726)
Joseph, fils de Vincent 1738-1805, fripier, x (1760) Anne Jean, rue de Non passe.
Louis, fils de Vincent © x (1767) Madeleine Marin, quartier Saint-Roch
Guillaume, fils de Vincent 1747 © x (1769) Madeleine Amalbert, grande bourgade
Pierre, fils de Vincent © x (1775) Marie Anne Lombard
Laurin Paul © 1769-1856 x Rose Pinatel, petit faubourg (14, rue Pasteur, N 162).
Lichel Marie 1748-1795, épouse Antoine Deleuil, rue Cassarat
Liency Jean Joseph © 1747-1799, chemin de Marseille
Liency Joseph © 1754-1829, grande bourgade
Liency Marie 1750-1826, épouse Pierre Chave, grande bourgade
Liency Valentin © 1751-1796, garde 89, époux Marguerite Marin, rue de l’église
Joseph Liency 1790-1811 meurt soldat à la guerre.
Lion Elisabeth 1748-1820, épouse Bourtin, chemin de Mimet
Lion François © 1729-1799, rue Fraternité
Lion Gaspard 1760-1828, meunier, moulin de Fort
Lion Guillaume © 1716-1798, époux Thérèse Amalbert
Lion Marie 1762-1836, épouse Jean Sauze, chemin d’Aix
Lion Marie Anne 1765-1737, épouse Joseph Courdurier, grande bourgade
Lion Rose 1755-1811, épouse Joseph Mauffret © , rue des Fabres
Lure Louis © 1750-1795, époux Catherine Chabert, grande bourgade
Marguailler Madeleine 1732-1814, épouse Jean Louis Vadon, quartier de Roman
Marin Claire1749-1804, épouse Raymond Bourdel, rue des Fabres
Marin Gaspard © 1714-1797, époux Marie Grognard
Marin Marie 1737-1803, épouse Jean Joseph Poussel, Payannet
Marin Pierre, époux Marie Bourrelly
Leur fils Joseph, né en 1788, meurt soldat en 1811.
Un autre Marin, Jean Joseph, meurt soldat en 1809.
Marin Joseph dit l’Agnéou 1726-1784 x (1750) Françoise Chabert 1725, avec Louis Car,
Son fils Joseph 1765-1835 dit l’Agnéou x Madeleine Amalbert, avec Louis Car.
Joseph Godefroy de Joseph 1787-1869, perruquier, petite bourgade (5, N 324).
Balthazar frère de Joseph 1813 x (1758) Marianne Amalbert, avec Louis Car,
Son fils François 1773-1815 x Marie Convert, gd bourgade, 16, fg de Gueidan, N 335
Marin Joseph 1748-1826 © x (1773) Marie Bourtin, ferme dite Pater, chemin d’Aix N 341.
Alexandre, frère de Jph 1746- © x (1772) Thérèse Liency, St-Michel 23, rue J Jaurès, N 269
Marin Joseph 1738-1793 négociant, x (1772) Marie Baret. Fils de Gaspard, fg St Sébastien.
Marin Joseph, charbonnier, métayer à Verdillon I, né à la Diote.
Marin Joseph 1755- © x (1777) Thérèse Courdurier, petit faubourg.
Marin Joseph travailleur, x (1757) Marguerite Fabre, grande bourgade.
Marin Pierre 1759- dit Goï, travailleur x Marie Bourrelly, rue du Fort, 0, N 143.
Maunier Joseph © 1752-1808, époux Jeanne Marin, rue Cassarat
Maurel Antoine © < -1793 x (1762) Elisabeth Michel
Maurel Chriphe © 1733-1809, époux Cath. Riboulet, rue Contendalle (14/16, Mirabeau, N 32/31)
Maurel Pierre © revendeur 1759-1821 x Marie Bonsignour, rue Contendalle (16, N 31).
Son frère Maurel Raymond 1766-1851 © x (1794) Marie Car 1769 (14, N 32).
Jean, fils de Raymond, dit Besson, Porte de Trets (27, rue de l’Accord, N 118), père de Ferdinand Maurel 1828 et grand-père d’Agricol 1852
Maurin Marie 1764-1827, épouse Henri Deleuil grande bourgade
Michel François © 1750-1814, époux Claire Car, quartier de Veline
Montanard Joseph © 1753-1799, époux Françoise Rougier, che de Mar. (43, rue J Jaurès, N 257)
Montanard Madeleine 1735-1809, épouse Jean Joseph Car, grande bourgade
Montanard Madeleine 1741-1806, épouse François Lion, rue Cassarat
Montanard Marie 1742-1810, épouse Joseph Giraud cordonnier, rue de la Chapelle
Montanard Marie 1755-1825, épouse Pierre Troin, rue de l’hôpital
Montanard © Pierre 1713-1800, époux de Thérèse Car
Montanard Pierre 1756-1837, époux Marie Gras, rue droite
Montanard Roch 1748-1837, époux Elisabeth Marin, les Molx
Montanard Vincent © 1759-1835, époux Marie Deleuil, pte bourgade, 29, rue Kruger, N 362
Mouret Marie 1731-1811, épouse Joseph Pinatel cordonnier, rue de Cavillon
Moustier Jacques © 1756-1816, époux Marie Galon, rue de Non Passe
Nicolas Paul © 1761-1804, époux Madeleine Car
Nicolas Thérèse 1742-1823, épouse François Besson, château de Valabre où sa fille est domestique
Nouveau Jean Joseph © 1762-1825, époux Marie Moustier, Verdillon
Ollivier Guillaume © 1769-1814, époux Thérèse Durin, petite bourgade
Ollivier Jean Baptiste 1735-1795, prêtre, mort chez Joseph Marin 1738-1793
Oulonne Anne 1742-1809, épouse Joseph Liency, faubourg de la porte d’Aix
Oulonne Jean © 1734-1804, époux Catherine Roux, chemin du presbytère
Pélenc Thérèse 1741-1804, épouse Louis Clastrier, l’hôtel de ville
Pelat Jean © 1719-1810, célibataire, près de l’horloge
Pelenc Joseph, époux de Madeleine Blanc
Leur fils Joseph né en 1782 meurt soldat.
Pélissier Antoine © 1744-1823, époux Anne Lion, derrière le ruisseau Saint Pierre
Pélissier Honoré © 1766-1826, les Molx, usine, N 27
Pélissier Joseph © 1731-1805, époux Thérèse Signoret, rue droite (28, N 500)
Pélissier Joseph © 1729-1809, faubourg de la porte d’Aix
Pélissier Joseph © 1765-1835, époux Elisabeth Cavalier, les Molx, usine, N 27
Perrin Jean © 1732-1808, époux Marie Courdurier, rue de la Chapelle
Perrin Jean Pierre 1760-1837, époux Marie Savournin, chemin d’Aix
Perrin Marguerite 1740-1795, épouse Antoine Caire, rue Cassarat
Phillip Anne 1740-1806, épouse Claude Michel, rue de la Chapelle (12, N 385)
Pinatel François © 1762-1810, époux Rose Samat, faubourg allant à Aix
Pinatel Joseph © 1755-1829, chemin de Marseille
Pinatel Joseph 1759-1837, époux Rose Deleuil, saint-Roch
Pizoard Joseph © 1729-1807, époux Catherine Gautier, Verdillon
Pontier Jean © 1734-1804, époux Rose Marin
Pontier Paul © 1742-1819, époux Marie Liency, Font de Garach, N 1431
Pontier François 1737- bourgeois, x (1760) Marie Gras 1743, Saint-Sébastien (N 460)
Son fils Jean François 1766 x (1795) x Jeanne Reynier 1771, rue droite, 30, N 499
Pontier Pierre + (1751) Gabrielle Prioulet,
Son fils Paul 1753 + (1777) Rose Signoret
Son frère Jean Baptiste 1735 © x (1760) Marie Bonnicard, ferme Marion, N 462
Son fils Martin © x (1786) Mad Barthélemy
Son frère Jean Baptiste x (1766) Rose Marin
Son fils Louis 1769 x (1796) Marie Mad Chabert
Portalier Marie 1758-1812, épouse Gabriel Rémusat boulanger, rue droite
Poussel Elisabeth épouse Montanard, rue droite
Prioulet Gabrielle 1730-1794, épouse Pierre Pontier, rue du Fort
Prioulet Paul © 1770-1813, époux Rose Pontier, grande bourgade
Raynaud Louis © 1712-1793 ménager, époux Marie Bronc, la Rabassière, N 544
Son fils Jean Louis Raynaud, voltigeur, mort à l’hôpital de Léopoldstaat en 1809.
Reynaud Jean Joseph 1738-1825, maréchal ferrant, 18, place Ferrer N 104
Son fils Raynaud Jean Joseph 1765-1819, maréchal ferrant, x Mad Martin, idem
Rémusat Gabriel garçon boulanger né en 1750, époux Marie Portalier, rue droite (65, N 449)
Leur fils Honoré meurt soldat à la guerre en 1813.
Reboul Pierre © 1728-1808, époux Marie Anne Rossignol, sa bastide de Payannet
Reynier Etienne © 1739-1799, rue Cassarat (12, rue Cadenel, N 102)
Reynier François © 1731-1811 époux Marie Anne Deleuil, Saint-Sébastien
Reynier Pierre 1734-1809, épouse Rose Bourrelly, la Palun
Ricard Marguerite 1734-1808, épouse Jean Barron, rue du Fort
Roche Victoire 1747-1810, épouse Joseph Orengo, domestique au château de Valabre
Rousset Marie 1763-1813, épouse Jean Joseph Aubray, tailleur de pierres, rue droite
Rouvier Joseph 1752-1830, garde 89, époux Elisabeth Bernard, Les prés
Rossignol Madeleine 1738-1816, épouse Joseph Achard, chemin d’Aix
Rossignol Michel © 1742-1812, époux Marianne Barthélemy, rue de la Chapelle (16, N 382)
Rossignol Simon © 1750-1829, rue de la chapelle (14, N384)
Roux Catherine, épouse Jean Oulonne, Saint-Sébastien
Samat Jean Baptiste © 1740-1829, chemin de Marseille
Samat Joseph, époux en 1779 de Rose Pontier
Leur fils Jean Joseph meurt soldat à la bataille de Wagram en 1809.
Sarde Louis © 1725-1800, époux Anne Barielle, les Molx, N 288 (moulin)
Sauze Madeleine 1724-1809, épouse André Rigaud, Camp Jusiou
Savine Thérèse 1747-1795, épouse François Bourrelly, rue de Cavillon
Sias Pierre © 1759-1804, époux Jeanne André
Sibille Rose 1764-1829, épouse Jean Louis Deleuil, Non passe
Signoret Antoine © 1730-1800, époux Elisabeth Bonsignour
Signoret Antoine, époux en 1785 de Madeleine Derrissard
Leur fils François meurt soldat en 1811.
Signoret Jean Baptiste 1756-1837, époux Madeleine Fabre, mort à l’hospice
Signoret Joseph © 1732-1796, époux Françoise Viou, place de la République
Signoret Madeleine 1737-1809, épouse Jean Audibert, faubourg Daint-Roch
Signoret Thérèse 1735-1815, épouse Louis Baret, chemin d’Aix
Soulier Alexis 1757-1817, meunier, époux Claire Deleuil, rue de Non passe
Suffren Jeanne 1737-1800, épouse Joseph Deleuil
Tavan Laurent 1741-1794, tonnelier chez JBte Bourtin, Saint Sébastien
Troin Joseph 1763-1827, tuilier, les Moulières
Troin Nicolas © 1731-1794, maréchal ferrant, époux Anne Chave, Porte de Trets
Troin Pierre © 1751-1800, époux Marie Montanard
Troin Valentin, époux en 1770 de Rose Deleuil
Leur fils Vincent, fusilier, mort de fièvres à l’hôpital de Toulon le 27 juillet 1811
Turc Louis © 1741-1796, époux Marianne Blanc, rue de la Chapelle
Vachier Marie 1763-1805, épouse Laurent Chailan, le Cativel, N 900
Vachier Pierre © 1764-1827, au Cativel, N 900
Vadon Anne 1755-1835, épouse François Bressier, Milhaud, N 105
Vadon Honoré © 1751-1817, époux Madeleine Deleuil, pte bourgade, 2, pl Gambetta N 352
Vadon Louis © 1723-1793, époux Madeleine Car, petite bourgade, 2, place Gambetta N 352
Vadon Pierre 1759-1837, époux Elisabeth Perrin, époux Marthe Genevier, Souspire
Vaussan Barthélemy 1720-1798, boulanger x Elisabeth Ricard, rue de Cavillon
Son fils Louis Antoine 1751-1821 boulanger x (1774) Thérèse Gautier, Porte de Trets
Son fils Barthélemy 1753-1837 dit La Mole + Marie Bourrelly (8, rue de l’Accord, N 395)
Vaussan Antoine 1744-1833, négociant, consul en 1789 x (1772) Marie Anne Bernard,
Son frère François 1755-, négociant + Marie Anne Blanc, (0, le Cours, N 549).
Son frère Joseph Antoine 1763-1821, boulanger x (1779) Rose Signoret.
Vaussan Joseph 1731-1787 tisserand x (1766) Elisabeth Baudoin, rue droite (17, N 532)
Son fils Joseph 1767-1832 x (1799) Thérèse Honorat.
Vert Joseph © 1751-1827, quartier de Roman
Vidal Barthélemy © 1720-1795, époux Marie Anne Reynier, Milhaud (mijo)
Vincent Marie, épouse de l’ingénieur en hydraulique Gaspard Cast, leur maison de campagne de Camp Jusiou
Viou Anne 1733-1794, épouse Jean François Lion, Colle vieille
Viou Ambroise négociant, époux de dame Catherine Maurel
Viou François 1711-1795 maçon, garde 89, époux Marie Anne Signoret, petite bourgade
Viou François 1764-1810 maçon x Madeleine Deleuil, la Pousterle (1, impasse Roux N 195)
Viou François ©, époux Marie Anne Baudoin, Payannet
Viou Jacques © 1734-1794, époux Catherine Car, 10, rue des Fabres, N 91
Viou Louis 1756-1837, époux Madeleine Mouret, la Palun. Viou Pierre 1759-1837, époux E. Perrin.
Viou Madeleine 1750-1810, épouse Joseph Testanière, rue de Cavillon
Vitalis Rose 1757-1827 épouse Soulier, Non passe
← N 396 (10, rue de l’Accord).
Propriétaire :
Courdurier Antoine 1736-1832, ménager dit Babal.
Locataire : Antoine Bernard x Rose Blanc, leur fils Pierre Bernard 1764-1810 x (1783) Madeleine Blanc de l’Hôtel-Dieu de Marseille.
Antoine Courdurier, petit-fils d’Antoine, né en 1786, fusilier, meurt à l’hôpital de Rennung de Vienne en 1809
Vers LA GRANDE GUERRE
1905. Construction d’une cité ouvrière au petit Verdillon. Le fils d’Ernest Biver lui donne son nom. Construction de l’actuelle mairie. La population atteint 4000 habitants. Jean Jaurès pointe du doigt la montée des nationalismes et les rivalités entre les grandes puissances. Il craint une guerre.
1906. Inauguration de la nouvelle église « dans un écrin de verdure », au milieu des prés. 400 ouvriers travaillent à l’usine (directeur Guenivet). Aux puits de Biver, travaillent 583 mineurs de fond, 223 ouvriers de jour, directeur H. Domage, successeur d’Ernest Biver 1829-1889.
1911. Gardanne a 4800 habitants (dont 239 à Biver). Le nombre de mobilisables augmente, même si les étrangers ne sont pas concernés. Multiplication des incidents entre la France et l’Allemagne. Jaurès prêche pour une armée défensive, faite de milices, entraînée dans le monde civil, liée à la nation, semblable à ce qui se fait aujourd’hui en Suisse.
1912. Guerres dans les Balkans. La Turquie s’effondre et s’allie à l’Allemagne pour faire face à l’alliance France/Royaume Uni/Russie. Les Syndicats et leurs sections internationales voient arriver la guerre et préparent le refus d’obéir (Jaurès est le leader de ces pacifistes). 2500 individus sont fichés et doivent être arrêtés au moment adéquat, mais l’assassinat de Jaurès supprimera le problème.
1913. Le service militaire passe de 2 à 3 ans (loi Emile Driant). Montée du nationalisme.
1914. Fin de la guerre des Balkans. Succès socialiste aux élections. Mais l’attentat de Sarajevo, le 28 juin, remet tout en cause (l’héritier du trône d’Autriche est assassiné). Mobilisation générale russe (30 juillet). Jaurès assassiné (30 juillet). Le 1er août, l’ordre de mobilisation générale est lancé. Syndicats et socialistes sont dépassés et ne donnent aucune orientation.
A Gardanne le tocsin sonne peu après 16 h. Marius Viou, appariteur, passe avec le tambour. Une affiche est collée à la gendarmerie, boulevard Carnot. Le livret militaire dit ce qu’il faut faire : Se rendre le lendemain matin à la gare, avec des provisions. Après un moment de stupeur, la population accepte de faire son devoir, et espère une mobilisation sans guerre. On est en plein battage des blés. Des appelés travaillent toute la nuit pour finir les récoltes.
Le dimanche 2, à 10 h du matin, ils sont plus de 200 à descendre vers la gare, où attend un train spécial pour Digne, lieu d’affectation. Tout Gardanne est là. Alfred Bousquet, syndiqué SFIO, monte sur un banc et propose à tous de ne pas partir. Personne ne l’écoute. Il demande aux femmes de bloquer le train. Rien. Alors son frère et lui montent montent dans le train. Le curé Antoine Gleize bénit les Appelés. Le train part. Dans l’après-midi, une fille naît chez Alfred Bouquet.
Dans la nuit, la guerre est déclarée. A Digne, les Appelés reçoivent l’uniforme (le fameux pantalon rouge) et sont photographiés. Ils n’auront un casque que dans six mois.
Le 7 août, des trains les amènent vers leur affectation. Nombre de Gardannais et de Provençaux sont dans la 2ème Armée, 15ème Corps, général de Castelnau. Mission : Envahir la Lorraine.
Le 19 août, les combats commencent, entre Morhange et Dieuze. Foch et de Castelnau n’ont pas senti le piège. Déroute, retraite sanglante du 20 au 22 août. Elzéar Granjon et Louis Decome sont tués, Elisée Deleuil et Marius Isoardo sont faits prisonniers. Au ministère de la guerre, Joffre déclare : « L’offensive a été enrayée par des défaillances individuelles ou collectives, qui ont occasionné de très grosses pertes. J’ai fait replier le 15ème Corps, qui a été la cause de l’échec. J’y fais fonctionner ferme les conseils de guerre ». Les « Bons à rien » du Midi sont accusés (honteusement) de l’échec.
Le 30 août, le tocsin sonne. Le maire Elisée Bourtin prend la rue Borély, s’arrête au n° 48, et tend un papier roulé à Virginie Turcan, mère d’Elzéar Granjon : L’annonce du décès.
LES MORTS
La France, contrairement à l’Allemagne, mobilise dès le début 2,7 Millions de réservistes. Ceux qui sont nés de 1880 à 1890 partent au front le 2 août. Ceux qui sont nés de 1873 à 1879 vont à la territoriale, affectés à des taches comme brancardiers, transporteurs ou gardiens, mais ils auront aussi des morts, comme Emile Samat. Ils partent fin août. On appellera ceux nés de 91 à 94 à l’âge de 20 ans (D. Frégier meurt à 19 ans A. Blanc, C. Decome, F. Minetti, E. Roccas, R. Troin à 20 ans).
Sur environ 200 Gardannais ayant été au front, 85 sont officiellement morts pour la France et sont gravés sur le Monument du cimetière, dont la liste est établie selon l’ordre d’arrivée de l’information du décès : Elzéar Granjon puis Louis Decome … Sont concernés les domiciliés à Gardanne, dont 49 sont nés à Gardanne et 36 ailleurs, et non pas les natifs de Gardanne domiciliés ailleurs. Certains blessés ou gazés, morts après 1920, ou quelques domiciliés non déclarés (J. Rigaud) font que le chiffre de 85 est minimum.
Liste du Monument aux Morts
Elzéar Granjon Louis Decome Marcel Imbert Fernand Viou
Athanase Astier Emile Corradi François Grimaud Barthélemy Galliano
Ernest Pontier Roger Bonneton Lazare Bouteillon Paul Féraud
Fernand Vallière François Bourrelly Henri Bossy Paul Penon
Vincent Roux Félix Poussel François Astier Lucien Figuière
Henri David Elie Bousquet Léon Bouisson François Marin
Joseph Fabre René Garnier Antoine Rua Joseph Olivier
Jules Sèze Eugène Coulon Augustin Gombert Célestin Décanis
Edouard Mantel Auguste Imbert Auguste Gilbert Albert Bonino
Léon Boi Fernand Minetti Elisée Leth Blaise Balma
François Dogliani Marius Escoffier Henri Bouscarle André Martin
Clément Dol Raoul Troin Juvenal Amphoux Marius Coste
Emile Samat Fernand Deleuil Bernard Pépino Antonin Carbonnel
Léopold Gras Marius Rossignol Antonin Blanc Edmond Ravel
Clovis Boyer Léon Troin Léopold Pontier Marius Deleuil
Célestin Decome Denis Frégier Charles Signoret Jean Gastaud
Victorin Gautier Antoine Dossetto Albert Gras Félix Isoardo
Raoul Roccas Gustave Négrel Paul Carbonnel Elisée Armand
Ildevert Agier Louis Revalor François Roubeau Victorin Bourrelly
Elisée Roccas Ernest Signoret Joséphin Poussel François Robert
Jules Bourrelly Félix Decome Marceau Deleuil Léon Convert
Elisée Car
Le site SGA-Mémoire des hommes donne la fiche que la famille recevait à l’annonce du décès au Champ d’Honneur, avec la mention MORT POUR LA FRANCE. Il ne cite pas Félix Decome, Marceau Deleuil, Léon Convert et Joseph Fabre, qui auront la mention DECEDE. Joseph Fabre a été enregistré à Marseille.
Le site Archives 13 en ligne, Registres militaires, Marseille-Digne, détaille les périodes militaires, mais il ne couvre pas tous les soldats, en particuliers ceux qui sont nés avant 1882.
Quelques discordances mineures demeurent entre le Monument aux Morts, l’Etat civil et les fiches de l’Armée, souvent à cause du prénom.
Nom : GRANJON Prénom Elzéar Naissance : 29/3/1889
Père : Xavier Mère : Joséphine Turcan Profession : berger
Degré de connaissances : 0 Taille : 1,68 Châtain, yeux châtain
Service : 5/10/1910 au 1/10/1912 Mobilisé : 2/8/1914 48, rue Borély
Arme : 2° classe aux Chasseurs à pied Lieu : Dieuze (Moselle) Mort : 19/8/1914
Nom : DECOME Prénom : Louis Naissance : 21/3/1890
Père : Pierre Mère : Elisabeth Blanc Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,57 Châtain, yeux gris, basané
Frère de Félix Decome La Crémade
Service : 10/10/1911 au 8/11/1913 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 27° des Chasseurs alpins Lieu : Dieuze (Moselle) Mort : 20/8/1914
Nom : IMBERT Prénom : Marcel Naissance : 12/1/1889
Père : Alfred Mère : Thérésine Ours Profession : maçon chez Goulet
Marié Joséphine Grandet en 1911 Châtain, yeux marron, fossette
Service : 3/10/1910 au 25/9/1912 Mobilisé : 2/8/1914 Place de l’hôtel de ville (Ferrer)
Arme : sapeur-mineur Lieu : Hermonviller (Meurthe & Moselle) Mort : 1/9/1914
Nom : VIOU Prénom : Fernand Naissance : 12/4/1889
Père : Eugène Mère : Marie Bourrelly Profession : maçon, ferme Martinat
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,71 Châtain, yeux bleu
Service : 5/10/1910 au 25/9/1912 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 23° des Chasseurs Lieu : Disparu dans les environs de Lunéville. Mort : septembre 1914
Nom : ASTIER Prénom : Athanase Naissance : 27/3/1886 à Meyreuil
Père : Louis Mère : Félicie Michel Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,66 Châtain, yeux châtain
Marié à Marie Bufalo en 1912 Coteaux rouges, Meyreuil
Service : 7/10/1907 au 25/9/1909 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 312° d’Infanterie Lieu : Verdun Mort : septembre 1914
Inhumé au cimetière de Osches (Meuse). Médaille militaire.
Nom : CORRADI Prénom : Emile Naissance : 1/7/1886 à Berre
Père : Justin Mère : Claire Roman Profession : mineur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,64 Châtain, yeux châtain
Service : 7/10/1907 au 25/9/1909 Mobilisé : 2/8/1914 Rue Kruger
Arme : 2° classe au 63° bataillon des Chasseurs Lieu : Vingré (Aisne) Mort : 13/9/1914
Nom : GRIMAUD Prénom : François Naissance : 15/05/1882 à Simiane
Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe du 3° d’Infanterie Lieu : Disparu à Béthincourt (Meuse) Mort : 20/9/1914
Nom : GALLIANO Prénom : Barthélemy Naissance : 31/5/1891
Père : Antonio Mère : Lucia Palinero Profession : mineur journalier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,65 Châtain, yeux marron clair
Service : 8/10/1913 Mobilisé : 2/8/1914 Rue Kruger
Arme : 2° classe au 3° d’Infanterie Lieu : Avaucourt (Meuse) Mort : 25/9/1914
Nom : PONTIER Prénom : Ernest Naissance : 10/10/1883
Père : Jean Baptiste Mère : Joséphine Bourrelly Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,66 Châtain, yeux gris
Service : 15/11/1904 au 13/9/1905 Mobilisé : 2/8/1914 Font de Garach
Arme : 2° classe, 24° Chasseurs à pied Lieu : disparu à Cheppy (Meuse) Mort : 23/9/1914
Nom : BONNETON Prénom : Roger Naissance : 27/01/1883 à Ventabren
Père : Désiré Mère : Thérèse Féraud Profession : mineur
Marié à Blanche Coste en 1908 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe, 2° régiment des Zouaves Lieu : hôpital de Neuilly Mort : 19/09/1914
Nom : BOUTEILLON Prénom : Lazare Naissance : 15/1/1882
Père : Célestin Mère : Rose Amphoux Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,67 Châtain, yeux châtain
Service : 15/11/1903 au 18/9/1906 Mobilisé : 2/8/1914 chemin du moulin de Fort
Arme : 1° classe au 16° d’Infanterie Lieu : Herleville (Somme) Mort : 1/10/1914
Nom : FERAUD Prénom : Paul Naissance : 8/10/1876 aux Milles
Père : Joseph Mère : Virginie Cadenel Profession : cultivateur
Marié à Aix à Lazarine Bossis en 1901 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 163° d’Infanterie Lieu : hôpital de Toul Mort : 1/10/1914
Nom : VALLIERE Prénom : Fernand Naissance : 13/06/1888 à Marseille
Père : Vital Mère : Joséphine Vidal Profession : mineur Grands-parents à Gardanne, 21 bd Forbin Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 52° d’Infanterie Lieu : Lineux (Somme) Mort : 3/10/1914
Nom : BOURRELLY Prénom : François Naissance : 3/10/1893 à Aix
Père : André Mère : Victorine Sporgio Profession : coiffeur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,59 Châtain, yeux châtain
Service : 27/11/1913 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 159° d’infanterie Lieu : St Laurent Blangy Mort : 15/10/1914
Tombé glorieusement. Croix de guerre étoile de bronze.
Nom : BOSSY Prénom : Henri Naissance : 11/3/1889 à Bouc
Père : Paul Mère : Elisabeth Chastillon Profession : employé
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,53 Marron foncé, yeux bleu foncé
Marié à Julie Corradi en 1911 Ferme de La Cèbe
Service : 10/10/1911 au 25/9/1913 dont 3 mois en Algérie Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 61° d’Infanterie Lieu : Montziville (Meuse) Mort : 30/10/1914
Nom : PENON Prénom : Paul Naissance : 19/6/1883 à Mimet
Père : Jean Baptiste, maire de Mimet Mère : Anne Bonnet Profession : employé
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,58 Châtain, yeux châtain
Marié à Marie Louise Gaudibert en 1907 rue Ledru-Rollin
Service : 15/11/1904 au 15/7/1907 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : caporal au 363° d’Infanterie Lieu : Senones (Vosges) Mort : 31/10/1914
Nom : ROUX Prénom : Vincent Naissance : 5/4/1883 à Savines
Père : Joseph Mère : Henriette Garnier Profession : mineur
Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe aux Chasseurs alpins Lieu : Chaumecourt (Meuse) Mort : 16/11/1914
Nom : POUSSEL Prénom : Félix Léon Naissance : 10/11/1882 aux Pennes
Père : Antoine Mère : Louise Martin Fils de veuf.
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,66 Profession : mineur
Service : 15/11/1904 au 19/9/1906 Mobilisé : 2/8/1914 Châtain clair, yeux bleu
Arme : 2° classe au 363° d’Infanterie Lieu : Senones (Vosges) Mort : 19/11/1914
Nom : ASTIER Prénom : François Naissance : 27/11/1883
Père : Jean Baptiste Mère : Marie Pontier Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,60 Châtain, yeux châtain
Marié à Augusta Poussel en 1909, une fille (Elise) 32, boulevard Forbin
Service : 15/11/1904 au 1/10/1907 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe des Chasseurs à pied Lieu : prisonnier à Ypres (Belgique) Mort : 22/11/1914
Nom : FIGUIERE Prénom : Lucien Naissance : 5/6/1892 au Montaiguet
Père : Joseph Mère : Marie Rey Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,64 Châtain, yeux châtain, oreilles décollées
Service : 10/10/1913 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe des Chasseurs Lieu : hôpital de Caen, blessé le 13/8 Mort : 28/11/1914
Nom : DAVID Prénom : Henri Naissance : 5/6/1885 à Puyloubier
Père : Joseph Mère : Henriette Marié Profession : charretier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,57 Châtain, yeux noir
Service : 6/10/1906 au 9/10/1908 Mobilisé : 2/8/1914 25, avenue de Toulon
Arme : 2° classe au 6° des Chasseurs à pied
Lieu : bois du Confluent près de Saint-Eloi (Belgique) Mort : 30/11/1914
Nom : BOUSQUET Prénom : Elie Naissance : 10/5/1886 Montcoujul (Tarn)
Père : Géraud Mère : Léontine Queyrou Profession : mineur
Châtain, yeux châtain
Mobilisé : 2/8/1914 54, rue Borély
Arme : 2° classe au 3° d’Infanterie Lieu : Malancourt (Meuse, Argonne) Mort : 6/12/1914
Nom : BOUISSON Prénom : Léon Naissance : 22/2/1889 à La Destrousse
Père : Marius Mère : Félicie Florent Profession : mineur
5, rue Borély Châtain, yeux châtain
Engagé volontaire du 27/4/1908 au 1/2/1913. Cochinchine pendant 14 mois. Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 8° régiment colonial Lieu : Massiges (Marne) Mort : 10/12/1914
Nom : MARIN Prénom : François Naissance : 24/3/1879 à Cannes
Père : Stanislas Mobilisé : 2/8/1914 Châtain, yeux châtain
Arme : 1° classe au bataillon des Chasseurs alpins rue Parmentier
Lieu : hôpital de Dunkerque (tétanos) Mort : 14/12/1914
Nom : FABRE Prénom : Joseph Naissance : 19/3/1880 à Marseille
Père : Félix Mère : Rose Marie Cosa Profession : boulanger
Mobilisé : 2/8/1914 à Marseille Châtain, yeux châtain
Arme : 2° classe au 111° d’Infanterie Lieu : bois de Malincourt (Nord) Mort : 20/12/1914
Retransmise à Gardanne
Nom : GARNIER Prénom : René Naissance : 7/10/1887 à Dijon
Père : Léon Mère : Joséphine Castelli Profession : mécanicien
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,71 Blond, yeux bleu, petites oreilles
Service : 13/1/1909 au 1/1/1911 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : canonnier au 2° Régiment d’artillerie de montagne
Lieu : Saint-Rémy (Vosges) Mort : 28/8/1914
Nom : RUA Prénom : Antoine Naissance : 15/08/1894
Père : Jean Mère : Marie Allio Profession : mineur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,64 Châtain, yeux marron
Mobilisé : 2/8/1914 Rue de la chapelle
Arme : 2° classe au 163° d’Infanterie Lieu : Disparu à Hinay (Meuse) Mort : 12/1/1915
Nom : OLIVIER Prénom : Joseph Naissance : 29/07/1893
Père : Adrien Mère : Marie Claire Decome Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,64 Noir, yeux marron foncé
Mobilisé : 28/11/1913 Rue Parmentier
Arme : 2° classe au 27° des chasseurs à pied Lieu : Hartmannswiller (Haut Rhin) Mort : 21/1/1915
Nom : SEZE Prénom : Jules Naissance : 5/11/1894 à Gonfaron
Père : Marius Mère : Marie Mongin Profession : journalier
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,71 Châtain, yeux marron
Engagé volontaire pour 5 ans le 28/9/1914
Arme : 2° classe au 4° colonial Lieu : Disparu à Massiges (Marne) Mort : 4/2/1915
Nom : COULON Prénom : Eugène Naissance : 16/12/1890
Père : Joseph, instituteur Mère : Marie Mihière 1, bd Forbin Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 58° d’Infanterie Lieu : Savigny (Meuse) Mort : 3/10/1915
Nom : GOMBERT Prénom : Augustin Naissance : 09/12/1880 à Belcodène
Père : Eugène Mère : Angeline Collomb La Planque Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 135° d’Infanterie Lieu : Neuville Saint-Vaast (Nord) Mort : 13/4/1915
Nom : DECANIS Prénom : Célestin Naissance : 14/8/1888
Père : Joseph Mère : Césarie Bonnefoy Profession : mineur
Pieds plats, tache de vin bras droit Noir, yeux gris, basané
Mobilisé : 2/8/1914 La Rabassière
Arme : 2° classe au 163° d’Infanterie Lieu : Disparu à Flirey (Meurthe & Moselle) Mort : 7/4/1915
Nom : MANTEL Prénom : Edouard Naissance : 18/11/1891 à La Tronche
Père : Joseph Mère : Marie Girard Profession : charpentier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,67 Châtain, yeux châtain
Service : 10/10/1912
Arme : sergent au 7° régiment du génie Lieu : hôpital de Zuydcoate (Nord) Mort : 26/4/1915
Nom : IMBERT Prénom : Augustin Naissance : 30/10/1883
Père : Baptistin Mère : Marie Elodie Ricard Profession : serrurier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,62 Châtain, yeux châtain
Fils unique de veuve 12, rue Kruger
Service : 14/11/1904 au 23/9/1905 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 135° d’Infanterie Lieu : hôpital militaire de Paris Mort : 14/5/1915
Nom : GILBERT Prénom : Auguste Naissance : 21/10/1888 à La Fare les Oliviers
Père : Jean Mère : Eudoxie Roux Profession : journalier
Degré de connaissances : 0 Taille : 1,59 Châtain, yeux châtain
Marié à Marie Roustan en 1910 quartier St Michel
Service : 7/10/1908 au 24/9/1912 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 22° d’Infanterie coloniale Lieu : Beauséjour (Marne) Mort : 24/2/1915
Nom : BONINO Prénom : Albert Naissance : 31/8/1891 à Marseille
Père : Albert Mère : Marguerite Casimir Profession : journalier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,77 Châtain, yeux châtain
Service : 10/8/1913
Arme : 2° classe du 5° d’Infanterie coloniale Lieu : hôpital de Bourges Mort : 22/5/1915
Nom : BOI Prénom : Léon Naissance : 11/4/1882 à Gréasque
Père : Mère : Rose Poussel Profession : mineur
Marié à Lucienne Vitigliano en 1912. Un enfant : Jean-Baptiste Boi 1908-1951
Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 27° de Chasseurs Lieu : Metzeral (Haut-Rhin) Mort : 22/5/1915
Nom : MINETTI Prénom : Fernand Naissance : 21/9/1895 à Septèmes
Père : Francesco Mère : Marie Deleuil Profession : mécanicien
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,81 Mobilisé : 17/12/1914 Châtain, yeux noir
Arme : 2° classe au 112° d’Infanterie. Blessé le 20/7/1915.
Lieu : ambulance des Islettes (Meuse) Mort : le 21/7/1915
Nom : LETH Prénom : Elisée Naissance : 2/6/1894
Père : Frédéric Mère : Rose Farret Profession : journalier
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,69 Mobilisé : 14/12/1914 Châtain, yeux marron
60, rue Borély puis Rue Puget. Les Leth ont pour origine Artigues.
Arme : 2° classe au 359° d’Infanterie Lieu : hôpital de Gérardmer (Vosges) Mort : 10/12/1914
Nom : BALMA Prénom : Blaise Naissance : 13/4/1894
Père : Jiacopo Mère : Maria Allemandi Profession : épicier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,68 Noir, yeux châtain clair
Mobilisé : 14/12/1914 Epicerie 24, boulevard Forbin
Arme : 2° classe au 22° colonial Lieu : Braux Sainte-Cohière (Marne) Mort : 29/9/1915
Nom : DOGLIANI Prénom : François Naissance : 2/4/1894 à Marseille
Père : Antonio Mère : Marie Rolle Profession : chaudronnier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,66 Châtain, yeux marron
Arme : 2° classe au 53° d’Infanterie Lieu : Souain (Marne) Mort : 29/9/1915
Nom : ESCOFFIER Prénom : Paul Naissance : 2/12/1878 à Marseille
Père : Elisée Mère : Marie Boiron Profession : minotier marchand de grains
Mobilisé : 2/8/1914 9, boulevard Bontemps
Arme : lieutenant au 38° d’Infanterie Lieu : Moronvillers (Marne) Mort : 25/09/1915
Nom : BOUSCARLE Prénom : Henri Naissance : 7/11/1888 à Cabrières d’Aigues
Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe du 141° d’Infanterie Lieu : Hancourt-Malancourt (Meuse) Mort : 22/11/1915
Nom : MARTIN Prénom : André Naissance : 18/10/1894
Père : Ferdinand Mère : Joséphine Debazach Profession : instituteur
Degré de connaissances : 4 Taille : 1,65 Noir, yeux noir
Mobilisé : 6/9/1914 1, rue Jules Ferry
Arme : caporal au 61°d’Infanterie Lieu : bois de la Maye (Marne) Mort : 4/12/1915
Nom : DOL Prénom : Clément Naissance : 15/10/1888
Père : Frédéric Mère : Marie Brun Profession : cultivateur, les Aires
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,69 Châtain, yeux noir
Service : 7/10/1909 au 24/9/1911 Mobilisé : 2/8/1914 4, avenue de Toulon
Arme : 1° classe aux Chasseurs Lieu : hôpital d’Erlanger (prisonnier) Mort : 8/12/1915
Nom : TROIN Prénom : Raoul Naissance : 4/3/1895
Père : Joseph Mère : Alberte Long Profession : mineur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,60 Mobilisé : 17/12/1914 Châtain, yeux châtain
Frère de Léon Troin. Rue Puget
Arme : 2° classe au 203° d’Infanterie Lieu : Reméréville (Meurthe & Moselle) Mort : 29/12/1915
inhumé à Limey Médaille militaire
Nom : AMPHOUX Prénom : Juvénal Naissance : 25/6/1881
Père : Jean Baptiste Mère : Anaïs Fournier Profession : mineur
Mobilisé : 2/8/1914 avenue d’Aix
Arme : 2° classe au 47° de Chasseurs Lieu : Marksteinweslerkapf (Haut-Rhin) Mort : 8/1/1916
Nom : COSTE Prénom : Marius Naissance : 23/8/1882 à Mimet
Père : Joseph Mère : Marie Bonnefoy Profession : mineur
Mobilisé : 2/8/1914 Rue Jean Jaurès ; Croix de guerre et médaille militaire.
Arme : 2° classe au 3° d’Infanterie Lieu : Béthincourt (Meuse) Mort : 6/3/1916
Nom : SAMAT Prénom : Emile Naissance : 3/6/1878 à Bouc
Arme : 2° classe au 3° d’Infanterie Lieu : Forêt de Hesse (Meuse) Mort : 22/3/1916
Nom : DELEUIL Prénom : Fernand Naissance : 12/5/1882
Père : Lucien Mère : Joséphine Pélissier Profession : coiffeur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,63 Châtain, yeux châtain clair
Marié à Claire Marin en 1906. Une fille (Lucie) habite 14, avenue de Toulon
Service : Auxiliaire (faiblesse) Mobilisé : 2/8/1914 Front au 27/9/1915
Arme : 2° classe au 3° Régiment d’Infanterie Lieu : Saudrupt (Meuse) Mort : 25/3/1916
Le registre militaire mentionne : Mort par accident.
Nom : PEPINO Prénom : Bernard Naissance : 3/5/1992 à La Cadière
Père : Mauro Mère : Maria Bosca Profession : mineur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,72 Châtain, yeux bleu clair
Service : 10/10/1913 Impasse Roux
Arme : sergent au 163° d’Infanterie Lieu : Malancourt (Meuse) Mort : 26/3/1916
Nom : CARBONNEL Prénom : Antoine Naissance : 12/1/1886 à Meyreuil
Père : Marius Mère : Augustine Gras Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 1 Taille : 1,58 Noir, yeux châtain
Marié à Gabrielle Decome en 1910
Service : 7/10/1907 au 19/10/1909 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : sergent au 312° d’Infanterie Lieu : Frémeréville-sous-les-Côtes (Meuse). S’est particulièrement distingué le 15/6/1916. Croix de guerre étoile de bronze Mort : 24/6/1916
Nom : GRAS Prénom : Léopold Naissance : 20/3/1879
Père : Léon Mère : Baptistine Blanc Profession : cultivateur Marié à Céleste Imbert en 1905. Un fils (Ernest) Rue Pasteur.
Arme : 2° classe au 341° d’Infanterie
Lieu : Fort de Mort d’Homme à Germainvilliers (Meuse) Mort : 24/6/1916
Nom : ROSSIGNOL Prénom : Marius Naissance : 12/4/1894 à Marseille
Père : Joseph Mère : Mathilde Martin Profession : boulanger
Arme : 2° classe au 34° d’Infanterie coloniale Lieu : Barleux (Somme) Mort : 20/7/1916
Nom : BLANC Prénom : Antonin Naissance : 7/3/19/1896
Père : Léon Mère : Victoire Reposi Profession : machiniste
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,69 Châtain, yeux marron
Mobilisé : 10/4/1915 Rue Kruger
Arme : 2° classe au 208° d’Infanterie Lieu : Herleville (Somme) Mort : 20/7/1916
Nom : RAVEL Prénom : Edmond Naissance : 17/2/1888
Père : Joseph Mère : Julie Bonnicard Profession : employé de bureau
Degré de connaissances : 4 Taille : 1,73 Châtain, yeux châtain
Service : Exempté pour faiblesse Mobilisé : 23/2/1915 12, avenue d’Aix
Arme : 2° classe au 34° Colonial Lieu : Barleux (Somme) Mort : 8/8/1916
Nom : BOYER Prénom : Clovis Naissance : 6/8/1881 à Gréasque
Père : César Mère : Rose Moustier Profession : maçon
Marié à Lucie Ollivier. Son frère Louis est mort en 1907 pendant son service militaire. Ses frères Aimé et Jules sont aussi des Poilus. Rue Kruger
Arme : caporal au 36° d’Infanterie Lieu : tranchée de Terline, route de Cergy (Oise) Mort : 3/9/1916
Nom : TROIN Prénom : Léon Naissance : 17/5/1891
Père : Joseph Mère : Alberte Long
Frère de Raoul Troin Mobilisé : 2/8/1914 Rue Puget
Arme : 2° classe du 4° régiment de marche d’Afrique Lieu : Boresnika (Grèce) Mort : 25/9/1916
Nom : PONTIER Prénom : Léopold Naissance : 1/7/1885
Père : Martin Mère : Marie Troin Profession : cultivateur, Valabre
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,69 Noir, yeux châtain
Service : exempté pour cataracte Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe 52° d’Infanterie coloniale. Lieu : ravin des bois, Barleux (Somme) Mort : 7/10/1916
Nom : DELEUIL Prénom : Marius Naissance : 19/4/1895
Père : Jules Mère : Rose Maurel Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,63 Châtain, yeux bleu
Frère de Marceau Deleuil Mobilisé : 17/12/1914 Ferme Marion
Arme : 2° classe au 7° des chasseurs à pied Lieu : Sailly-Saillisel (Somme) Mort : 5/11/1916
Nom : DECOME Prénom : Célestin Naissance : 29/7/1896
Père : Marius Mère : Marie Courdurier Profession : cultivateur aux Moulières
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,58 Mobilisé : 10/4/1915 Châtain, yeux marron
Arme : 2° classe au 119° d’Infanterie Lieu : Bézonvaux (Meuse) Mort : 18/12/1916
Nom : FREGIER Prénom : Denis Naissance : 14/7/1896
Père : Germain Mère : Lisa Bourrelon Profession : électricien
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,67 Châtain, yeux bleu
Engagé volontaire le 31/8/1915 aux Chasseurs d’Afrique 17, fg de Gueidan
Lieu : Hôpital Montalembert, Alger Mort : 29/12/1915
Nom : SIGNORET Prénom : Charles Naissance : 10/8/1893
Père : Marius Mère : Anaïs Mérentier Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,76 Châtain, yeux bleu
Ajourné pour faiblesse. Mobilisé : 5/9/1914 quartier Veline
Arme : 2° classe au 53° d’Infanterie Lieu : Bezonceaux (Meuse) Mort : 21/1/1916
Nom : GASTAUD Prénom : Jean Naissance : 28/4/1887 à Chabas (Argentine)
Père : Edmond Mère : Louise Deleuil Profession : élève Ecole Arts & Métiers
Degré de connaissances : 4 Taille : 1,70 Châtain, yeux châtain
31, boulevard des Phocéens (rue Jean Jaurès) ferme quartier Saint-Michel
Service : 6/10/1908 au 27/9/1910 Mobilisé : 17/7/1916 (sursis)
Sergent, détaché pour maladie contractée en service Lieu : Gardanne Mort : 13/2/1917
Nom : GAUTIER Prénom : Victorin Naissance : 1877 à Jouques
Père : Joseph Mère : Mathilde Paris Profession : cultivateur
Mobilisé : Rappelé : 2/8/1914
Arme : caporal au 145° d’Infanterie Lieu : boyau de Sapigneul (Marne) par explosion d’une caisse de grenades Mort : 16/04/1917
Nom : DOSSETTO Prénom : Antoine Naissance : 28/12/1891
Père : Pietro Mère : Domenica Brondino Profession : laitier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,62 Châtain, yeux verdâtre
Boulevard des Phocéens (rue Jean Jaurès)
Service : 8/10/1912 au 1/10/1914 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : caporal au 163° d’Infanterie Lieu : bois du beau marais (Vosges) Mort : 18/4/1917
Nom : GRAS Prénom : Albert Louis Naissance : 19/11/1882
Père : Honoré Mère : Elisabeth Guien Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,72 Châtain, yeux noir
Fils unique de veuve. Marié à Madeleine Carbonnel en 1905. Un fils (Elie). Avenue de Nice
Service : 14/11/1903 au 19/7/1904 Mobilisé : 2/8/1914
Arme : 2° classe au 36° d’Infanterie Lieu : Berméricourt (Marne) Mort : 19/4/1917
Nom : ISOARDO Prénom : Félix Naissance : 10/2/1887
Père : Pierre Mère : Louise Four Profession : mineur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,69 Châtain, yeux châtain
Marié à Thérèse Novelli en 1905. Une fille (Elise) 49, boulevard de Forbin.
Service : 8/10/1909 au 24/9/1911 Mobilisé : 1/8/1914
Arme : caporal au 115° de Chasseurs Alpins. Blessé à la tête le 1/9/1914
Lieu : tranchée du paradis du chemin des Dames (Aisne) Mort : 5/5/1917
Nom : ROCCAS Prénom : Raoul Naissance : 2/2/1896
Père : Louis Mère : Marie Consolem Profession : Electricien
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,62 Mobilisé : 9/8/1916 Châtain, yeux châtain
Marié à Marie Lamberto le 24/2/1814. Frère d’Alisée Rue Viala
Arme : 2° canonnier au 3° d’Infanterie coloniale. Ré inhumé à Auberive (Marne)
Lieu : ferme de Moseau (Marne) Mort : 7/5/1917
Nom : NEGREL Prénom : Gustave Naissance : 9/3/1895 aux Arcs
Père : Louis Mère : Léonie Gras Profession : cuisinier sur bateaux
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,70 Mobilisé : 1/12/1914 Châtain, yeux marron
Arme : 2° classe au 162° d’Infanterie Lieu : Verdun Mort : 14/9/1917
Cité : Le 23/8/1917, s’est dépensé pour relever morts et blessés.
Nom : CARBONNEL Prénom : Paul Naissance : 5/3/1890
Père : Henri Mère : Elisabeth Pontier Profession : charretier, avenue de Nice
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,69 Tatouage avant bras droit Châtain, yeux gris
Service : 10/10/1911 au 8/11/1913 Mobilisé : 1/8/1914
Arme : 2° classe au 31° d’infanterie Lieu : chemin des Dames (Aisne) Mort : 13/9/1917
Inhumé le 15/9/1917 à Beaumarais Pontavert
Soldat héroïque. Croix de guerre avec étoile d’argent. Médaille militaire.
Nom : ARMAND Prénom : Elisée Naissance : 2/5/1885
Père : François Mère : Madeleine Avon Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,71 Châtain, yeux châtain
Marié à Joséphine Decome en 1910. Deux fils (futurs pâtissiers). Petit Verdillon
Service : 7/10/1907 au 25/9/1909 Mobilisé : 1/8/1914
Arme : caporal du 413° d’Infanterie Lieu : Urvillers (Aisne) Mort : 18/1/1918
A donné l’exemple d’un courage remarquable les 12 au 18 juin 1916. Endurance et énergie incomparables. Croix de guerre étoile en bronze.
Nom : AGIER Prénom : Ildevert Naissance : 1/11/1886
Père : Thomas Mère : Virginie Car Profession : commis aux écritures
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,75 Blond, yeux bleu
Marié à Thérèse Follis en 1903. Une fille. 5, boulevard Carnot
Service : 7/10/1907 au 25/9/1909 Mobilisé : 1/8/1914 Blessé le 3/9/1915. Brillant soldat.
Arme : sous-lieutenant au 251° d’Infanterie Lieu : Pont-à-Mousson Mort : 30/7/1918
Nom : REVALOR Prénom : Louis Naissance : 9/9/1887 à Marseille
Père : Luigi Mère : Fernande Baritelli Profession : sans
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,68 Châtain, yeux gris
Engagé volontaire Légion Etrangère en 1908. Algérie. Rengagé en 1911. Tonkin.
Sursis à la Société des Charbonnages du 4/7/1917 au 16/5/1918.
Arme : 2° classe à la Légion étrangère Lieu : Chaudun (Aisne) Mort : 20/7/1918
Nom : ROUBEAU Prénom : François Naissance : 10/10/97
Père : Emile Mère : Rose Reynaud Profession : journalier
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,64 Mobilisé : 9/8/1916 Châtain, yeux châtain
Arme : 2° classe au 77° d’Infanterie Lieu : Champvoisy (Marne) Mort : 28/7/1918
Nom : BOURRELLY Prénom : Victorin Naissance : 10/12/1894
Père : Eugène Mère : Pauline Michel Profession : charretier
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,68 Mobilisé : 6/9/1914 Châtain, yeux marron
Arme : 2° canonnier conducteur au 232° d’Artillerie de campagne La Plaine
Lieu : Arcy-le-Ponsart (Marne) Mort : 8/8/1918
Courage et dévouement dans de nombreuses circonstances. Croix de guerre étoile de bronze..
Nom : ROCCAS Prénom : Elisée Naissance : 21/8/1898
Père : Louis Mère : Marie Cosolem Profession : mineur, rue Viala
Degré de connaissances : 1 Taille : 1,71 Frère de Raoul Châtain, yeux bleu
Arme : 2° classe au 173° d’Infanterie
Mobilisé : 17/4/1917 Lieu : Bellecourt (Aisne) Mort : 9/10/1918
Nom : SIGNORET Prénom : Ernest Naissance : 21/10/1897
Père : Paul Mère : Laurence Augier Profession : maçon
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,65 Mobilisé : 9/8/1916 Châtain, yeux châtain
Arme : 2° classe au 226° d’Infanterie. Maladies imputables aux blessures du 14/10/1918
Lieu : l’hôpital de Hoogstaéde (Belgique) Mort : 18/10/1918
Nom : POUSSEL Prénom : Joséphin Naissance : 28/12/1896 à Marseille
Père : Paul Mère : Juliette Gazel Profession : cultivateur à St André
Arme : 2° classe au 176° d’Infanterie Lieu : de maladies à Ter (Macédoine) Mort : 21/10/1918
Nom : ROBERT Prénom : François Naissance : 4/10/1896 à Allauch
Père : Augustin Mère : Justine Fouque Profession : journalier
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,71 Mobilisé : 10/4/1915 Châtain, yeux châtain
Arme : 2° classe au 18° d’Artillerie. Intoxiqué par les gaz le 31/10/1917 et le 27/5/1918
Lieu : route de Saint-Quentin (Aisne) Mort : 29/10/1918
Condamné le 6/1/1916 pour vol militaire. Passé en disciplinaire.
Nom : BOURRELLY Prénom : Jules Naissance : 27/1/1886 à Marseille
Père : Joseph Mère : Rose Car Profession : mineur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,65 rue Cadenel Châtain, yeux châtain
Service : 7/10/1907 au 13/10/1909 Mobilisé : 1/8/1914 Veuf, un fils (Valentin)
Arme : 2° classe au 111° d’Infanterie prisonnier de guerre à Malancourt le 20/3/16
Lieu : prisonnier de guerre à l’hôpital de Hattenzalge (Allemagne) Mort : 11/11/1918
Nom : DECOME Prénom : Félix Naissance : 9/4/1895
Père : Pierre Mère : Félicie Blanc Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 3 Taille : 1,63 Châtain, yeux châtain
Mobilisé : 17/12/1914. Arme : 12° Bataillon des Chasseurs à pied
Blessé le 31/8/1915 en faisant bravement son devoir. Thorax transpercé .
Libéré dans ses foyers le 12/8/1818 Mort : le 4/12/1918 à Gardanne (La Crémade).
Croix de guerre étoile de bronze. Frère de Louis.
Nom : DELEUIL Prénom : Marceau Naissance : 20/2/1893
Père : Jules Mère : Rose Maurel Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,72 Mobilisé : 28/11/1913 Châtain, yeux gris
Marié à Julie Viou le 12/11/1912. 3 fils en 1918. Ferme Marion
Arme : 55° Régiment d’infanterie.
Blessé le 2/9/1914 à Lunéville. Bras gauche, thorax, cuisses, main droite. Réformé le 11/3/1916.
Lieu : Gardanne, 54, rue Borély. Mort : 8/4/1921
Nom : CONVERT Prénom : Léon Naissance : 17/10/1894 à Aix
Père : Jean Baptiste Mère : Marguerite Guérin
Marié à Elisa Figuière en 1917 (sœur de Lucien Figuière). L’armée a reconnu plus tard qu’il était une victime de guerre. Lieu : Gardanne Mort : 1923
Nom : CAR Prénom : Elisée Naissance : 11/10/1891
Père : Jules Mère : Joséphine Coustoulier Profession : boulanger
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,62 Mobilisé : 9/11/1912 Noir, yeux gris
Arme : 2° classe au 142° d’Infanterie 26, bd Bontemps
Lieu : mort de blessures dans l’ambulance de la Veude (Marne) Mort : 28/9/1918
_______________________________________
Nom : RIGAUD Prénom : Justinien Naissance : 3/4/1889, Mimet
Père : Noël Mère : Virginie Saurin Profession : cultivateur
Degré de connaissances : 2 Taille : 1,75 Exempté pour faiblesse Châtain, yeux châtain
Mobilisé le 23/2/1915. Blessé le 21/9/1915 chemin de Marseille
Arme : Armée d’Orient Lieu : Makavo (Serbie) Mort : le 9/5/1917
Lieu de transcription du décès : Mimet, alors que Justinien était venu habiter Gardanne.
Nom : MOUSTIER Prénom : César Naissance : 25/4/1877
Père : Lazare Mère : Claire Fabre Profession : cultivateur
Diplômé Ecole d’agriculture de Valabre. Marié à Rosa Deleuil. 2 enfants. 5, fg de Gueidan
Blessé en 1915. Réformé en 1916. Mort de maladie à Gardanne en 1917. L’armée ne le compte pas.
Gardanne a sa part de Poilus héroïques. 36 d’entre eux ont reçu la Croix de guerre :
Ceux qui sont morts : Elisée Armand, François et Victorin Bourrelly, Antoine et Paul Carbonnel, Marius Coste, Félix Decome.
Ceux qui sont revenus : Prosper Amphoux, Geoffroy Armando, Baptiste Bagnasco, Léonidas Bagnol, Célestin Barlatier, Charles Bérenger, Albert Blanc, Antoine Brondino, Léon Car, Léon Chave, Charles Chaix, Jauffret Chiappero, Paul Duchâteau, Antonin Durand, Joseph Follis, Germain Guirand, Eugène Marin, François Isnardon, Ferdinand Laugier, Léon Marin, Raphaël Maurin, Marius Minetti, Léonard Pally, Justin Pontier, Jules Rossignol, Fortuné Samat, Marcel Savine, Marius Trouin, Louis Vadon.
Médaille militaire : Athanase Astier, Jacques Balma, Antoine Brondino, Paul Carbonnel, Marius Coste, Joseph Follis, Jules Gautier, dit Capitaine, Louis Gritti, Raoul Troin.
← Victorin Bourrelly, croix de guerre
Certains Poilus furent corvéables à merci, ayant accompli 24 mois de service militaire, 4 ans de guerre, 8 mois d’occupation (Charles Gautier, Léon Cavalier, Marius Reynaud, etc.). Certaines familles ont envoyé 3 fils, des maris, des pères. A l’autre extrémité, certains ont été dispensés de service, puis détachés à la mine ou à l’usine (Raoul Boule, Auguste Bourrelly, Martial Jonche, Marcel Pons, etc.).
Si l’on adopte les chiffres (discutables) de 383 mobilisés et de 88 morts, Gardanne a un taux de 23 % de Poilus tués, taux semblable à ceux de Trets et de Fuveau, supérieur à ceux de Marseille et d’Aix, inférieur à ceux de la Corse, de la Bretagne, du Massif Central, etc. Les paysans ont été les plus exposés, car l’armée maintenait « les gens capables » aux productions de l’arrière, pensant que la production agricole allait de soi. Ainsi s’explique le taux moyen de Gardanne, la mine et l’usine ayant servi à détacher des mobilisés, alors que les paysans et les célibataires fraichement naturalisés ne furent pas épargnés. Sur les 200 partis au front, seuls 112 revinrent (44 % de tués).
Le docteur Alexandre Blanc, né en 1872, ne fut pas mobilisé et soigna les Gardannais. Le tout jeune docteur Raoul Décoppet fut promu médecin auxiliaire et se dépensa sans compter dans les hôpitaux de campagne. Il se rengagea 6 mois de plus le 27/11/1919. Il se retira chez lui, à Marseille, avant de venir exercer à Gardanne.
A l’arrière, les temps étaient durs aussi. Des enfants de 11 ans menaient les champs. Les instituteurs, les artisans, les commerçants, faisaient défaut. Les femmes avaient une surcharge de travail et de responsabilité. Beaucoup d’enfants nés de 1913 à 1918 ne connurent pas leur père dans leur petite enfance. Quand celui-ci revint, c’était un inconnu, un usurpateur, la plupart du temps traumatisé et dépressif.
Des familles furent contraintes de vendre des terres ou des maisons à très bas prix. Une catégorie de personnes sut en profiter. Un fort transfert de richesse s’opéra. Gardanne, comme toute la France, était prête à la mutation « de 1925 », changement complet de style, passage au salariat.
Une histoire terrible se produisit, qui resta confidentielle. Le soldat X, venu en permission, horrifié par ce qu’il avait vécu, ne repartit pas. Sa famille le cacha dans un puits. L’épouse du soldat Y, jalouse de ne pas avoir son mari, le dénonça. Il fut fusillé sur le front, pour l’exemple (l’armée dit mort au combat). Quand Y apprit cela, il promit à son épouse de la tuer à sa prochaine permission. Il fut lui-même tué une semaine avant cette permission. La famille X ne sut jamais que son fils avait été dénoncé. La veuve Y empocha la pension avec soulagement. Un autre déserteur, Alfred Reynier, ne fut pas dénoncé ni retrouvé.
Commémorer l914.
C’est d’abord réparer l’injustice qui a sali le 15° Corps. La honte est au niveau des politiques qui ont préparé la guerre et au niveau des militaires en chef, qui ont sacrifié par leur incompétence l’immense bonne volonté des peuples. Le souvenir de la Grande guerre est la vertu devant l’infamie.
C’est ensuite rappeler les valeurs de la France, telle qu’elles se sont formées depuis 1789. La Grande guerre est un moment de propreté au niveau des soldats et de leur famille. Bien que se sachant bernés, les Poilus ont fait leur devoir, tel qu’ils l’avaient compris, à l’école du certificat d’études. Ils savaient qu’il y avait des embusqués, des trafiquants, des planqués. Ils n’ont pas protesté, surtout pas contre les mutins de 1917, qui étaient des leurs, devant, comme eux.
C’est aussi se souvenir de la douleur à l’arrière. La plupart des Poilus restèrent muets sur ce qu’ils avaient vécu. Beaucoup ne surmontèrent pas le drame, devinrent autoritaires ou distants. Parmi leurs enfants, le célibat augmenta.
C’est enfin et surtout une réflexion sur notre avenir. La guerre de 14-18 est la première manifestation de la mondialisation. Ses causes, fort complexes, ne sont toujours pas élucidées.
Le pacifisme d’avant 14 disait Non à la guerre, qui arrête le progrès social, culturel, et humain. Il a échoué. La mondialisation a assuré le progrès matériel, par une modernisation accélérée. Le pacifisme des années 20 et 30 cria Plus jamais çà. Il a échoué en 1939. La mondialisation a généré une modernisation matérielle encore plus accélérée. Des instances mondiales (ONU …) s’occupent d’établir la paix, et il y a des guerres partout, armées, boursières, idéologiques. La mondialisation gagne en créant un monde numérique, totalement artificiel.
Les Poilus ont modestement fait preuve de citoyenneté, de solidarité, d’amour pour des valeurs millénaires menacées par la voracité des Etats, par l’individualisme, l’irrespect, l’incompétence. Ils nous enseignent que la mondialisation doit se doter d’une morale mondiale, d’abord humaniste, d’abord économique, d’abord écologique.
Pertes de la journée
du 20 août 1914 à Dieuze :
▬ Troupe : 1.150 (2 Gardannais)
▬ Officiers : 10
▬ Blessés : 7 (1 Gardannais)
▬ Disparus : 2
▬ prisonniers : 4 (2 Gardannais)
Ernest Pontier
Petite histoire des débuts de l’alumine à Gardanne
Par Michel Deleuil, janvier 2015.
Ancien ingénieur à Rhône-Poulenc
L’usine de Gardanne fut, pendant un temps, l’une des plus importantes du monde en production d’alumine pour l’électrolyse. Dans les années 1960, elle dépassait la production de 1100 tonnes / jour d’alumine.
Elle demeure au niveau mondial, pour une production plus particulière, dite spéciale.
Non pas qu’elle soit la mieux placée, ou bien la moins contrainte en matière de rejets.
Elle est la plus compétente, et doit sa survie à tous, ingénieurs, ouvriers, assistants.
Après 1950, elle a su promouvoir ses meilleurs éléments, rétribuer correctement son personnel, inspirer la fierté, sous le nom de Péchiney.
Elle a contribué pour une bonne part au budget de la ville, initié les terrains de sports, les colonies de vacances, l’aide au logement.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. On a perdu de vue l’extrême fragilité de ses débuts, du temps où les données de base du procédé étaient inconnues, où les propriétaires étaient sous l’épée de Damoclès des banquiers, où les concurrents se multipliaient, partout, pour fournir l’alumine aux usines électrométallurgiques. Gardanne a finalement triomphé.
Ce fut une épopée, depuis les décideurs (qui y ont cru, et n’ont pas abdiqué), jusqu’au personnel, qui n’a pas ménagé ses efforts. Au cœur du débat, l’orgueil de deux personnages : Paul Héroult et Karl Bayer. Ils se fâchent. Ce sont des tiers qui mèneront l’opération à bout.
Ce rappel des premières années comporte quelques données techniques, dans le but d’éclairer les problèmes vécus à l’époque. Les spécialistes n’y retrouveront qu’une bien grande simplification. Mais tous situeront peut-être mieux le rôle d’Héroult, qui a une rue à Gardanne, et celui de Bayer, qui n’en a pas.
Nous nous sommes basés sur 2 références très bien documentées, les avons rassemblées, et complétées par l’aspect technique :
-
BAYER Wolfram, Cahiers d'histoire de l'aluminium 2012/2 (N° 49)
-
AGNES LEBROU, obtenu par lien (voir de Biran)
Petite histoire des débuts de l’alumine à Gardanne
Vers 1890, l’industrie naissante de l’alumine pure est l’objet de toutes les convoitises.
Dans un monde dynamique, ultra libéral, sans foi ni loi, elle doit relever trois défis :
-
Scientifique et technologique : Produire qualité et quantité, à coût réduit. Le procédé en place, celui de Sainte-Claire Deville, ne donne pas satisfaction. Celui proposé par Karl Bayer n’existe qu’à l’échelle laboratoire.
-
: Viser le marché principal (textile), ou bien suivre la demande, faible mais prometteuse, de l’aluminium ? Ce métal est obtenu par la voie chimique de Sainte-Claire Deville, mais les procédés électriques d’Héroult et de Hall émergent.
-
: Guerre des brevets, des cartels, des matières premières, des plagias.
Une dizaine de prétendants : Ludwigshafen (Allemagne), Neuhausen (Suisse), Pittsburgh, Woburn (USA), Larne (Grande Bretagne), Tentelev (Russie), Salindres, Gardanne.
Larne et Gardanne l’emporteront, grâce aux connaissances de Bayer et à l’appui d’une équipe de pionniers, puis grâce aux améliorations successives.
Toute l’alumine actuellement produite dans le monde l’est selon le procédé « Bayer ». Les procédés qui ont essayé de s’y substituer n’y sont pas parvenus, voie acide par exemple.
-
Deux histoires se rejoignent :
-
L’alumine pour l’industrie textile :
L’alun est un sel naturel utilisé depuis l’Antiquité comme mordant d’un textile. Il se fixe de façon efficace sur les fibres de laine. En imbibant ensuite le colorant, celui-ci forme un complexe très stable avec l’alun. Ce dernier est aussi utilisé dans l’encollage du papier, en tannerie, et pour la purification de l’eau
En 1807, Davy suppose que l’alun (alumen en latin) contient un métal, qu’il appelle aluminium, et son oxyde alumine. En 1825, Ørsted puis Wöhler isolent le métal. Henri Sainte-Claire Deville améliore la méthode de Wöhler et présente à l'Académie des sciences le premier lingot d'aluminium (1854). Son procédé est utilisé industriellement par Henry Merle dans son usine de Salindres, en première mondiale (1859).
Bauxite + chaux Réduction au charbon → Aluminium
+ carbonate Na → aluminate → alumine
+ acide sulfurique chaud → Alun
Il faut se contenter d’un aluminium coûteux et de médiocre qualité. L’alun est trop acide et trop impur, peu avantageux par rapport aux produits naturels.
La compagnie textile allemande Schneider & Co., implantée près de Saint-Pétersbourg, décide de lancer des recherches pour obtenir un alun de qualité. Woldemar von Schneider connaît un chimiste distingué, Karl Joseph Bayer, qu’il embauche.
Celui-ci met au point une méthode analytique rapide pour contrôler le procédé en direct. Il obtient ainsi un alun de qualité. Il publie (1885) et reçoit une attention universelle.
A Rouen, Emile Blondel applique l’analyse avec succès dans son usine textile.
Un jour de 1886, lors de l’analyse d’une solution d’un aluminate alcalin, Bayer fait une observation importante : Cette lessive engendre, sous certaines conditions, des cristaux d’un hydrate d’alumine, très pur et lavable. Ce sont des cristaux d’hydrargillite Al(OH)3, dite alumine hydratée. Le processus de cristallisation, favorisé lorsque la solution est agitée, s’arrête au rapport alumine/soude de 1 à 6. Des solutions contenant une part d’alumine pour deux parts de soude ne se décomposent pas spontanément, mais le font par contre au contact d’une petite quantité d’hydrate fraîchement précipité.
Cette hydrargillite est de l’alumine pure ! Elle pourrait résoudre les problèmes causés par la présence d’impuretés dans l’alun (fer, phosphore, silice), pour lequel des méthodes industrielles d’épuration sont proposées, mais qui restent toutes fastidieuses et imparfaites.
Bayer dépose des brevets, en Allemagne, Angleterre, France, USA, Belgique, Autriche. Que revendique-t-il ?
-
Il part de bauxite française,celle de la société Augé & Cie à Marseille, premier grand fournisseur, à partir de son gisement près de Brignoles.
-
Il attaque le minerai par la soude, à chaud, et non plus selon le principe Le Chatelier / Sainte-Claire Deville utilisé à Salindres, chaux et carbonate de soude.
-
Au lieu de précipiter l’hydrargillite par le CO2, il le fait par agitation, dilution et refroidissement, en présence de cristaux d’hydrargillite servant de semences.
Le potentiel économique est immense : Suppression du CO2, recyclage de la soude, opération à froid, obtention d’une alumine pure. Il prétend consommer moins d’énergie et moins de matières premières que les pratiques en vigueur, et surtout obtenir de l’alumine exempte de fer, de silice et d’acide phosphorique.
Le brevet vise « la préparation du sulfate d’alumine et d’autres composés d’alumine ».
Bayer se préoccupe de la production industrielle d’un alun de bonne qualité et bon marché, sans penser à la production du métal aluminium, car il s’en tient aux données du marché : En France, vers 1895, on consommera 26 000 tonnes d’aluns par an, contre 1 500 tonnes d’aluminium.
-
L’alumine pour la métallurgie :
La question d’une alumine pure se pose aussi - et avec plus d’acuité encore -, pour la production de l’aluminium, que ce soit par la voie chimique traditionnelle, ou par une des voies électriques explorées depuis quelques années (on en dénombre deux douzaines).
À Lockport aux États-Unis, depuis deux ans, les frères Cowles réduisent l’aluminium à l’arc électrique en additionnant toujours un peu de charbon et de cuivre. Ils embauchent, en cet été 1887, le jeune Charles Hall, dont le brevet sur un procédé électrolytique de fabrication a été déposé en 1886. En Europe, Paul Héroult, inventeur à 23 ans d’un procédé fondé sur les mêmes principes, mais avec une cuve différente, a breveté 2 mois avant Hall.
Héroult se passionne pour l’aluminium. A 15 ans, son livre de chevet est l’ouvrage de Sainte-Claire Deville. A 20 ans, il suit le cours préparatoire de l'Ecole des Mines, et se lie d’amitié avec Louis Merle, dont le père, Henry Merle, a créé l’usine de Salindres, où il exploite le procédé Sainte-Claire Deville. Paul est recalé aux Mines. Son père meurt, et il doit le remplacer dans l'exploitation de la tannerie que sa famille possède à Gentilly (1885). Du fond de son atelier, il électrolyse l’alumine, à l’aide d’une petite dynamo et d’un four original.
Le brevet sorti, Héroult prend le chemin de Salindres pour proposer son procédé (1886).
A Henri Merle, décédé, a succédé en 1877 Alfred Rangod Pechiney, qui ne croit pas plus à l’électricité qu’au développement de l’aluminium, ni à ce jeune homme irrespectueux.
Econduit, Héroult contacte la banque Rothschild, qui décline aussi.
Heureusement, deux sociétés décident d’investir dans les procédés Héroult. Ce sont la SAIA à Neuhausen, Suisse, près d’une chute du Rhin, et la SMEF à Froges, sur l’Isère, où Héroult s’installe, directeur, avec Louis Merle comme administrateur.
Puisque fâché avec Péchiney, Héroult doit acheter en Allemagne une alumine de qualité médiocre et chère. Il pousse la SMEF à créer sa propre usine d’alumine (1890).
Malgré de graves difficultés techniques, la SMEF construit une usine d’électrolyse plus grande (La Praz) et crée la Société Française d'Aluminium Pur (1892). Le besoin en forte quantité d’une alumine de qualité devient le point névralgique de la production d’aluminium.
-
Création de l’usine de Gardanne :
Le choix du site de Gardanne par Héroult et la SMEF est ainsi argumenté :
Une voie ferrée va à Marseille (20 km, port, liaison avec Grenoble et la Maurienne). Une autre va à Brignoles (59 km, région où sont exploités les gisements de bauxite Augé).
Deux compagnies minières produisent à Gardanne du lignite, base de l’énergie thermique. La chaux et le calcaire seront fournis par Ferdinand Maurel, ancien maire, qui a ouvert un four à chaud au quartier Cauvet. Le carbonate de sodium et la soude seront achetés chez Solvay (Salins de Giraud) et arriveront à Marseille. L’eau est abondante. Le réservoir de main d’œuvre est suffisant. Le maire Léon Poussel voit très favorablement le projet.
Un terrain est disponible quartier Saint-Michel. Il est bordé au nord par la voie ferrée, au sud par la route Marseille-Gardanne, à l’ouest par la voie ferrée de la mine de la Félicie.
On construira l’usine selon le procédé Sainte-Claire Deville, le seul qui soit disponible. Mais dès les premières livraisons à Froges, Héroult se plaint, en particulier des impuretés.
On parle depuis deux ans d’une nouvelle voie, due à Karl Bayer, qui prétend livrer une alumine pure. L’équipe des fondateurs de la SFAP et de l’usine de Gardanne décide, à l’hiver 1892-1893, de prendre en main cette question. Ce sont Georges Quesneville, professeur à l’École de pharmacie et directeur du Moniteur scientifique ; Charles Combes, qui a suivi les cours de son oncle Charles Friedel au laboratoire de la Sorbonne avant de collaborer, avec Henry Moissan et Henry Gall, au supplément du Dictionnaire de chimie pure et appliquée ; enfin Paul Kienlen, ingénieur-chimiste expérimenté, qui figure parmi les collaborateurs du Moniteur scientifique, et qui fait autorité en matière d’analyse de la bauxite.
Pour la somme de 25 000 francs, Bayer cède les droits français de ses brevets à la SFAP. Le contrat prévoit des paiements de 12,50 francs par tonne d’alumine produite, avec un minimum de 10 000 francs par an, jusqu’à l’expiration du brevet. Le 30 août, à Paris, Bayer a une entrevue avec Charles Combes de la SFAP, et Gustave Munerel de la SEMF. On parle de l’installation imminente, dirigée par Paul Kienlen, de la production d’alumine pure à Gardanne. Bayer y fait une visite début septembre 1893.
Début février 1894, Héroult retrouve Paul Kienlen, Charles Combes et Karl Bayer à Gardanne, où sort la première tonne de son alumine. Le produit est satisfaisant, mais l’atelier produit très peu, à cause sa petite taille et de perpétuels problèmes de filtration.
A l’été 1894, la SFAP est au bord de la faillite. Elle entame des pourparlers avec la SEMF. La fusion des deux sociétés est réalisée début 1895. La valeur de la SFAP, brevet Bayer et fonds de commerce confondus, est estimée à 900 000 francs.
À Gardanne, la fabrication Bayer est toujours chaotique : Alumine en faible quantité, et souvent mal calcinée à Froges. Paul Héroult a remplacé Kienlen comme directeur de la fabrication à Gardanne, et il prend une foule d’initiatives pour monter la production.
L’autoclave pilote est petit (20 l), les cristallisoirs ne font que 200 l. Pourtant, à cette échelle, les choses ne marchent déjà plus comme au laboratoire, et les « annexes » défaillent.
On appelle Bayer, qui est aux USA. En août 1895, celui-ci invite Combes à venir visiter l’usine qu’il a installée à Woburn (Boston) pour la Merrimac Chemical.
L’autoclave ci-dessus est encore visible à Gardanne.
C’est Paul Héroult qui fait le voyage. Il rapporte peu de renseignements. Les problèmes persistent : les évaporateurs sont insuffisants, des composés silicates et alumine se déposent sur les parois (cristallisoirs, pompes, joints). Les filtres se colmatent. L’interdépendance des opérations crée sans cesse de nouveaux problèmes. Le rendement en alumine est de 36% au lieu des 95% garantis par l’inventeur. La production, escomptée de 4 t / j, n’est que de 2 t.
Le Conseil d’administration de la SEMF convoque Bayer (1895), qui consent à revenir une troisième fois à Gardanne. Après une défaillance des cristallisoirs, la fabrication est de nouveau arrêtée (1896). Sur place, Bayer parvient, en octobre 1896, à dissuader Paul Héroult de concentrer les liqueurs à feu nu, opération gaspilleuse de combustible et nuisible. Après avoir fait des essais, il maintient que « son procédé est bon, mais il faut pour diriger l’usine un chimiste très compétent qui suivra complètement la fabrication, aidé d’un second s’occupant spécialement des ouvriers et du matériel ». Autrement dit, Héroult n’est pas la personne adéquate. Héroult répond que Bayer n’est qu’une tête de mule (témoignage d’A. Guénivet). Bayer part. Il faudra faire sans lui, et sans avoir eu le temps de comprendre.
Combes n’est pas du même avis qu’Héroult. Le Conseil décide que ce dernier s’occupera désormais exclusivement de l’usine de La Praz. Gardanne et la mise au point technique sont confiés au chimiste Alfred Guénivet, qui a recueilli quelques indications auprès de Bayer. Mais on a gaspillé deux éléments clés : Un long séjour de Bayer, et l’achat de la société Augé & Cie. Désormais, Héroult s’occupe à perfectionner son four cathode à trou de coulée, qui sera le premier four véritablement industriel. L'électrométallurgie nait de cette création. Il ne vise plus le seul aluminium, mais prévoit le silicium, des métaux doux comme le ferro-chrome. En 1896, il est le premier à fabriquer le carbure de calcium. Son échec à Gardanne l’a libéré pour son vrai talent : L’électrolyse de l’alumine.
A partir du moment où Alfred Guénivet suit les conseils de Bayer et surveille de façon systématique la production, celle-ci se normalise. Des notes prises par lui en avril 1896 indiquent un rendement faramineux de 94 %.
Le Conseil déclare : « La fabrication de l’alumine est la question vitale de l’aluminium et il faut absolument arriver à produire l’alumine dans les meilleures conditions possibles. »
Au mois de juin 1896, suite à une visite à l’usine d’alumine de Larne en Grande-Bretagne, Héroult fait installer des chaînes traînantes dans les décomposeurs, pour empêcher leur entartrage. On emploie avec succès des liqueurs plus diluées, des proportions d’amorce beaucoup plus grandes. La production augmente et devient plus régulière. Ainsi, malgré des difficultés qui ne seront définitivement surmontées que vers 1900, les pionniers du Conseil et l’équipe de Gardanne sont en train de gagner un pari audacieux (1896-1900).
Deux autres sites réussissent au même moment, comme quoi la base « Bayer » est bonne.
→ À Larne, la société BACO a eu un démarrage difficile. Mais elle a écouté Bayer. Elle a abandonné les bauxites irlandaises, riches en silice, au profit du minerai varois, en achetant la société Augé. Elle poursuit une politique de communication ouverte, en publiant dès 1896 les détails du procédé. Larne, leader technologique et bientôt plus grande unité d’alumine Bayer en Europe, devient un lieu de pèlerinage où des ingénieurs américains, français, suisses et allemands viennent se renseigner sur la technologie de l’alumine pure (1898-1900).
→ A Woburn, chez la Merrimac, le procédé Bayer est dès le début mis en œuvre avec succès, en présence de l’inventeur, qui passe un an sur le site (1896). Bayer a contacté Charles Hall, l’Héroult américain, mais celui-ci ne donne pas suite.
En février 1897, Gardanne annonce « une marche plus régulière » qui «prend une allure plus industrielle ». Après de longues discussions, Combes décide de verser à Bayer la somme de 41 000 francs sur les 60 000 qu’il a réclamés. Les 19 000 francs restants lui seront remis « pour solde » lorsque ses promesses seraient tenues.
-
comprendre la réussite :
-
La bauxite :
Brignoles a été pendant un siècle le principal gisement français, et pendant un temps le plus important du monde. En 1895, BACO exporte depuis le Var et à partir du port de Toulon vers l'Angleterre, l'Allemagne, la Russie ou l'Autriche. Les usines de Gardanne (1894), La Barasse (1908) et Saint-Louis-des-Aygalades (1909) s’approvisionnent par la voie ferrée.
Cette bauxite est riche en alumine (50 %), mais Bayer la sélectionne surtout pour sa faible teneur en silice (2 %). En effet, pour 1 atome de Si, on perd 1 atome d’Al et 1 atome de Na, par précipitation de divers silicates (cancrinite, sodalite). A Brignoles, les grands groupes anglo-saxons et germano-suisses raflent la mise. Ce n’est qu’après 1918 que Péchiney et Ugine se feront une place. En 1965, la production varoise atteindra 2 millions de tonnes.
La bauxite d'Australie arrive pour la première fois à Gardanne le 21 septembre 1967.
En 1972, l'usine commence à s'approvisionner en Guinée. L’activité varoise prend fin en 1990. En 2001, la production mondiale de bauxites est de 30 millions de tonnes, la Guinée ayant les plus gros gisements. Ces bauxites tropicales présentent deux avantages. Elles sont extraites à ciel ouvert, et elles s’attaquent à de plus basses température et pression.
Composition d’une bauxite :
Conditions opératoires de dissolution de la Gibbsite et de la Boehmite dans la soude caustique (Source: Hudson et al., 1987)
Les bauxites tropicales sont riches en hydrargillite (dite aussi gibbsite ou bayerite), alors que la varoise est riche en boehmite. Si hydrargillite et boehmite sont toutes deux en forte proportion, une optimisation consiste en l’attaque en 2 temps : 150° C puis 240° C.
A l’époque, Bayer fait le bon choix avec la bauxite du Var.
La roche finement broyée est introduite dans un autoclave. On chauffe à la vapeur à 230°C sous une pression de 30 bar. On introduit la soude chaude jusqu’à 250 g/l, et on agite pendant des heures.
Al2O3.H2O + inertes + 2 OH- (soude) → 2 AlO2- (aluminate en solution) + boues rouges + H2O
On vidange vers un décanteur. La décantation permet de précipiter quelques impuretés. Les métaux lourds se fixent sur le minerai de fer et partent avec les boues. Le surnageant est pompé vers la cristallisation. Les boues sont filtrées et lavées pour récupérer la soude.
Durant la filtration/lavage, le tissu de coton « se brûle » ou se colmate. On ne récupère pas bien la soude. Celle-ci est souvent de mauvaise qualité.
Jusqu’en 1905, les boues sont stockées de l’autre côté de la route, avec celles du Sainte-Claire Deville (emplacement de l’usine actuelle). Un téléphérique les déversera ensuite dans le vallon de l’Encorse, commune de Bouc. Plus tard, vallon de Mange-garri.
Fastidieuse et énergivore, l’attaque n’est cependant pas l’étape la plus obscure.
Au début, on consommait 2,33 t de lignite pour tonne d’alumine produite, mais on tomba vite à 1 t. Vers 1960, la réalisation de l’attaque continue sera un saut technologique qui placera Gardanne à la pointe mondiale.
Le 16 juillet 1898, une chaudière explose, faisant un mort et quatre blessés. Le doute s’installe à nouveau, car on ne pourra jamais faire de gros autoclaves sous 30 bar.
C’est le cœur du procédé Bayer. On insolubilise AlO2- (aluminate en solution) en Al(OH)3. Si l’on opère brutalement, par exemple en neutralisant la soude, ou en refroidissant rapidement, Al(OH)3 se multiplie en nucléï, amas de taille exprimée en Angström, et qui n’atteignent pas le stade de croissance. Ils sont irrécupérables (comportement colloïdal).
Ces nucléï naissent aussi et surtout sur les parois. Ils forment des plaques, obstruent les pompes, etc. Bref, l’alumine est perdue et l’atelier arrêté.
Si l’on opère doucement, on ne gagne pas pour autant. Les nucléï n’amorcent qu’une faible croissance, bloquée à des tailles encore submicroniques, à cause des états de surface de ces microcristaux, qui ne sont plus « mouillés » par les nucléï, et qui ne croissent donc plus. Pas de récupération. Encrassement.
Bayer recommande un mode opératoire très lent, sous refroidissement et dilution modérés, mais sous vive agitation et en forte présence de cristaux d’alumine de 50-80 microns. L’agitation « décape » les surfaces des cristaux, les rend « mouillables », ce qui permet leur croissance. Si les cristaux d’alumine (semence) sont de bonne qualité (surface propre après broyage), ce sont eux qui vont croître. Ils seront filtrables (120 microns). Une partie du gâteau sera la production, une autre partie sera broyée et recyclée en semence. Notons qu’à Gardanne les cristallisoirs s’appellent des décomposeurs, pour signifier l’absence de cristallisation primaire et le rôle des semences. Leur but est une cristallisation secondaire.
Du temps de Bayer, les unités sont petites et poussées à produire. On réduit la semence à des valeurs inférieures à la production, ce qui est insuffisant. Les grandes unités auront de grands volumes, et la semence sera le double de la production.
La voie du salut existe, mais elle est très étroite. On tombe facilement dans la nucléation plutôt que dans la croissance, d’où perte d’alumine, colmatages, arrêts. Les pionniers de Gardanne, Larne, ou Woburn, se sont demandé si la voie existait (1893-1896).
L’augmentation de la taille des cristaux est due à 2 mécanismes concomitants, celui décrit ci-dessus (mouillage par les nucléï, appelé croissance par nucléation secondaire), et celui de la soudure des cristaux entre eux (agglomération).
L’agglomération délivre de plus fortes tailles et craint moins les impuretés. Elle donne une alumine moins pure. Elle est favorisée par une agitation modérée, une forte sursaturation, et un taux de semence moyen. Elle a surtout été recherchée aux USA et au Canada.
La nucléation secondaire est favorisée par une forte agitation, un fort ensemencement, une plus grande dilution. Elle demande de plus longs temps de séjour, mais donne un meilleur rendement et une meilleure hydrargillite. Elle est plus dans l’esprit de Bayer. Elle a été mise au point à Gardanne. Elle domine aujourd’hui le monde entier.
Exemples de causes préjudiciables :
-
Dilution / refroidissement rapide
-
Agitation insuffisante (de plus en plus difficile avec l’accroissement des tailles)
-
Temps de séjour trop court, cristallisoirs trop petits (réduire l’investissement, monter la production).
-
Taux de semences trop faible (tentation de produire plus)
-
Semences de mauvaise qualité (impuretés, tailles)
-
Bauxite de mauvaise qualité (impuretés)
-
Soude recyclée de mauvaise qualité (impuretés).
Pour produire plus, il faut agiter plus, augmenter le taux de semences, mais ne pas augmenter la sursaturation ni diminuer le temps de séjour. Facile à dire aujourd’hui, mais bien mystérieux en 1893, car les paramètres sont interdépendants.
On comprend qu’Héroult et Bayer ne se soient pas entendus, et que ce dernier ait réclamé « un chimiste analyste » pour suivre les conditions à travers toutes ces subtilités.
En 1898, les gens de Gardanne maîtrisèrent la chose. Œuvre collective, où le savoir et le savoir-faire, la connaissance et l’intuition, s’épaulent. Sens de l’analyse (Guénivet, Hönig) et de l’observation, accumulation d’expériences et d’idées, depuis l’ingénieur jusqu’au manœuvre. Par la force des choses, Gardanne peut être fier d’avoir été, selon Hönig, « la première application réussie du procédé Bayer ». Ajoutons « avec Larne », même si la compréhension profonde a été meilleure à Gardanne.
-
Le cycle Bayer :
Le schéma ci-dessus, dû à Altéo, est celui d’une production en continu. Les recyclages (soude, semences) optimisent la productivité, mais demandent une conduite globale.
Dans ces conditions modernes, pour produire 1 tonne d’Aluminium, il faut 1,9 t d’alumine calcinée, donc 3,3 t d’hydrate, donc de l’ordre de 8 t de bauxite, 350 kg de chaux, 365 kg de soude, 660 kWh. Du temps de Bayer, il faut multiplier ces chiffres par 2 ou 3.
Les opérations d’alors étaient discontinues (batche). Des refroidissements intempestifs, des évolutions au cours du temps (nucléï, migration des impuretés) faisaient de chaque production un cas particulier. Une image est celle d’ouvriers armés de brouettes et de pelles déchargeant décanteurs ou filtres. Les bases de cette cristallisation (dite précipitation) n’étaient pas connues. Et pourtant, en 5 ans, les pionniers ont maîtrisé la production.
En qualité, mais pas en quantité. Car les besoins en aluminium croissaient rapidement. Il fallait grossir les tailles des appareils et/ou multiplier leur nombre. Ce n’est qu’en 1923 que le procédé Bayer put répondre totalement à la demande. On ferma le Sainte-Claire Deville.
-
La calcination :
L’hydrargillite doit être déshydratée en alumine anhydre, pour être électrolysable selon le procédé Héroult. Cette déshydratation à chaud est une étape commune aux précédés Sainte-Claire Deville et Bayer. Elle a été une source d’ennuis insoupçonnés, à cause du manque d’analyse cristallographique et de la présence de soude.
Entre 250 et 400 °C, l’hydrate se décompose et perd son eau.
Vers 1000-1250°C, l’alumine amorphe Al2O3 cristallise en alumine alpha, celle qui doit être obtenue pour l’électrolyse. Un temps de séjour d'une heure est nécessaire. A l’époque, les températures élevées sont difficiles à obtenir et à maintenir dans de grands fours.
Si la cristallisation de l’alumine alpha n’est que partielle, une série de phases intermédiaires nuisent à l’électrolyse. On pratiqua une tactique de cimentiers : On stockait des lots (en sacs), et on expédiait des mélanges de lots, afin d’assurer une qualité moyenne.
Pour éliminer la soude, trois voies se présentent :
-
Cristalliser plutôt que d’agglomérer (mise au point de Gardanne)
-
Ajout de silice, qui insolubilise le sodium en silicoaluminate
-
Ajout de minéralisants halogénés, qui forment avec la soude des composés volatils.
3.6 Les boues rouges :
Les bauxites contiennent une forte proportion d’hématite, oxyde de fer qui se retrouve dans le résidu, et qui lui donne le nom de boues rouges. Pour donner une idée de la couleur, c’est avec l’hématite que l’on fait le rouge à lèvres.
A l’époque, bauxite et boues rouges sont considérées comme des argiles, autrement dit de la terre, sans risque particulier, sauf si les boues sont mal lavées. La pollution se résume à 2 points : Effluents liquide de pH très élevé, boues rouges caustiques. Tous les sites, une vingtaine de par le monde, pratiquent le stockage. Gardanne le fait contre la ville et contre le ruisseau des Molx, qui donne la Luynes.
Avec les sensibilités d’alors, aucune nuisance n’est reportée nulle part.
A Gardanne, les poussières colorent le quartier, à cause de l’hématite, mais les gens en prennent l’habitude. Ils savent bien que les fumées des poêles à charbon sont autrement plus irritantes. Plus tard, à juste titre, on craindra plus la centrale (qui ne lave pas ses gaz acides), et l’incinérateur du vallon Saint-Pierre, machine à dioxine et à cancérigènes.
Le monde entier jette, à tort ou à raison, les boues rouges sans trop de précautions, du Japon au Canada, en passant par la Grèce et la Hongrie.
En 1972, un procès condamne la Société Montedison pour déversement de boues rouges toxiques dans la Méditerranée. Il s’agit des résidus de la fabrication de l’oxyde de titane, bien plus polluants que ceux de la production d’alumine. Mais ils portent le même nom …
En 2010, un mur retenant des boues rouges d’alumine se rompt et provoque un drame en Hongrie. On avait fait une erreur impardonnable : Faire un mur en béton, alors que la soude détruit le béton. Le désastre, fortement mécanique, a laissé l’image de « boues rouges = danger = pollution ».
On a, depuis, tout entendu, tout lu, sur une bataille qui est sortie du cadre scientifique. Il ne s’agit pas ici de prendre parti, mais de rappeler un semblant de démarche scientifique :
-
Quels sont les retours mondiaux d’une expérience d’un siècle ?
-
Les terrils, au moins 4 à Gardanne, sont-ils plus (ou moins) radioactifs que les boues ?
-
L’égout de Marseille est-il plus (ou moins) dangereux que les boues en mer ?
-
De toute façon, ne peut-on pas traiter tous les résidus boues rouges, mais en l’imposant au monde entier, afin de ne pas biaiser la concurrence ?
Bayer Karl-josef (1847-1904)
-
1847-1892 : Avant le procédé
Bayer est né dans une famille allemande protestante, en 1847, dans la ville textile de Silésie autrichienne nommée Bielitz (aujourd’hui Biełsko-Biala en Pologne).
La famille de sa mère l’immerge dans l’industrie textile, dont il perçoit un dilemme : Son grand-père est un teinturier rigoureux, traditionnel, qui gagne mal sa vie, alors que le frère de celui-ci est un drapier moderne, qui vend ses laines à la cour impériale et partout en Europe.
Son père est titulaire d’un diplôme en draperie, mais il s’est détourné de ce secteur, qui l’impliquait trop dans les histoires de sa belle famille. Il exerce le métier d’architecte.
Le jeune Karl est orienté vers l’architecture, mais son goût va à la chimie de la teinture.
A 17 ans, il part étudier en Allemagne. Il suit pendant 2 ans l’enseignement du professeur Fresenius à Wiesbaden, et acquiert les fondements de la chimie analytique (1864-1866).
Sur recommandation de Fresenius, il travaille pendant deux ans et demi comme chimiste-conseil à la grande fonderie d’acier des frères Eugène et Léon de Dorlodot à Acoz, près de Charleroi. Tout près, Ernest Solvay invente ses procédés.
Le jeune homme tire deux leçons de cette expérience. La réussite demande une extrême mobilité. Il passera sa vie à courir le monde. Il faut aussi une formation académique et spécialisée. En décembre 1869, il s’inscrit à l’université de Heidelberg, un des hauts lieux de la chimie allemande. Il y suit des cours de chimie et de physique expérimentale auprès de Robert W. Bunsen et Gustav Kirchhoff, cours perturbés par la guerre de 1870.
En 1871, Bayer occupe la fonction de deuxième assistant de Bunsen, qui a ouvert le champ de l’électrolyse, en obtenant, à l’aide d’une pile de son invention, des métaux comme l’aluminium, le chrome, le magnésium et le manganèse. Bayer suit plutôt la chimie analytique. Il travaille sur une méthode de préparation du sulfate d’indium pur.
Le 31 juillet 1871, il obtient son diplôme de doctorat avec les félicitations.
Rentré en Autriche-Hongrie, il s’engage dans l’enseignement, comme assistant de la chaire de chimie générale et analytique, à l’Institut technique de Brünn (Brno). Il côtoie le chimiste et technologue Karl Zulkowsky ainsi que le moine augustin Gregor Mendel. Ce dernier est le supérieur du monastère Saint-Thomas. Son fameux essai sur les hybrides des pois est considéré aujourd’hui comme l’acte fondateur de la génétique moderne.
Grâce aux faveurs de Mendel, il loue une petite boutique dans un bâtiment annexe de Saint-Thomas, et y installe un laboratoire d’analyses chimiques. Mais il vise plus. Il se lance dans le commerce et vend l’acide salicylique, le premier médicament synthétique de l’histoire, dont la fabrication industrielle vient d’être mise au point à Leipzig par le chimiste Hermann Kolbe. À l’aide d’annonces astucieuses, Bayer crée une marque personnalisée et lance la Véritable Pulchérine du docteur Bayer , Meilleur remède contre les grains de beauté et taches de rousseur, elle « confère à votre teint des couleurs de roses et de lys ».
Il a 25 ans, vit détaché de sa famille, fort d’une solide formation de chimiste, et décidé à une réussite personnelle, aussi bien scientifique que pécuniaire.
Hélas, ses affaires sont médiocres et tournent carrément à la faillite lors de la crise de la bourse de Vienne, puis de l’effondrement des banques new-yorkaises.
Deux anciens élèves de Bunsen, Schneider et Bagh, lui offrent du travail à Tentelev, près de Saint-Pétersbourg, chez Schneider & Co., qui s’intéresse aux sulfates d’alumine (1876).
En 1876, à 29 ans, Karl part à Saint-Pétersbourg. Il se passionne pour le textile, il a des idées sur une analyse exacte et rapide de l’alumine et des aluns. Il compte se relancer après ses désillusions. Notre aventurier fonce.
Les sulfates d’alumine de synthèse sont plus constants, plus économiques et plus solubles que les aluns naturels. Trois producteurs se partagent le marché européen : Alais & Camargue à Salindres, Goldschmieden à Breslau, et Giulini à Ludwigshafen. Tous opèrent de la même façon : On part de l’alumine Sainte-Claire Deville, que l’on plonge dans l’acide sulfurique chaud. On refroidit et on lave.
Schneider & Co. utilise ces sulfates comme mordants en teinture, mais se heurte à un manque de qualité (acidité et/ou présence de fer). Il développe la recherche sur ce produit.
Bayer voit aussitôt que le fer vient de l’alumine, qui elle-même vient de la bauxite.
En décembre 1885, il publie dans Chemical News une nouvelle méthode de dosage de l’alumine et des aluns. Il dissous ces produits dans la soude et opère un dosage alcalimétrique, le tout en vingt minutes. Le voilà au devant de la scène.
Le teinturier Blondel applique l’analyse avec succès. Bayer lui rend visite, à Rouen, en 1887. Car il a repris sa marche de loup solitaire, pour vendre une série de brevets.
En effet, un jour de 1886, il a précipité une alumine hydratée pure, à partir de l’aluminate sodique. Il a réussi grâce à l’agitation et à l’apport de semences. Il s’est bien gardé de publier, ou d’en parler à Schneider & Co. En juillet 1887, il dépose les brevets allemand, anglais, français, puis américain et belge. Il revendique d’abord un intérêt économique, en supprimant l’emploi de l’acide carbonique, en recyclant la soude caustique employée, en opérant à froid, en consommant moins d’énergie et moins de matières premières. Il revendique surtout une alumine exempte de fer, de silice et d’acide phosphorique.
En 1887, Augé & Cie, premier grand fournisseur de bauxite, livre 1 tonne de bauxite blanche de Villeveyrac (Hérault) et 1,5 tonne de bauxite rouge du Var à Schneider & Co. Bayer a de quoi tester la fabrication d’alun pur.
Pendant que le monde scientifique s’excite sur l’obtention de l’aluminium par électrolyse, Bayer se concentre sur l’alun de synthèse. Au lieu de la calcination classique de la bauxite en présence de carbonate de sodium (Sainte-Claire Deville), il lessive sous pression à la soude caustique, voie évoquée mais non pratiquée par Sainte-Claire Deville, voie humide qui s’effectue avec autoclave, filtre-presse, cristallisoir, évaporateur. Meilleur rendement, meilleure qualité du produit, coût réduit.
En 1890, Bayer fait un aller-retour à Chicago, afin de montrer sa collection de minerais à l’exposition universelle.
Toujours aussi mobile, il quitte Tentelev pour l’Oural à l’automne 1891. La raison en est une recommandation du grand professeur de chimie Dmitri Mendeleïev auprès d’Ouchkov, propriétaire d’une usine à Élabouga, dans la région de Kazan. Là-bas, il a les mains entièrement libres. Il dépose des brevets additionnels (1892) et contacte les producteurs allemands d’alumine, Bergius et Giulini.
Nouveau voyage. Heidelberg puis Mannheim où Bayer signe, le 31 août 1892, un contrat de licence avec Giulini pour l’Allemagne, la Suisse et l’Italie. Giulini lui demande de garder le silence sur cette affaire. Bayer se renseigne auprès de Bergius sur le procédé d’alumine pratiqué à l’usine de Goldschmieden (qui est le Sainte-Claire Deville).
Sur la route d’Elabouga, Bayer passe à Tentelev, et épouse, à 45 ans, Alma von Witte, de famille balte, âgée de 24 ans, nièce d’un ministre russe. Leur future fille rapportera qu’Alma était charmée par ce chimiste autrichien parlant plusieurs langues, excellent chanteur et qui « savait faire rire tout le monde ». A Élabouga, Bayer monte les installations nécessaires à son procédé de sulfate. Il juge « bonne » la bauxite locale.
Giulini n’est pas satisfait des résultats qu’il obtient lors des essais qu’il entreprend à Ludwigshafen. Ses agitateurs et évaporateurs consomment beaucoup trop de charbon.
-
Ce ne sont que des maladies d’enfance, lui répond Bayer.
Pendant ce temps, Héroult fait ses premiers essais d’électrolyse à Neuhausen, où Goldschmieden était le fournisseur d’alumine imposé. Fin 1888, avec la création de l’usine de Froges par la SEMF, il espère avoir accès à l’alumine de Salindres. Les banquiers d’Alais & Camargue refusent.
-
1893-1900 : Bayer, le procédé, et gardanne
Qu’il soit marié ne change rien. Bayer laisse son épouse à Elabouga et part pour l’Occident. Autriche, Allemagne. Le 11 juillet 1893, à Paris, il cède les droits français de ses brevets à la Société française de l’aluminium pure (SFAP). La SEMF voulait aussi acquérir le brevet, mais elle a été devancée.
Le 30 août, en homme d’affaire, Bayer a une entrevue avec les dirigeants amis de SFAP et SEMF. L’installation de la production d’alumine se fera à Gardanne et sera dirigée par Paul Kienlen. Bayer s’y rend pour la première fois début septembre. Il se loge dans un hôtel aixois. L’impression est bonne (le lieu, Paul Kienlen, la volonté des sociétés).
Il repart aussitôt pour Vienne. Chez son frère Félix, il écrit une lettre cinglante à Giulini qui, toujours mécontent du procédé, ne s’acquitte plus de ses obligations envers lui. Le cas se reproduira, qui demande de situer le contexte.
-
Le procédé peut ne pas fonctionner, ne pas être accompagné des recommandations nécessaires. L’acheteur suspend légitimement ses versements.
-
Le procédé fonctionne moyennement. L’acheteur entrevoit une mise au point qu’il fera lui-même et dont il veut tirer profit et secret. Il noircit la situation.
-
Les droits nationaux, et plus encore les droits internationaux, sont une jungle où tous les coups sont permis. L’information est difficile, mensongère.
Le 13 septembre, Bayer est en Allemagne, où il donne procuration à son agent Georg Krause, pour la vente de son brevet en Grande-Bretagne. Dans ce pays, plusieurs personnes ont manifesté leur intérêt.
Rentré à Élabouga, Bayer voit venir au monde son premier fils, Erich.
Il repart aussitôt. Début février 1894, il retrouve Charles Combes (SFAP) à Gardanne où sont produits les premiers « quintains » de son alumine. Apparemment, la mise en route est normale. Il complète ses indications et repart satisfait.
Le 25 avril, il est à Londres, où il cède une licence à BACO. Aux USA, la Merrimac a acheté les droits d’exploitation le jour même de la sortie du brevet (6 mars 1893).
Le 28 mai 1894, Bayer est de retour en France. Il donne à la Société chimique de Paris une conférence qui récapitule ses connaissances sur la bauxite rouge du Var, et sur la composition chimique du résidu rouge. Les rencontres avec des dirigeants de la SFAP (Héroult et Combes) sont qualifiées d’amicales.
En été 1894, il s’embarque pour les États-Unis où l’appelle son contrat avec la Merrimac. Il est accompagné de sa femme, de son fils, d’une bonne et d’un ami. Il y passe un peu plus d’une année. A Woburn, près de Boston, le procédé démarre en 1895 avec succès. Le métallurgiste Joseph W. Richards, futur conseiller d’Alcoa, constate que le procédé du Dr. Bayer a fait ses preuves.
La famille s’augmente du petit Walter.
Bayer a contacté la Pittsburgh Reduction Company (Alcoa), l’entreprise d’électrolyse dirigée par Charles M. Hall, et grande consommatrice d’alumine. La Pittsburgh ne donne pas suite, espérant mettre au point son propre procédé.
A l’été 1894, la SFAP a épuisé son capital, car les démarrages des ateliers de Froges et de Gardanne sont très difficiles et onéreux. Début 1895, la SFAP et la SEMF fusionnent. La licence Bayer est dans la corbeille de mariage, et non sous estimée.
À Gardanne, la fabrication est souvent arrêtée. Combes alerte Bayer. Mais celui-ci est à Boston, chez Merrimac Chemical, et il invite Combes à venir observer son procédé. C’est Paul Héroult, successeur de Kienlen comme directeur de la fabrication à Gardanne, qui fait le voyage. Il n’en rapporte, on ne sait pourquoi, que peu de renseignements.
À l’usine, les problèmes persistent : les évaporateurs sont insuffisants, des composés se déposent partout, le système de filtration est impraticable. Tous ces signes indiquent de mauvaises conditions de cristallisation (semences, agitation, température, temps de séjour), mais personne sur place n’y voit clair. L’interdépendance des opérations complique tout. On ne produit que 2 t/j, au lieu du double.
La SEMF n’offre à Bayer que la moitié de la somme restant à payer. Bayer refuse, accepte l’arbitrage de Combes et consent à revenir une troisième fois à Gardanne.
Karl et sa famille retournent en Autriche en septembre 1895. Les affaires en Russie sont terminées. On s’installera à Rietzdorf an der Pack, en Slovénie, où Bayer a acquis des mines de bauxite et un terrain situé près de la gare, et où il fait construire par son frère Félix une grande villa. En attendant, on vit chez son frère Alexander.
En 1896, nouveaux ennuis de cristallisation à Gardanne. Convoqué sur place, Bayer arrive en octobre. Héroult, qui travaille de façon intuitive, a l’obsession de produire plus. Il dérègle involontairement le cycle et ne produit plus. Bayer travaille de façon méthodique. Il adapte les conditions à la technologie disponible, produit peu mais produit. Il dissuade Héroult de concentrer les liqueurs à feu nu, mais ne le convainc pas sur les autres points. Il maintient « qu’il faut pour diriger l’usine un chimiste très compétent pour suivre la fabrication, aidé d’un second s’occupant spécialement des ouvriers et du matériel ».
Dans cette atmosphère tendue, Héroult traite Bayer de « tête de vieux mulet ».
Karl fait ses valises et ne s’occupera plus de Gardanne.
A son retour naît son troisième fils, Guido. Aux grands producteurs, Bayer présente le projet, étayé par des calculs et des analyses chimiques, d’une usine d’hydrate chez lui, à Rietzdorf.
Héroult veut arrêter le versement des royalties. Combes n’est pas du même avis. Le Conseil décide de muter Héroult à La Praz, et de confier la direction technique de Gardanne au chimiste Alfred Guénivet (témoin et rapporteur de l’altercation entre les deux inventeurs).
En février 1897, l’usine annonce « une marche plus régulière » qui «prend une allure plus industrielle ». Combes verse à Bayer la somme de 41 000 francs sur les 60 000 qu’il a réclamés, les 19 000 francs restants lui étant remis « pour solde » lorsque ses promesses seraient tenues.
Bien qu’écourté, le séjour de Bayer à révélé l’importance d’un suivi constant de la production par des méthodes scientifiques : Analyse chimique, température, débits. Il a pointé du doigt le manque de contrôles. A partir du moment où Alfred Guénivet (et son ami Hönig) surveille la production, celle-ci s’améliore. Des modes opératoires peuvent être rédigés. Ils contiennent des mots allemands Ausbeute (rendement), derniers souvenirs du maître.
Les difficultés ne seront définitivement surmontées que vers 1900. Mais on ne peut être qu’admiratif devant ce triple succès, finalement obtenu en peu de temps (7 ans), quand on connaît les réalités chimiques, technologiques et humaines qu’il fallait surmonter.
-
Les pionniers de Froges et de Gardanne ont gagné le pari de l’industrialisation simultanée de deux procédés révolutionnaires, avec patience et générosité.
-
A Gardanne, le laboratoire d’analyses et la contribution de tous, à tous les niveaux, a permis une optimisation certes longue à venir, mais qui sera le fondement même du procédé, sur laquelle Gardanne évoluera vers « la meilleure usine du monde ».
-
1900-1904 : Bayer après gardanne
Devenu prudent à cause du démarrage de Gardanne, Bayer suit de près celui de Larne (BACO, en Irlande). La première alumine y est produite le jour de Noël 1895. Dès 1896 les détails techniques du procédé sont publiés. Larne a la chance d’avoir des autoclaves et des cristallisoirs bien plus grands que ceux de Gardanne. On peut donc affirmer que Gardanne est le premier, qu’il sert d’expérience à Bayer, mais qu’ensuite Larne aide les progrès gardannais.
La villa de Rietzdorf étant habitable, on s’y installe. De 1896 à 1901, viendront au monde trois autres enfants, Herbert, Fritz et Elsa. Pour eux, Bayer bricole une petite charrette tirée par des chèvres. Le verger derrière la villa donne des fruits et des légumes.
Mais dans ce cadre idyllique, Bayer sent son déclin. Giulini réaffirme que son procédé serait inutilisable, la SEMF ne lui paie que la moitié de l’honoraire réclamé pour l’étude d’un four à calciner. La BACO ne le rémunère que partiellement. Depuis qu’à Gardanne et à Larne le prix de revient de l’alumine a baissé, les industriels ont moins d’intérêt pour son brevet. Ils ont tout simplement des fournisseurs.
La Société allemande AIAG prête à Bayer, qui est à court d’argent, 5 000 florins pour la construction de son unité d’essai à Rietzdorf. Mais elle va observer le procédé à Larne, sans Bayer. On n’a plus besoin de lui.
Fatigué, il tombe malade. Il écrit : « Toute cette agitation a gravement atteint mes nerfs, ce qui se manifeste surtout dans les jambes qui ne veulent plus m’obéir ». (1899)
Puis il repart dans les affaires. Il adresse à Neuhausen des échantillons d’alumine dont les résultats d’analyse s’avèrent excellents. Il va à Genève rencontrer AIAG. Il fournit un procédé de cryolithe artificielle à la SEMF et à AIAG, à qui il demande des acomptes, mais en vain.
« Auriez-vous la gentillesse de me livrer un wagon de soude, pour que je puisse continuer mon travail… » AIAG ne livrera pas. Car AIAG négocie en secret avec la Merrimac, qui propose de livrer une unité Bayer clé en main, moyennant la somme de 133 000 dollars.
Cette même Merrimac a construit une usine d’alumine pure de 16 à 18 tonnes d’hydrate par jour, juste en face d’Alcoa. C’est un piratage, un détournement de la propriété industrielle.
Les USA se lancent donc dans l’association des procédés Hall et Bayer, 7 ans après Froges-Gardanne.
À l’Exposition universelle de 1900, les producteurs européens présentent de l’alumine Bayer, dont un échantillon a été fabriqué par lui-même à Rietzdorf.
Les avis sont partagés. Les uns recommandent cette voie pour la production de l’aluminium, d’autres pointent le risque de « catastrophes horribles » comme celle survenue à Gardanne, à cause du fonctionnement sous hautes pressions.
La résistance que Bayer rencontre en Allemagne et en Suisse provient de AIAG, très hostile à Bayer. En 1901, elle décline la demande d’aide du maître de Rietzdorf.
La recherche de développement va se faire sans lui.
Le secteur industriel se concentre, se professionnalise, se cartellise. Les contrats de collaboration entre SEMF, AIAG et BACO, aboutissent, en 1901, à la fondation de l’Aluminium Association. La collaboration d’un inventeur indépendant est écartée. On n’impute plus à Bayer que les problèmes de fabrication rencontrés dans les usines.
A l’été 1903, Bayer est couvert de dettes et « importuné à l’extrême ». Il rencontre à Genève une société italienne qui s’intéresse à son procédé. Il écrit à Héroult pour qu’il vende les plans des installations électrolytiques.
Emile Vielhomme, secrétaire général de l’Aluminium Association, brandit alors le spectre de l’apparition de nouveaux concurrents. Il consulte Alfred R. Pechiney et envoie Paul Héroult à Milan, où Bayer poursuit ses négociations. Le 12 décembre, il parvient à un accord. Bayer reçoit 25 000 francs, c’est-à-dire un peu plus que les 19 000 dus depuis l’arbitrage de Combes, contre l’engagement de ne plus donner à personne des conseils sur l’alumine, de céder tous ses droits et de transmettre tous ses papiers, livres et documents relatifs à l’alumine à la SEMF, autrement dit Gardanne. L’inventeur est mis hors jeu. Il n’a plus qu’à prendre une retraite non dorée, car il doit combler de nombreuses dettes.
Il meurt le 22 octobre 1904, de façon « inattendue » selon Alma. On l’enterre le 25.
Peu après, Georg Giulini, invité par Alma, inspecte « de manière approfondie » les installations d’alumine de Rietzdorf, mais ne donne pas suite.
Alma se rend à Neuhausen et présente à l’assemblée de AIAG une vue d’ensemble des nouvelles usines Bayer qui viennent d’être réalisées en Europe. D’une part, le besoin est grand, pour alimenter les usines d’électrolyse, d’autre part on ne construit que des usines selon le procédé Bayer.
AIAG décide de se lancer (1905). Il contacte la SEMF, traite finalement avec BACO les plans de construction des bâtiments et appareils de Larne, pour la somme de 2 000 livres.
En 1906, Gardanne construit, enfin, une plus grande usine, de l’autre côté de la route.
Alma est réduite à brader la villa, l’usine et les mines de bauxite. Elle quitte Rietzdorf et déménage, avec ses enfants, à Graz.
En 1910, le professeur à Karlsruhe P. Ashkenazy lance un appel public en faveur de la veuve de l’inventeur et des six enfants. Elle recevra des aides de la part de AlAG devenue Alusuisse et de L’Aluminium français. Dans ses souvenirs, elle mentionne également avoir reçu, suite à ses lettres, deux fois 200 shillings de la BACO et deux fois 400 dollars de Merrimac. Elle vivra encore longtemps, désargentée.
Entre 1904 et 1907, le marché de l’alumine triple de volume. Le contrôle des gisements de bauxite et du procédé deviennent l’enjeu majeur, afin d’écarter de nouveaux venus.
AIAG construit l’usine de Saint-Louis-des-Aygalades qui sera en 1914 la plus grande unité Bayer en Europe. Salindres lance l’atelier n° 2. La Société d’électrochimie démarre une usine à La Barasse. Giulini ouvre une unité à Moste (Ljubljana) afin d’approvisionner l’usine d’électrolyse de AIAG à Lend, réalisant ainsi le projet de Bayer. En Italie, la SIFA produit de l’alumine pure à Bussi, près de L’Aquila.
En Europe comme aux États-Unis, cette restructuration du secteur s’achève entre 1908 et 1910. Dès lors, les usines d’électrolyse du monde entier sont alimentées par de très grandes unités de production d’alumine Bayer, exploitées par les producteurs d’aluminium.
Le secteur est maintenant outillé pour répondre à la dynamique exponentielle du métal léger au cours du XXe siècle.
Bayer tombe dans l’oubli. Son épouse meurt à 94 ans à Graz (1962). Cette année-là, la ville de Braunau donne le nom de Karl Bayer à une rue.
Pour le centenaire de son invention (1987), l’Autiche sort un timbre avec son portrait.
Pour le centenaire de sa mort, la Hongrie réalise une médaille en aluminium en son honneur. Fathi Habashi, de l’Université Laval à Québec, publie une biographie très complète.
Paul Louis Toussaint HÉROULT (1863-1914)
" J'ai le verbe haut, c'est exact, c'est pour m'obliger à écouter ce que je pense ».
-
1863-1892 : Avant le procédé
Héroult naît le 10 avril 1863 à Thury, village pittoresque de la "Suisse Normande" (Calvados), grâce en particulier au château des ducs d’Harcourt. La ville sera détruite à 75 % pendant la bataille de Normandie, en juillet 1944.
Son père exploite une tannerie, sur les berges de l'Orne. Sa mère, Elise Lepetit-Desaunay, est fille des riches propriétaires de l'Hôtellerie de la Poste : Relais de Poste avec 60 chevaux. Elle est très pratiquante, respectueuse, sainte femme, intelligente, fine. Elle suivra et aidera son fils toute sa vie.
A l'âge de 7 ans, Paul décide de construire un canal. Il rassemble ses camarades, distribue des pelles, et dirige son premier ouvrage. Il est déjà entreprenant et meneur d’hommes.
En 1870, sa mère l'emmène en Angleterre auprès de son grand-père paternel. Ce séjour de trois ans à Londres lui procure une bonne maîtrise de la langue anglaise, ce qui lui sera fort utile plus tard.
De retour en France, il est mis en pension au lycée de Caen, où il restera deux années.
A 10 ans, il se révèle comme étant un personnage hors du commun : il couvre ses cahiers de dessins extraordinaires et se montre très indépendant. On le dit espiègle et indiscipliné.
En 1875, son père transfère son atelier aux portes de Paris, à Gentilly, au bord de la Bièvre. Paul entre interne au collège Sainte-Barbe. Il s'y fait vite remarquer par sa vivacité d'esprit. Il s’intéressé en particulier aux sciences naturelles, physique, chimie, mécanique. Mais il ne se plie pas à la discipline scolaire. Il passe des heures à lire Jules Verne.
En 1878, à 15 ans, il lit le livre d'Henri Ste-Claire Deville De l'aluminium, ses propriétés, sa fabrication et ses applications. Il a trouvé sa vocation. L’aluminium ne le quittera plus.
Il obtient le baccalauréat ès sciences et entre au cours préparatoire de l'École Supérieure des Mines (1882). Un jour où la classe est sans professeur, il fait le pari avec ses camarades de jeter l'éponge du tableau à la tête de celui qui franchira la porte le premier... Et ce sera le directeur ! Renvoi immédiat de l'École, où il n’a fait qu’un an, arrêt de sa scolarité. Une autre version se contente d’avancer qu’il a échoué au concours d’entrée.
Paul n’en est pas fâché, car il veut se consacrer à ses recherches sur l'aluminium.
Sur les bancs préparatoires à l’Ecole des Mines, il a connu Louis Merle, personnage qui jouera bientôt un grand rôle auprès de lui.
Un malheur oriente encore son destin : L’année suivante, son père meurt. Que faut-il faire de l’atelier de Gentilly ? Paul décide de l’utiliser pour ses expériences. Ses amis Lucien Van Kerguistel et Louis Merle s’associent à lui. Or, Henri Merle, le père de Louis, a créé en 1855 une usine d’aluminium à Salindres, basée sur le procédé Deville. Elle est unique au monde.
Héroult recherche une voie thermique, et donc électrique, pour atteindre de hautes températures. Mais la première dynamo du Belge Gramme n'a que 15 ans. Héroult installe une dynamo Bréguet de 30 volts, 400 ampères. Il construit un four en briques et brûle du charbon à l’extérieur pour obtenir la chaleur maximale.
Les trois amis Paul, Louis et Lucien se relaient nuit et jour pour entretenir des chauffes de 48 à 56 heures, sans jamais trouver de métal au fond du creuset.
Paul a alors l’idée d’ajouter un fondant, pour permettre à l’alumine de se réduire à plus basse température : La cryolithe du Groenland. Et voilà que l’aluminium apparaît.
L’invention de 1886 est triple :
-
La cryolithe fondue sert de fondant de l'alumine
-
Le creuset sert lui-même de cathode. L’ion Al +++ va vers l’anode en graphite.
-
La température de 900°C est assurée sans chauffage extérieur, par l'effet Joule du courant électrique qui circule dans l'électrolyte fondu.
Il faudra bien sûr perfectionner, mais Héroult pense tout de suite à exploiter son brevet.
Convaincre des hommes d'affaires et des banquiers n'est jamais facile, mais une voie royale s’ouvre : Salindres, où Henri Merle, décédé, a été remplacé par Alfred Rangot dit Péchiney. Sauf que Monsieur Péchiney est un seigneur, qui ne croit pas à l’aluminium ni à l’électricité, et que le jeune Héroult y croit avec fougue jusqu’à l’irrespect.
L’anecdote met en avant une partie de billard. Paul est un virtuose en la matière. Péchiney se flatte d’être adroit, et, à Salindres, « au château », on le laisse gagner. Péchiney défie amicalement Héroult, mais celui-ci l’étripe, le ridiculise.
Billard ou pas, les deux hommes ne se feront plus jamais de cadeau.
Héroult contacte la banque Rothschild. Adolphe Minet, l’expert de la banque, émet un avis négatif, peut-être tendancieux, car il prend lui-même un brevet (future usine Calipso).
Rencontré fortuitement, un certain Jules Dreyfus se dit ami d'industriels suisses qui pourraient s'intéresser à sa découverte. Voici Héroult près d’une chute du Rhin, à Neuhausen (Suisse). Le 26 avril 1887, il signe un contrat avec la SMS, pour l'exploitation industrielle de son procédé. Il construit une cuve électrique de 6000 ampères. Les résultats sont excellents.
Il épouse Berthe Béliot (1888).
Dreyfus l'associe maintenant à la SMEF, dans le but de produire de l'aluminium, du silicium et divers alliages. Héroult sera directeur technique, sans participation au capital. L’usine est créée à Froges. Elle démarre le 21 avril 1889.
L’aluminium en sort à un prix trop élevé. Héroult fulmine, renvoie du personnel pour incompétence, réduit la main d’œuvre. La panique s'installe, sauf dans sa tête. Il travaille avec acharnement, construit d’autres creusets, avec 4 anodes, puis 6 (1892).
Le prix de revient commence à baisser. Il renforce la cuve avec une couche de carbone, il réduit le voltage électrique de 6 à 5 volts. Le kilo d'aluminium passe de 66 F (1888) à 5 F.
Il persuade la SEMF de construire une usine plus grande. Ce sera La Praz, dans la vallée de la Maurienne.
Au même moment, la Société Française d'Aluminium Pur, expérimente à Gardanne le procédé Bayer. On demande à Héroult de l'évaluer (1893). Il trouve cette alumine bien plus intéressante que celle de Salindres. La SEMF absorbe la SFAP en 1895.
Cette année-là, Berthe Béliot meurt, lui laissant 2 enfants, Paul et Henriette. Il se partage entre La Praz et Gardanne, ou il est directeur. Son but est d’accélérer le développement. On est à 1 t/j, Héroult veut 10 t/j, pour une unité dont le nominal est 2 t/j.
Tombé malade à Gardanne, il fréquente le médecin Antonini et des étudiants en médecine venus de Marseille pour l’usine. Il se passionne pour cette science et hésite un moment à suivre cette profession. Son remède favori : Huile de foie de morue.
Il appelle Bayer. Comme celui-ci est à Boston, aux USA, il va le voir. Temps perdu.
Bayer arrive finalement à Gardanne en octobre 1896. Tous deux s’attaquent au problème de la productivité. Paul n’a pas d’heure. Il peut travailler 15 h de suite, la nuit ou le jour. Il passe d’une idée à l’autre. Il en a beaucoup, et toutes ne sont pas mauvaises. Mais il bouscule le personnel et surtout Bayer, qui passe son temps au labo. La logique de la cristallisation n’étant pas une logique de paramètres indépendants, Héroult fait souvent reculer, au lieu d’avancer, et il impute les échecs à Bayer, trop tatillon à ses yeux.
Nettement plus âgé et fier (c’est lui l’inventeur), Bayer claque la porte.
Héroult tombe malade, soigné par sa belle mère. De sa maison en location, il continue de diriger l’usine et de faire des projets pour La Praz. C’est ainsi que sa superbe invention de la conduite forcée est née à Gardanne :
A La Praz, on envisage en effet d’utiliser une chute d’eau de 35 m, mais elle est sur la rive opposée à l’usine. Il faut franchir le torrent Arc. Héroult dessine une conduite forcée en tôle d'acier de grand diamètre en forme d'arc surbaissé, sans appui, qui résisterait à la pression hydrostatique. La conduite fera 2.50 mètres de diamètre, résistera aux coups de bélier, à la pression, aux vibrations dues à la vitesse de passage de l'eau, laquelle atteint 80 m/s, aux variations de température, à l'oxydation, etc. Ce sera une première mondiale.
La SMEF tire la leçon de la mésentente avec Bayer : Héroult se consacrera désormais au site de La Praz (Saint-Jean de Maurienne) et au perfectionnement de l’électrolyse.
Aux USA, Charles Hall a la même destinée qu’Héroult : Ils sont nés la même année (1863), ils ont fait leur découverte en même temps (1886), ils auront le même succès, et décéderont la même année (1914). L’avenir donnera cependant l’avantage à Héroult, car sa technologie (grosses anodes et cryolithe seule employée comme fondant) perdurera, alors que celle de Hall (petites anodes et addition de spath-fluor à la cryolithe) sera progressivement abandonnée. Calypso, qui a le procédé Hall, passe à la cuve Héroult en 1912.
A Froges, le four Héroult fabrique, dès 1896, sur une échelle industrielle, le carbure de calcium, puis le ferro-chrome carburé. Premières mondiales.
Car Héroult, écarté de l’alumine, délaisse l’aluminium pour l'électrosidérurgie (1899).
En 1898, il a épousé Marguerite Château, dont il aura 3 enfants.
Il partage sa vie entre Europe et USA. En 1912, il doit prendre le Titanic, mais il arrive trop tard. Il perdra ses bagages.
Nous nous en tiendrons ici à l’aluminium, et soulignerons que sa vulgarisation doit tout à l’alliance des procédés Bayer / Héroult. La production passe à 3455 tonnes (1897) puis 7339 tonnes (1900), 16 910 tonnes (1905), 23 000 tonnes (1910), 78 093 tonnes (1913). Le prix, parti de 78 f / kg (Salindres 1880) tombe à 3,75 f (1905).
Docteur Ingénieur « honoris causa » de L'École Technique Supérieure d'Aix-la-Chapelle et Médaille Lavoisier (1904), chevalier de la Légion d'honneur (1906), Héroult, contrairement à Bayer, connaît les honneurs et la fortune. Il sait aussi prendre du plaisir, concevoir des bateaux, naviguer (en 1900, en voyage de noces, il fait en 9 mois le tour du monde avec la famille Louis Merle). Il sait aller au bar, apprécier la bonne cuisine et le bon vin.
Sa fille cadette Elisabeth l’a décrit dans ses souvenirs :
« … regard grave, profond, intelligent et si bon. Forte tête aux cheveux bruns. Une barbe sombre toujours hirsute encadrant le visage. De taille moyenne. Aspect solide, sain, massif, puissant… Il redoutait les chutes sur les parquets cirés. Je le vois encore jetant un seau d’eau sur l’un d’eux. Toujours mal vêtu, il revenait de l'usine les vêtements couverts de poudre.
Plus tard, jamais je ne vis de plis à son pantalon, jamais il ne voulut se mettre en smoking. Arrivé à Cannes sur son yacht, il se verra refuser l’entrée du Casino. A cette époque Cannes était fréquentée par la haute société. Tout le monde connaissait le mendiant habituel de l’église. Papa loua deux smokings et le fit entrer au Casino avec lui.
Je le revois jovial, farceur, bon vivant, la simplicité même. Les mains fortes, un peu potelées, aux doigts tâchés de nicotine, avaient des gestes rares mais précis, surtout pour manier le crayon ou la queue de billard. J'entends encore son rire énorme, sa voix de stentor chantant les ritournelles à la mode qui faisait trembler les vitres. J'entends ses jurons fracassants, je revois ses coups de pieds. Fureurs de courte durée. »
Paul Héroult décède le 9 mai 1914 de la typhoïde, à Antibes, au cours d'une croisière qu'il accomplissait sur son yacht de 35 m nommé Samva, en Méditerranée. Depuis une dizaine d’année, il passait son temps en mer, laissant son épouse à terre. Il est enterré le 15 mai dans son village natal. Son œuvre marquera l'histoire de la Métallurgie. Il sera couvert d’éloges.
Car ses éminentes qualités d'ingénieur s’accompagnaient d’une ardeur irrésistible. Il aimait les ouvriers réfléchis et travailleurs, et pestait contre les tires au flanc. Amical et bon, influencé par sa mère, qu’il adorait, il était cependant craint, à cause de ses colères. Elles étaient brèves, et lui oubliait vite.
L’usine (1893-1906)
En 1893, Gardanne compte 3000 habitants. Le maire est Léon Poussel jusqu’en 1896, puis Agricol Maurel.
Il existe 2 puits de mines de lignite. La Félicie date de 1867, Biver 1 de 1892. Biver 2 ouvrira en 1909. Le four à chaud de Ferdinand Maurel, quartier Cauvet, sera fort utile.
L’eau était abondante, car cette ville est dans une cuvette. Biver I a percé la nappe phréatique, mais on compte sur des puits et sur l’eau même de Biver I.
Trois lignes de chemin de fer vont vers Marseille, Aix, et Carnoules par Brignoles. A leur création, la compagnie ferroviaire a acheté le terrain « Aubert » pour y faire passer la ligne à l’entrée en gare côté sud. Une grande partie du terrain est disponible.
Début septembre 1893, Charles Combes, de la SFAP, achète ce terrain, qu’il a visité avec Paul Kienlen et Karl Bayer. A l’extrémité sud, existait au Moyen Age une chapelle, dédiée à Saint-Michel, qui gardait un hospice et un cimetière. Le tout a disparu depuis longtemps, mais les travaux découvriront quelques os.
L’usine est construite selon le procédé Sainte-Claire Deville, et laisse une petite place à une unité Bayer, prévue pour au mieux 2 t/j. Les premières tonnes Bayer sortent début février 1894. D’entrée, se révèlent une foule de problèmes, en particulier à la filtration.
Au printemps 1894, Paul Héroult remplace Kienlen comme directeur de la fabrication.
Héroult, 43 ans, vient de perdre son épouse, qui laisse deux jeunes enfants. Aussi, vient-il à Gardanne avec sa belle-mère (Elise Béliot), qui prend la garde des enfants, de son beau-frère, (Julien Béliot), qui est chimiste et qui va l’aider. Julien est marié à Armandine Gouget.
Cette famille loue une partie de la vaste maison « Vaussan », une propriété au bord des près, flanquée d’un grand cèdre. Elle touche le quartier neuf (boulevards Bontemps et Forbin) et débute le « quartier de la Planque ». Aujourd’hui : n° 1, rue Jules Ferry.
Bayer revient en octobre 1896, et loge à l’hôtel, à Aix.
L’explosion de la chaudière, le 16 juillet 1898, à 2 h ½ du matin, fait une victime : Carlo Gabbanini, 19 ans, né à Larciano. Malgré cet accident douloureux, le Bayer produit 1075 t dans l’année, sous la direction d’Alfred Guénivet.
En 1932, l’explosion d’un autoclave fera 7 morts.
Le recensement de 1906 qualifie les personnes embauchées de journaliers ou employés à l’alumine. Les terrassiers, maçons, charpentiers, y sont nombreux. Ils doivent construire les bâtiments industriels de la nouvelle usine, le bâtiment administratif et des logements.
Le bâtiment des bureaux, dessin industriel, salle de réunion, est implanté côté nouvelle usine. Les logements ouvriers sont une tradition paternaliste du XIXième siècle, mais aussi une nécessité. Les cadres, le directeur en particulier, viennent d’ailleurs. Nombre d’ouvriers sont très mal logés, entassés parfois à 6 par pièce. Les autochtones sont des paysans, artisans, commerçants, pas du tout attirés par l’usine, qui n’offre pas un salaire attractif ni une façon indépendante de travailler. Mais il existe un grand réservoir de main d’œuvre étrangère : La compagnie L’Huillier a fait venir des centaines d’Italiens pour ses puits de La Félicie et de Biver I, sans les loger. Les salaires y sont plus élevés, mais les périodes chômées se multiplient, car le puits de Biver I s’inonde. Des Italiens passent à la SFAP.
Combes a acheté 2 terrains, à la fois dans Gardanne et proches de l’usine : L’un appartient aux hoirs du receveur des contributions Martin Mistral. La cité ouvrière prendra son nom (sud des boulevards Carnot et Bontemps). L’autre vient de la famille Provensal, au nord du chemin de Marseille. Il va recevoir la maison des directeurs, vers 1905.
Tous les bâtiments, bureaux ou habitations, sont de même style.
On remarque la sagesse de Combes : L’assimilation des migrants est facilitée par la proximité de la ville. En 1905, L’Huillier créera sa propre cité ouvrière, baptisée Biver, loin de Gardanne. L’intégration ne se fera pas.
Au recensement de 1906, Gardanne compte 3189 habitants. La ville a perdu des autochtones, partis par exemple en l’Algérie, mais elle a gagné un grand nombre d’Etrangers, Italiens pour la quasi-totalité. On compte 997 non naturalisés (soit 32 %).
L’usine emploie 400 ouvriers, directeur Alfred Guénivet. 318 d’entre eux vivent à Gardanne. 23 seulement (7 %) sont nés à Gardanne, 56 autres sont nés en France (18 %). La base ouvrière repose donc sur les Italiens (73 %).
Moyenne d’âge = 33,7 ans. Nombre < 20 ans = 22. Nombre > 59 ans = 13.
On compte 9 femmes, dites aux sacs, qui cousent les sacs et les toiles de filtres.
Quand le recensement veut bien préciser la spécialité, on relève un ingénieur (Georges Bourgerol, 33 ans, bd de la gare, un dessinateur (Jules Sunan), un mécanicien (Eugène Abel), un tonnelier (Gustave Julien), des surveillants (Pierre Hersi et Martial Michel), des ajusteurs (Fortuné Viou, Gaston Echeyle), des forgerons, chaudronniers, charpentiers, maçons. La grande masse, composée d’Italiens, est classée journalière.
références
HÖNIG Max, « Dr. K. J. Bayer », Wiener Zeitung, n° 162, 16 juillet 1932. Hönig est un ingénieur chimiste analyste
qui a participé au démarrage de Gardanne, du temps de Kienden et Héroult.
GUENIVET Charles, Institut pour l’histoire de l’aluminium (IHA), Historique de l’usine de Gardanne, note dactylographiée, 1933.
Guénivet est un ingénieur chimiste analyste, qui a remplacé Héroult et qui est resté
Directeur jusqu’à la fin des années 30.
BAYER Wolfram, Cahiers d'histoire de l'aluminium 2012/2 (N° 49) : Référence de base pour Bayer.
HABASHI Fathi, « Karl Josef Bayer (1847-1904). A Pioneer in Hydrometallurgy and Pressure Technology », in Progress in Extractive Metallurgy, vol. 1, New York, Gordon & Breach, 1973. Habashi a fait ses études d’électrochimie, vers la fin
des années 1950, à l’Université technique de Vienne avec Fritz Bayer, le cinquième
fils de l’inventeur.
HABASHI Fathi, « Bayer’s Process for Alumina Production : A Historical Perpective », Cahiers d’histoire de l’aluminium, n° 13, 1993-1994, p. 21-38 ;
SOUDAN Paul, Histoire technique et économique de la fabrication de l’alumine, Paris, Groupe Pechiney, 1970, p. 199. Ancien
Directeur à Péchiney.
RAVEUX Olivier, « Les débuts de la fabrication de l’alumine à Gardanne (1892-1899) », Cahiers d’histoire de l’aluminium, n° 13, 1993-1994, p. 7-20. Article non retrouvé.
MIOCHE Philippe, L’alumine à Gardanne de 1893 à nos jours. Une traversée industrielle en Provence, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1994, p. 17-43
AGNES LEBROU, obtenu par lien (voir de Biran) : Référence de base pour Héroult.
SEJOURNET Paul, Bulletin de l'Association des Anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris, Juillet et Août 1915
DE BIRAN, Bulletin de l'Association des Anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris, 1937-I
GUILLET Léon, Revue de l'Aluminium et de ses applications, numéro 84, 1936.
RAVIER Emile, Annales des Mines, juillet 1983, pages 43 à 48 - Industrie de l'aluminium et énergie électrique
Cahiers d'Histoire de l'Aluminium n° 29 (Souvenirs sur Paul Héroult)
GIGNOUX C. J., Histoire d’une entreprise française, Hachette, 1955. Le développement de Péchiney.
←
Paul Héroult
→
Carl Bayer
Conduite autoporteuse sur l’Arc, à Saint-Jean de Maurienne, conçue à Gardanne par Paul Héroult.
← Paul Héroult avec sa fille Henriette, en 1913.
Un an avant sa mort.
Il a tourné le dos à l’industrie. Le voici en commandant de bord, cravate et casquette.
←
Karl Bayer en 1903, à Rietzdorf.
Son épouse Alma, Karl, sa mère, son frère Félix.
Karl a 56 ans. C’est un homme usé et couvert de dettes. Il va mourir soudainement, mais nul doute que cet homme était au bord du désespoir.
↑ Avant 1905 : Première de l’usine. La cheminée de la chaufferie au charbon. Dessous, l’allée des platanes, puis l’allée des mûriers de la propriété Provensal. Dessous encore, les 3 maisons accolées de la rue Hoche et le champ qui recevra la maison des Directeurs en 1905. Alfred Guénivet y habitera. Né à Vierzon en 1867, il avait la particularité de vivre avec ses 3 sœurs (Berthe, Gabrielle et Marie Thérèse) et son oncle, Ernest Tradoux.
↓ Après 1905. Sainte Claire Deville à droite ; Bayer à gauche.